photo d'un homme en chemise blanche
Cyrille Isaac-Sybille © Tim Douet

Réglementation des perfluorés : un député du Rhône fait repousser le délai

Une proposition de loi pour réglementer les PFAS doit être débattue à l'Assemblée nationale dans les prochains jours. Le député du Rhône Cyrille Isaac-Sibille a fait voter en commission un amendement pour reporter son entrée en vigueur à 2026. Critiqué, il défend son "approche scientifique".

Depuis les révélations successives sur les perfluorés (PFC) ou polyfluoroalkylés (PFAS) dans le sud de Lyon, Cyrille Isaac-Sibille s'est engagé à plusieurs reprises sur le sujet. En septembre 2022, il plaidait ainsi pour la création d'une commission d'enquête afin de mieux connaître les effets de ces substances (dites polluants éternels, pour leur persistance dans l'environnement). Si elle n'a jusqu'ici pas vu le jour, elle pourrait selon lui "être créée très prochainement, dans les prochains jours ou semaines".

Et pour cause, la 12e circonscription du Rhône où il est élu député est directement touchée : on y trouve la commune de Pierre-Bénite, où deux usines fabriquent des PFAS. Pas plus tard que le 1er juin, France 3 a d'ailleurs diffusé un documentaire mettant en évidence des taux de perfluorés très élevés dans le sang d'habitants du secteurs.

Alors que les enquêtes se succèdent depuis deux ans, la question des polluants éternels a désormais investi le débat public et politique. Dernièrement, le groupe de députés Liot (Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires) a soumis une proposition de loi visant à réglementer ces polluants éternels. Elle doit être débattue ces jours-ci à l'Assemblée nationale.

Or, lors de son étude en commission du 31 mai dernier, le député rhodanien a fait voter certains amendements, notamment un visant à repousser la date d'entrée en vigueur de la future loi à 2026 (au lieu de 2024). Une posture perçue comme paradoxale, qui lui a valu des critiques dans les rangs de l'opposition.

Pousser la directive européenne

Le député, lui, se défend de toute contradiction. Plaidant pour un alignement avec la réglementation européenne, il estime plus pertinent d'agir à cette échelle. Au sein de l'UE en effet, cinq pays (Suède, Norvège, Danemark, Pays-Bas et Allemagne) poussent en effet pour une nouvelle réglementation. "Appuyons-nous sur ces pays dont les connaissances sur le sujet sont bien plus avancées que les nôtres, et qui connaissent les familles les plus toxiques", défend Cyrille Isaac-Sibille, appelant à ce que la France, "très en retard sur le sujet", soutienne l'initiative.

Or cette directive n'aboutira pas avant 2026. "Votre attitude est incompréhensible a tâclé le député EELV Nicolas Thierry en commission des lois. Vous ne pourrez pas dire qu’on ne savait pas : les alertes scientifiques sont là et les conséquences effrayantes sur la santé sont connues. On parle d’une pollution systémique et persistante, et vous proposez simplement d’attendre qu’une restriction européenne entre en vigueur ? Ce n’est qu’une façon de gagner du temps !"

Mieux documenter le phénomène

Se défendant de vouloir gagner du temps au profit des industriels, Cyrille Isaac-Sibille assure lui être convaincu qu'une interdiction précipitée et généralisée (étendue à toutes les familles, comme le plaident certains) n'a pas lieu d'être tant que la connaissance scientifique du phénomène n'est pas mieux connue. "Dans le sud de Lyon, je suis convaincu qu'une grande partie de la présence de polluants éternels correspond à des pollutions historiques, liées à des PFAS déjà interdits."

Sur les plus de 4000 PFAS existants, assure-t-il en outre, "on ne sait en doser qu'une vingtaine : à quoi bon interdire quelque chose qu'on ne sait pas contrôler?" Le député appelle plutôt à accélérer les travaux sur "l’imprégnation, sur les seuils, sur la détection, sur les conduites à adopter". "Surtout qu'une interdiction précipitée peut donner lieu à des produits de substitution peut-être pires.".

Sa prudence sur le sujet, perçue par ses opposants comme une façon de freiner le processus, le député rhodanien la revendique au contraire comme une "approche scientifique" qu'il oppose aux "combats dogmatique et hypocrite". "Le pire, c'est d'affoler la population sans donner de solution", estime-t-il.

Sur la question de la dépollution enfin, le député n'a pas non plus voté un amendement de Nicolas Thierry visant à demander une contribution financière aux industriels. Là aussi, Cyrille Isaac-Sibille temporise. "Je suis favorable au principe de pollueur payeur, mais il faut d'abord que l'on sache exactement quelles terres sont polluées par quoi, quelle en est la source, si c'est dépolluable et comment".

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