Humeur - Carton rouge pour le guide Michelin

Lyon est la grande absente du palmarès 2019 du guide Rouge. Incompréhensible.

Une seule étoile. Lyon n'a glané qu'une seule petite étoile cette année dans le guide Michelin. Bravo à La Sommelière du duo Takafumi Kikuchi et Shoko Hasegawa (à propos de laquelle j'écrivais, l'été dernier, qu'il manquait quelques petits ajustements pour que la table du Vieux Lyon ne touche les étoiles, c'est donc fait.)

Lire ici : La Sommelière, 50 nuances de mets.

A part ça ? Rien, nada, niet, que tchi, nib, walou, peau d'balle, peanuts ! Pire, le débonnaire chef de Chasselay, Guy Lassausaie, et sa cuisine délicieusement classique et terroiriste perd une deuxième étoile. Pierre Orsi décroche lui aussi, tout comme Clovis Khoury (Clovis). Une hécatombe. Un massacre. Un jeu de massacre ? A se demander... "Ils ont voulu faire le buzz" pensent le Haut-Savoyard Marc Veyrat et le Chasselois Guy Lassausaie. Forcément, quand on est rétrogradé, on l'a mauvaise. De son côté, le nouveau patron du guide, Gwendal Poullennec, 38 ans, pur produit Michelin, a banni le mot "complaisance" de son vocabulaire. Il a raison.

Mais on finit quand même par se poser la question d'un excès de zèle... Une façon de marquer de son empreinte cette 110e édition de la vieille dame de Clermont-Ferrand, et, au passage, de tacler son prédécesseur franco-américain Michael Ellis, de vingt ans son aîné mais nettement plus fun...?

Cette année, le nouvel homme fort du Michelin annonçait que l'édition 2019 serait encore meilleure que celle de 2018 car, dit-il, beaucoup de jeunes chefs ont pris des risques.

A croire qu'à Lyon, la jeune scène culinaire n'est pas assez rock'n roll à son goût, trop plan-plan. A la limite du pantouflage. Chiant quoi. Insipide et inodore.

Une chose est sûre, le guide Michelin ne fera jamais l’unanimité sur ses choix en matière de gastronomie. Il y aura toujours des comblés, des déçus et des oubliés. Mais on arrive à se demander si les inspecteurs du "Rouge" n'ont pas pris un gros, gros coup de chaud.

Depuis cinq, six ans, de jeunes chefs se sont installés à Lyon et remuent la scène lyonnaise, aujourd’hui en pleine ébullition. Le Wall Street Journal  ne s’y est pas trompé, en écrivant récemment dans un article intitulé “The chefs shaking up Lyon’s food scene” , qu' “une nouvelle génération de jeunes chefs transforme Lyon, bastion de la cuisine française formelle, en une destination de cuisine créative.”

Lyon bouge dans sa culture, dans son architecture, dans sa cuisine. On se régale. De leur propre aveu, les chefs se régalent en ville. Il y a un bouillonnement, une chaleur, une incandescence, une vraie fièvre. La ville est zélée dans ses inspirations extérieures, que les jeunes chefs font de manière éminemment moderne. On sent une formidable énergie.

Le guide Michelin ne reflète en rien l'effervescence culinaire lyonnaise. Le récent rachat de l'insolent, pour ne pas dire, irrévérencieux guide du Fooding, histoire de se donner une caution plus cool et moins poussiéreuse, n'y a rien fait.

Le Michelin se noie, sous couvert de modernisme affiché. Le but d'un guide gastronomique est d'accompagner, de pousser, de botter le cul de la nouvelle génération qui a envie de s'affranchir des vieux canons culinaires.

Le Michelin surnage. Et finit par se noyer et par boire la tasse.

Comme on dit à Lyon, " tâche moyen de ne pas lâcher de bêtises, parce que t'auras beau courir après, t'auras de peine à les rattraper."

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