Procès Preynat : “J’étais loin de tous les agresser, Dieu merci”

Après avoir reconnu des agressions chaque semaine pendant vingt ans mardi, Bernard Preynat est revenu sur ses pulsions et la façon dont il percevait ses agressions sur des enfants dont il avait la responsabilité. Compte rendu d’audience.

Les auditions des parties civiles se poursuivent ce mercredi, au procès Preynat. Questionné par Me Sauvayre, l'avocat d'une des victimes, le prêtre pédophile est revenu sur ce qui motivait ses méfaits. “Ça ne s'explique pas. C'est une pulsion, a-t-il déclaré. Je ne sais pas comment expliquer ça. Il y avait énormément d'enfants. J'étais loin de tous les agresser, Dieu merci.” La salle bruisse à ces mots, qui rappellent fortement le “Dieu merci, les faits sont prescrits” du cardinal Barbarin. L'homme d'Église explique avoir vécu comme une “dichotomie” et un “tourment” le fait “de dire la messe, d’apprendre la liturgie” et de commettre ces agressions.

Bernard Preynat dit avoir plusieurs fois confessé ses faits à des supérieurs. Rien ne s’est passé. “Ils m'exhortaient à ne pas recommencer. Quand je sortais, j'avais la bonne résolution de ne pas recommencer et puis un mois après malheureusement je le refaisais.”

Me Sauvayre insiste pour comprendre le mode opératoire du prêtre. De quelle manière il choisissait ses victimes.

“Vous connaissez votre attirance pour les jeunes garçons. Pourquoi alors accepter des postes avec de jeunes enfants ? C'est une tentation permanente. C'est comme un alcoolique qui va travailler dans une distillerie de whisky. Pourquoi accepter ces tentations-là, sachant que vous avez une impossibilité à vous refréner ?

– J'étais inconscient de ça.

– C'est un peu court.

– Je pensais que plus rien ne se passerait. Je n'organisais pas ce groupe pour avoir des enfants sous mon autorité et pour pouvoir en jouir.

– Vous comprenez que l'on puisse penser le contraire.

– Ce n'est pas ce que j'ai voulu faire.

– Pourtant, le diable tentateur était là.

– Enfin, le diable.

– Ces jours-là, le diable c'était vous.

– Ça s'est déroulé. Je suis sans réponse sur ce que je suis. Pourquoi depuis si jeune je suis attiré par les jeunes garçons. C'est la question qui se pose et que je me pose encore. Malheureusement, durant toute ma vie, je n'ai pas trouvé la voie pour éviter ces agressions. Je n'ai pas été aidé. C'est compliqué de parler en toute confiance quand on est attiré par les petits garçons. Surtout quand on ne se rend pas compte des enjeux. Que l’on pense que caresser une cuisse ce n’est pas une agression.

– Enfin, masturber, vous saviez que c’en était une.

– Oui.

– Votre sacerdoce pendant vingt ans a été une imposture. Vous prêchiez les vertus du Christ et allégrement vous les violiez. Vous pensez que j'ai raison ?

– Oui, je l'ai vécu douloureusement. Ça a été tout le problème de ma vie. Je ne dirais pas que ma vie a été une imposture. Ça a été un drame. Pour moi, pour mes victimes, pour l'Église et pour la société. J'étais sincère et loyal. Puis je tombais dans les agressions. Le mot imposture ne correspond pas. Quand mes supérieurs l'ont appris au séminaire, je ne l’ai jamais caché. Ils connaissaient ma situation. Au lieu de dire que j'étais malade – j'aurais préféré qu'ils m'aident – ils m'ont envoyé dans un autre séminaire. J'aurais compris qu'ils me renvoient, qu'ils parlent à mes parents. Mais je ne dis pas que le coupable c'est l'Église pour me disculper. Je reproche seulement qu'on ne m'ait pas aidé au moment où ça pouvait être efficace.”

Hier, l’ancien prêtre a reconnu des agressions tous les week-ends pendant vingt ans. “Parfois, il n'y avait rien. Parfois, le samedi après-midi, il pouvait y en avoir un ou deux [enfants]. Parfois, pendant un camp d'une semaine, il pouvait y avoir cinq enfants”, avait-il lâché à la barre. Un examen de personnalité du prêtre aura lieu cet après-midi.

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