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Un espace "filles" dans les cours de récré lyonnaises ?

La Ville de Lyon a adopté, lundi 27 février, son premier plan d'actions pour l'égalité femmes-hommes : 65 actions qui seront mises en oeuvre ces deux prochaines années. A l'occasion de la journée de la femme, Lyon Capitale vous en révèle quelques exemples qui ne plaisent pas à tous les élus (actualisé le 8 mars à 15h05).

La semaine dernière, le conseil municipal de Lyon a adopté un plan d'actions pour l'égalité femmes-hommes proposé par la majorité et composé de soixante-cinq actions, une première dans l'histoire de la ville. Adopté en même temps que la Charte européenne pour l'égalité femmes-hommes dans la vie locale, ce plan prévoit, durant les deux prochaines années, de promouvoir concrètement l'égalité des sexes à Lyon, en commençant par donner l'exemple parmi les 8 000 agents de la ville, 10 000 en comptant les contractuels.

Permettre aux femmes de travailler

Réalisé à partir d'un audit mené durant six mois en 2011 par le cabinet brestois Perfegal, un cabinet spécialisé dans le conseil et la formation en matière d'égalité professionnelle et de lutte contre les discriminations, "une centaine d'agents ont été interrogés parmi tous les services", précise Thérèse Rabatel. Cette étude a permis de faire remonter plusieurs pistes d'actions et en premier lieu, "de mettre en valeur ce qu'on faisait déjà, comme la création de nouvelles places en crèche (+ 450 berceaux créés durant ce mandat)". Une mesure qui sert surtout aux femmes. "70% du temps parental est encore assuré par elles", regrette l'adjointe aux droits des femmes du maire de Lyon.

Par opposition, les pères prennent très peu leur congé paternité (11 jours) à la ville de Lyon , "la moitié ne le prennent pas, ils disent que la déclaration de congé est trop compliquée à remplir", regrette l'élue qui envisage de les y encourager dans le cadre de son plan d'action, en leur offrant "un petit sac-à-dos à chaque nouvelle naissance, avec un bavoir et un fascicule pour les sensibiliser, comme en Norvège".

"Certains élus se félicitent d'emmener leurs enfants à l'école certains jours de la semaine, mais cela n'est tout de même pas la même chose de déposer les enfants à l'école, et d'aller les y chercher et de s'en occuper le soir jusqu'à 20 h", explique l'élue qui voit encore des progrès à faire à la ville de Lyon.

Deux appartements mis à disposition des femmes battues

La Ville prévoit par ailleurs de mettre bientôt à disposition deux appartements pour les femmes victimes de violences conjugales. Pris en charge par le Centre communal d'action social (CCAS), ils pourraient être gérés par l'association FIL, "Femmes Informations Liaisons", afin d'accueillir, en cas d'urgence, les femmes qui décident de quitter le domicile conjugal après avoir reçu des coups, avec ou sans leur progéniture. Thérèse Rabatel va aussi renforcer la formation des agents de la ville de Lyon dont "63% sont des femmes". Ils seront formés à la prise en charge des victimes de violences et en particulier, les policiers municipaux (environ 300 agents) et agents d'accueil de la ville seront encouragés à suivre cette formation pour ceux qui ne l'ont pas déjà fait. En France, une femme meurt, tous les 2,5 jours sous les coups de son conjoint ou de son ex-conjoint. 156 femmes sont ainsi décédées en 2008 dont 7 dans le Rhône.

Féminiser les noms de lieux, la communication et les RH

La crèche Simone de Beauvoir, la médiathèque Marguerite Duras, l'école Lucie Aubrac, la rue Marie-Louise Rochebillard (syndicaliste lyonnaise), autant de lieux créés en 2011 qui portent des noms de femmes célèbres. Mais il reste fort à faire pour renverser la vapeur en matière de noms de rues à Lyon. L'élu le plus dynamique en la matière serait le maire du 8e selon Thérèse Rabatel. "La plupart ne se creusent pas la tête et se plaignent qu'il n'existe pas assez de femmes célèbres", déplore l'adjointe. Elle appelle tous les services de la Ville à faire remonter leurs propositions au maire et au 1er adjoint, Jean-Louis Touraine.

