Montage Wauquiez Bonnell NE PAS REUTILISER
© Tim Douet

Laurent Wauquiez, une gueule à être dénoncé ?

Ce qu’il est convenu d’appeler le “Wauquiezgate” n’en finit plus de faire des vagues. Ce matin, sur l’antenne de Sud Radio, Matthieu Orphelin, député LREM du Maine-et-Loire, est allé jusqu’à demander la démission du président du parti Les Républicains.

Je ne me prononcerai pas sur la teneur des propos de Laurent Wauquiez et n’irai certes pas hurler avec la meute enragée. Je constate pourtant que le président du conseil d’administration de l’École de management et de commerce (EM Lyon) n’est autre que Bruno Bonnell, député LREM et proche d’Emmanuel Macron, qui tacle aujourd’hui Laurent Wauquiez sur “le non-respect des règles déontologiques”, assurant que son cours n’était que “discussions de café du commerce”, donnant “une image extrêmement dégradée du monde politique avec des petites histoires, des coups bas, et en fait l’opposé de ce que les jeunes leaders de demain aimeraient voir dans la politique”.

Pourquoi pas, c’est son avis et il a le droit de l’exprimer. Mais, où l’on se pince vraiment, c’est lorsque le président de l’EM Lyon assure, la main sur le cœur et le menton haut : “J’ai aussi un très gros regret : quand on forme des futurs managers à la responsabilité et à la confidentialité des informations, ils doivent la respecter, même dans une enceinte privée. S’ils sont demain dans un conseil d’administration avec des décisions difficiles à prendre du type plans sociaux, ils seront obligés de respecter la confidentialité. Sinon, ça s’appelle un délit d’initié ou d’entrave.”

Le véritable scandale est bien que Bruno Bonnell s’exonère lui-même de toute responsabilité et rejette – sans le moindre début de preuve – tout sur les étudiants de l’école qu’il préside, comme sur le chargé de cours Laurent Wauquiez ! Pas un mot sur la confusion des genres qu’il entretient avec une habileté certaine : celle d’un chef d’entreprise ayant fait faillite en 2013, reconverti député quatre ans plus tard et qui préside une école prestigieuse, en déclarant, en l’espèce et en même temps, que “l’apolitisme est une règle absolue”.

Ce qui est grave, dans cette histoire, c’est bien entendu l’enregistrement à l’insu de la personne qui s’exprime, dans une enceinte privée, mais aussi la diffusion de ses propos dans une émission télévisée, à une heure de grande écoute, spécialiste du “buzz”.

Big Brother is trolling you

Peu importe, encore une fois, le fond des propos de Laurent Wauquiez – après tout il n’a pas appelé à la guerre civile –, jamais ils n’auraient dû franchir les murs de l’école. Car, avec ce raisonnement vicieux et vicié, on peut faire condamner tout individu, le clouer au pilori et ruiner définitivement sa réputation, voire sa vie. C’est la négation de l’intelligence et du fair-play, en un mot comme en cent : c’est dégueulasse.

Je suis d’autant plus à l’aise pour affirmer cela que Sud Radio comme Lyon Capitale ne sauraient être suspectés d’avoir jamais épargné Laurent Wauquiez, dans le cadre de ses activités politiques. Mais nos journalistes l’ont toujours fait en signant leurs enquêtes, étayées de faits concrets, et en proposant à Laurent Wauquiez de s’exprimer ou de réagir en temps et en heure.

La honte de la politique, en 2018, c’est d’avoir recours à de tels procédés pour atteindre ses opposants, et la honte du journalisme c’est de relayer des propos obtenus de la sorte. Tout ce petit monde – Bruno Bonnell en tête – devrait y réfléchir et faire preuve d’un minimum de retenue, sinon d’humilité. Je me permets ainsi de suggérer la lecture d’un texte d’Hubert-Félix Thiéfaine, sobrement intitulé Coupable.

“Je me sens coupable d’imaginer la tête laborieuse de certains de mes voisins, de certains de mes proches, de certaines de mes connaissances, de certains petits vieillards crapuleux, baveux, bavards envieux et dérisoires, appliqués à écrire consciencieusement ce genre de chef-d’œuvre de l’anonymat… Je me sens coupable d’avoir une gueule à être dénoncé…”

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