“Les rats sont des espèces qui adaptent très facilement leur population à la disponibilité alimentaire, et pas au sale”, atteste Pierre Athanaze, naturaliste forestier, en plus de sa vice-présidence (EÉLV) à la Métropole de Lyon en charge de l’environnement et de la protection animale. @Pixabay

Les rats s’invitent à la table du conseil municipal de Lyon

En augmentation dans certains quartiers de Lyon, les rats se sont aussi invités au conseil municipal jeudi 19 janvier. Ou plutôt leur contrôle et leur régulation. La Ville de Lyon l’assure, des résultats vont se faire sentir dans les prochaines semaines. 

"Avec 1 million de spécimens, il y a une recrudescence des rats à Lyon", alertait au mois de décembre dans Lyon Capitale Romain Lasseur, biologiste et docteur en toxicologie à Lyon. Soit plus d’un rat par habitant, ce qui ferait de la capitale de la gastronomie l’une des villes les plus infestées de France, avec un ratio supérieur à celui de Paris ou Marseille, où le rapport rat habitant est plutôt de 1,5 et 1,75 selon l’Académie nationale de médecine.

"Nous prenons actuellement en compte l’évolution de la situation avec des résultats qui vont se ressentir dans les semaines et mois à venir"

Mohamed Chihi, adjoint à la Sécurité

À en croire certains témoignages, qui se confirment aisément en se promenant dans les rues de Lyon, les rats sont de plus en plus visibles à Lyon, au point de poser des problèmes de propreté, de salubrité et de santé publique, ces rongeurs transportant de graves maladies comme la leptospirose. Jeudi 19 janvier, ces rats des villes se sont même invités à la table du conseil municipal de Lyon, non pas physiquement, mais dans les débats des élus lyonnais. 

Place de Milan, à Lyon, les rats pullulent
Place de Milan dans le 3e arrondissement, les terre-pleins sont lardés de trous, autant d’entrées de terriers qui mènent à des galeries souterraines, et les petits buissons sont cafis de rats de toutes tailles. @Antoine Merlet

Lire aussi : Enquête - Pourquoi les rats prolifèrent-ils à Lyon ?

Un double discours

Un voeu du groupe Droite centre et indépendant demandant à la Métropole de Lyon de présenter sa stratégie en matière de régulation a donné lieu à des échanges nourris. Des échanges nourris d’incompréhension dans les rangs de l’opposition, l’exécutif écologiste refusant d’adopter ce voeu, estimant que l’action menée de concert avec la Métropole est déjà suffisamment proportionnée. "Vous nous demandez de porter un voeu pour demander à la Métropole un effort supplémentaire, mais dans notre organisation actuelle cet effort supplémentaire ne semble pas pertinent. Nous prenons actuellement en compte l’évolution de la situation avec des résultats qui vont se ressentir dans les semaines et mois à venir", assure Mohamed Chihi, l’adjoint à la sécurité en charge du sujet des rats, ou plutôt animaux liminaires comme l’élu préfère les présenter.

Des propos bien éloignés de la réponse qu'avait dénié nous donner le service presse de Ville de Lyon au mois décembre, lorsque nous l'avions interrogé sur la prolifération des rats : “Il n’y a aucune prolifération des rats.” À l'époque, même son de cloche dans l'entourage du maire Grégory Doucet. Et alors que Gautier Chapuis, l’élu en charge de la biodiversité et de la condition animale, nous avait donné son aval pour échanger sur le sujet, il avait finalement renoncé. Dont acte.

Les statistiques des rats à Lyon. (Crédit Lyon Capitale)

Prévention, sensibilisation, éradication

Cela étant dit, Mohamed Chihi a quelque peu explicité la situation et l'action de la mairie lors du conseil. Concrètement, la Ville de Lyon et la Métropole en s’appuyant sur un triptyque "prévention, sensibilisation et actions ciblées". À en croire Mohamed Chihi, soutenu sur ce point par Jean-Yves Séchresse, l’ancien adjoint de Gérard Collomb en charge de la Sécurité et aujourd’hui dans l’opposition qui connaît bien le sujet, "la principale cause du phénomène de prolifération des rats et bien la présence de nourriture disponible". Et c’est bien là le problème. De plus en plus présente dans les rues de Lyon avec le développement des ventes à emporter pendant et depuis la crise du Covid, la nourriture au sol offre aujourd’hui un véritable banquet aux petits, ou grassouillets, surmulots lyonnais. 

"La prévention c’est pour prévenir une situation, là il faut être dans le curatif. Les raticides, même si ça détruit en partie les écosystèmes, sont extrêmement importants"

Françoise Blanc, élue du groupe Droite centre et indépendant

L’adjoint à la sécurité insiste donc sur le travail de prévention effectué auprès des bailleurs, mais de manière plus générale des copropriétés et de tous les utilisateurs de l’espace public. De quoi faire bondir l’élu de droite Françoise Blanc. "Ces rats s’appellent des nuisibles. Il y en à peu près 5 à 6 portées par an, soit une soixantaine d’enfants pour une mère porteuse. Alors quand vous parlez de prévention je pense que la notion est dépassée. La prévention c’est pour prévenir une situation, là il faut être dans le curatif", martèle l’élue du 6e arrondissement. Avant d’appuyer son propos en se servant de son propre vécu. "Ces rats pullulent même dans notre 6e arrondissement. J’en ai vu à 10 mètres de chez moi", confiait l’élue, essuyant dans la foulée les rires de l'hémicycle, moqueurs pour certains et outrés pour d'autres. Sous entendu, si même dans le 6e arrondissement les rats pullulent, c’est que la situation est grave…

Voir aussi : "Avec 1 million de specimens, il y a une recrudescence des rats à Lyon" (Romain Lasseur)

"Trouver un juste équilibre naturel"

De quoi agacer Mohamed Chihi, obligé une fois de plus en quelques minutes de rappeler que la Ville agit pour limiter la population des rats. "Nous ne disons pas qu’il n’y a pas d’augmentation de rats ici ou là, mais quand nous le constatons nous faisons reculer la prolifération de ces individus. Il ne faut pas réduire notre action à de la prévention, nous menons aussi des actions ciblées d’éradication lorsqu’il y a prolifération", insistait alors l’adjoint à la Sécurité avant que Françoise Blanc ne lui proposer d’utiliser des "raticides, même si ça détruit en partie les écosystèmes, sont extrêmement importants de par cette pullulation et la progression massive des rats".

"L’éradication drastique n’est pas une solution, elle ne dure pas dans le temps, elle ne traite pas le problème à la source"

Mohamed Chihi, adjoint à la Sécurité

Une solution chimique à laquelle les écologistes sont peu favorables, tout comme à l’idée d’éradiquer toute la population de rats. "Notre démarche n’est pas non plus d’éradiquer la vie non humaine, mais de trouver un juste équilibre naturel”, nous expliquait il y a quelques semaines Yasmine Bouagga, la maire du 1er arrondissement. D’autant, que selon Mohamed Chihi, cette méthode "drastique, que d’autres collectivités peuvent appliquer, n’est pas une solution, elle ne dure pas dans le temps, elle ne traite pas le problème à la source". 

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