Alors que le Premier ministre a envoyé, il y a quelques jours, une circulaire à toutes les administrations d'Etat leur demandant la disparition progressive des termes "nom de jeune fille", "nom d'épouse" et "mademoiselle" dans les documents administratifs, l'adjointe aux droits des femmes de la ville de Lyon a eu la même idée il y a déjà quelques temps. "Ces termes stigmatisent énormément certaines femmes", regrettent Thérèse Rabatel. Elle souhaite aussi féminiser la communication de la Ville, en interne et en externe. Grâce au service des ressources humaines, contributeur important du plan d'actions, les noms de métiers devraient progressivement se décliner au féminin sur tous les documents administratifs de la Ville. Mais l'adjointe reconnaît quelques résistances, "certaines femmes disent se sentir diminuer quant on féminise leur titre".

"On a certains métiers qui sont trop mono-sexués à la ville", regrette Thérèse Rabatel, "dans la petite enfance, ce sont surtout des femmes qui sont embauchées par la ville". L'élue précise que les agents eux-mêmes sont en demande et qu'ils aimeraient voir plus de mixité "y compris dans les méthodes de travail". La Ville de Lyon compte à ce jour une électricienne et les femmes commencent à faire leur apparition au service des espaces vert. Mais les hommes sont encore beaucoup trop rares dans les crèches. Au service culturel de la Ville de Lyon également, les jurys sont souvent exclusivement masculins.

Laisser de la place aux filles dans les cours d'école

Enfin, cette mesure originale développée par les agents du service des travaux en partenariat avec l'association Robin des Villes qui vise à laisser plus d'espace dans les cours d'école aux filles. Le collectif est intervenu dans dix écoles primaires de Lyon. Pour chaque classe, une dizaine de séances se sont déroulées pour animer la concertation autour du réaménagement des cours d''école. L'enjeu était d'associer les enfants à la rénovation de leur espace de récréation. Certains ont demandé de compartimenter l'espace, avec une partie dédiée aux garçons notamment pour les parties de foot. A la ville, on promet d'être vigilant sur ce partage des espaces. Idem aux Mercredi de Lyon (activités périscolaires du mercredi) et à Divertisports (les centres de loisirs), où l'on propose aujourd'hui des activités plus variées et pas uniquement des jeux de ballons "qui plaisent surtout aux garçons" raconte Thérèse Rabatel.

Un plan d'action qui ne plaît pas à tous les élus. Le 27 février, le groupe Lyon Divers Droite emmené par Denis Broliquier a voté contre (4 élus sur 73), sauf Nicole Chevassus-Masia qui s'est abstenue. Le maire du 2e arrondissement a expliqué que certaines actions "excessives" desservaient selon lui "la cause qu'elles prétendaient défendre". "Dans les cours d'école, a-t-il développé, il a était prouvé que les filles jouent en général à la marelle et les garçons au foot. L'activité des seconds prend plus de place que celle des premières. Or, la Ville veut engager un plan d'actions pour réserver des espaces de même taille aux filles et aux garçons. C'est ridicule. On sait bien que jouer au ballon prend plus de place que de jouer à la marelle ! ". Idem pour le public des théâtres, "on s'aperçoit qu'il est plus masculin que féminin, alors il faudrait tout faire pour faire venir les femmes au théâtre, mais elles ont bien le droit de préférer le cinéma !", argumente l'élu.

Jeanne d'Anglejean du groupe Ensemble pour Lyon (UMP et Apparentés) a voté contre ce plan et Ines de Lavernée s'est abstenue. La majorité a promis un premier bilan dans deux ans.

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