Jean Lacornerie : la comédie musicale US à la française

Entretien avec le directeur du théâtre de la Croix-Rousse, qui poursuit son exploration de la comédie musicale américaine des années 1950 avec Bells are Ringing, écrit par Betty Comden et Adolph Green, les auteurs de Chantons sous la pluie.

Lyon Capitale : Comment est venue l’idée de votre prochaine création ? Vous vivez dans l’univers des comédies musicales américaines ?

Jean Lacornerie : Ça fait un moment que je défriche ce répertoire. Je suis en contact avec des collectionneurs qui sont passionnés de ce type de spectacles. Je regarde aussi les partitions, les livrets. Ce qui m’intéresse, ce sont les comédies des années 1930, 40, 50... J’ai l’impression que c’était plus inventif. Je passe mon temps à regarder, écouter ce qui s’est fait à cette époque. Je vais aussi à New York régulièrement. C’est quand même pas mal de voir ce qu’ils font là-bas. Même si les Américains paraissent peu soucieux de leur patrimoine. Il y a malgré cela une série de films qui s’appelle Encore, où l’on trouve des choses de grande valeur.
Bells are Ringing a été repris à New York dans les années 2000. Il est considéré comme un classique, notamment grâce au film qui a été tourné par Minnelli. Cette comédie a des résonnances avec la société d’aujourd’hui. Le compositeur est celui qui a écrit Les hommes préfèrent les blondes. Et les librettistes ont écrit Chantons sous la pluie alors qu’ils avaient moins de 30 ans. C’est d’ailleurs cette jeunesse, cette légèreté qui me plaît. Sans que ce soit complètement “youp la boum” ; il y a aussi un voile de mélancolie, une poésie.

Quel est le sujet de cette comédie ?

C’est l’histoire d’une jeune fille qui travaille dans un centre téléphonique chargé de prendre les appels en l’absence des abonnés. Elle noue des relations avec les clients. Elle tombe amoureuse d’un écrivain de théâtre déprimé. Elle construit un réseau d’entraide. C’est quelque chose qui m’avait frappé à New York : comme il n’y a pas d’organisation de solidarité d’État, les gens mettent eux-mêmes en place des systèmes d’entraide. J’ai vu ça dans les années 1990, en pleine épidémie du sida.

Comment se passe le travail de mise en scène ?

Je voulais que la pièce comporte de vrais personnages, qu’elle puisse exister sans la musique. Il y a donc une histoire forte. Et il fallait aussi que la pièce résiste à sa transposition en français. Que le décalage puisse se faire. Ça ne sonnera pas comme un orchestre de fosse à Broadway. Je retrouve des acteurs capables de chanter aussi bien que de jouer. Ils ne sont pas qu’à Paris.

Il y a une attente du public par rapport à ce type de spectacles ?

Oui, je le vois déjà dans les réservations. On croit à tort que les Français n’aiment pas la comédie musicale. Il y a des acteurs en France qui sont formés au chant. Mais il faut qu’ils en aient le goût, on ne les pousse pas dans ce sens. C’est pour ça que ceux qui le font ont des personnalités atypiques, intéressantes.

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Bells are Ringing. Jusqu’au 29 novembre à 20h (sauf sam. 23 à 19h30 et dim. 24 à 15h – relâche le lundi 25), au théâtre de la Croix-Rousse, place Joannès-Ambre, Lyon 4e.

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Cet entretien est paru dans Lyon Capitale n°727 (novembre 2013).

Lire aussi : notre critique du spectacle Bells are ringing.

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