Carte d’identité de Denise Goldstein- CHRD @ Pierre Verrier

Exposition au CHRD de Lyon : Les visages de la guerre

Pour célébrer ses trente ans, le CHRD de Lyon (Centre d’histoire de la Résistance et de la déportation) propose une exposition très émouvante autour de la thématique du visage, conçue à partir d’une plongée dans ses propres collections.

Créé en 1992, le CHRD est, rappelons-le, basé dans l’ancien siège de la Gestapo lyonnaise dont Klaus Barbie (surnommé “le boucher de Lyon”) devint le chef en 1943 et fit torturer et exécuter de nombreux résistants parmi lesquels Jean Moulin.

La particularité du Centre, qui le distingue d’autres musées, vient du fait qu’il est entièrement dédié à retracer la place de Lyon durant la Deuxième Guerre mondiale à travers d’importantes collections constituées de nombreux objets, documents et témoignages.

Des collections qui, à partir des années 2000, se sont enrichies avec une approche nouvelle de cette période, plus sociale, plus anthropologique, racontant des faits mais aussi le quotidien et accordant une place centrale à la représentation des victimes, notamment juives.

Matricule 37.589, Belgique, employé, 1941, par Jean Billon (1913-1995). © Pierre Verrier

Un parcours en huit visages

Conçue autour de huit séquences, l’exposition a comme fil conducteur la thématique du visage, apparue lors du premier confinement au moment où le CHRD menait une réflexion sur ses collections et que le masque était au centre de nos vies.

Le rapprochement est vite fait avec cette série de masques à gaz qui démarre le parcours et que la population était obligée d’acheter durant cette période où la peur des gaz de combat était omniprésente.

Dans une scénographie épurée qui se déroule essentiellement autour de l’objet (les textes étant accessibles sur écrans tactiles) et qui dégage une esthétique de l’émotion profonde, le visiteur est emmené sur les chemins vibrants d’une histoire pétrie d’effroi, de souvenirs et d’humanité.

Ainsi dans le visage du pouvoir, on découvre tous les objets de propagande à l’effigie du maréchal Pétain destinés à asseoir les fondements du régime de Révolution nationale – carré de soie, assiettes, cartes postales, timbres-poste, avec également une affiche portant le discours de 1940, griffée et souillée par des gens révoltés.

Dans le visage retrouvé se révèle le parcours extraordinaire de Marie Besson, disparue puis retrouvée, agent de liaison du réseau Buckmaster à Lyon avec sa robe de déportée qui symbolise l’univers concentrationnaire, et les nombreuses lettres qui lui étaient adressées par d’anciennes compagnes de prison.

Le visage clandestin est un des espaces les plus impressionnants, celui de la fabrique des faux papiers qui démontre l’ingéniosité des résistants prenant plusieurs identités pour déjouer les contrôles des services français ou allemands ou enfin d’aider les juifs à s’enfuir.

Affiche lacérée Aux Français ! Paroles du chef,Lithographie couleur sur papier vélin, 1940 @ PierreVerrier

Percevoir la disparition et l’absence

La pièce centrale où se trouve le visage de l’attente est constituée d’une mosaïque de 54 portraits de prisonniers suspendus par des fils au-dessus d’un miroir qui permet de démultiplier leur présence.

Ils ont été réalisés par le Lyonnais Jean Billon, lui-même prisonnier au stalag VIII C en Silésie, qui fut le plus grand camp de travail avec 1,6 million de prisonniers entre 1940 et 1945.

Ces portraits colorés et réalistes reflètent une humanité perdue malgré tout étrangement vivante. Tout aussi bouleversant, le visage du témoin, avec les photos en noir et blanc argentique d’une grande qualité, réalisées par le Lyonnais Fréderic Bellay, nous laisse deviner avec intensité l’engagement de ces femmes et de ces hommes résistants qui se sont ensuite investis auprès du CHRD pour témoigner en direction du public.

Des témoins dont la disparition questionne la transmission de cette mémoire et le rôle du CHRD qui a fait du témoignage vivant le centre de sa politique de médiation. Dans cette section, le visiteur peut entendre et voir de nombreux témoignages grâce à un montage réalisé à partir de 655 enregistrements effectués depuis 1980.

Puis il y a ces dessins en fin de parcours. Des portraits de personnes âgées et déportées, réalisés par Arthur Goldschmidt dans le ghetto de Terezin en Tchécoslovaquie, auxquelles on a fait miroiter le bien-être et la santé avant de les exécuter. D’autres espaces sont à découvrir, émouvants et concrets, avec ces reconstitutions de vie, ces carnets remplis, ces encres, ces images, ces objets qui donnent à voir la disparition et l’absence…


Visages, portraits des collections du CHRD – Jusqu’au 18 septembre au CHRD, Lyon 7e


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