Affaire Barbarin : “si on veut sa peau, on va finir par l’avoir”

Au lendemain des révélations du Parisien quant à la promotion au poste de doyen d’un prêtre du diocèse de Lyon condamné pour agressions sexuelles quand il officiait à Rodez, parties prenantes du dossier et observateurs appellent à ne pas confondre cette affaire avec celle du père Preynat, bien qu’elle soulève la même question de la gestion des affaires de mœurs au sein de l’Église.

"L'affaire de trop" pour Le Parisien, qui place encore un peu plus "le cardinal dans la tourmente", selon la une du Progrès du jour. Cette fois-ci, il ne s'agit pas de pédophilie... les victimes étaient majeures. Mais un prêtre condamné pour agressions sexuelles en 2007 dans le diocèse de Rodez, et ensuite muté sur celui de Lyon, a bien été promu doyen de plusieurs paroisses en 2013 par le cardinal Barbarin, comme le révélait ce mercredi le journal francilien.

“On est en train de changer de débat”

Pour Alexandre Dussot, cofondateur de l'association La Parole Libérée, invité à s'exprimé sur BFM TV, il s'agit de faits "bien différents du cas Preynat, [...] affaire de pédophilie avec un pédophile multirécidiviste pendant trente ans où il y a des dizaines et des dizaines d'enfants victimes de violences sexuelles". "On est en train de changer de débat", prévient-il.

En effet, les révélations mettent en cause un prélat du Sud-Ouest lyonnais qui avait été reconnu coupable par le tribunal correctionnel de Rodez d'agressions sexuelles, notamment de caresses déplacées, sur des étudiants séminaristes, âgés de 20 à 32 ans, dans un foyer dont il était responsable de 2004 à 2005. La cour d'appel de Montpellier l'avait condamné à une peine de dix-huit mois de prison avec sursis, assortie d'une mise à l'épreuve de trois ans.

L'homme avait ensuite "été en paroisse à Rodez, sous la vigilance des prêtres, et n'était pas en contact avec des jeunes. Son ministère était réduit mais il a continué de célébrer. Notre diocèse l'a accompagné progressivement vers une prise de conscience, il a été suivi par un psychologue", a précisé Bernard Quintard, vicaire général du diocèse de Rodez, dans les colonnes du Parisien.

Soins et mutation

La hiérarchie diocésaine a voulu éloigner le prêtre de l'Aveyron, comme l'explique le vicaire pour France Info. "L'évêque de l'époque a pris contact avec le diocèse de Lyon, avec Barbarin qui était déjà évêque, et il est parti à Lyon en 2008, précise le vicaire. Il s'est fait soigner, il s'est fait suivre. Il est resté là-bas sous vigilance de l'Eglise en ce sens où il n'avait pas de responsabilités avec les jeunes."

"Comme souvent, pour protéger les victimes, ce prêtre a été accueilli dans un autre diocèse, à Lyon, où il a continué à suivre les recommandations du juge", a ajouté pour La Croix Mgr Olivier Ribadeau-Dumas, secrétaire général de la Conférence des évêques de France, depuis Lourdes.

“Si on veut sa peau on va finir par l’avoir”

Alors que le cardinal Barbarin a de nouveau été mis personnellement en cause dans les médias, son entourage est monté au créneau dans Le Figaro : "Le diocèse regrette que les efforts de réhabilitation et le chemin parcouru par ce prêtre soient remis en cause par une exposition médiatique injustifiée, pour des faits pour lesquels il a purgé sa peine et dans la mesure où son ministère est exercé avec prudence."

La justice n'aurait d'ailleurs pas émis d'avis défavorable à la réintégration du prélat, selon Olivier Ribadeau-Dumas : "Il a continué à suivre les recommandations et les décisions du juge d'application des peines. Le diocèse de Lyon a même été au-delà des recommandations du juge, notamment en ce qui concerne le logement de ce prêtre puisqu'il n'a pas été logé en paroisse, mais (...) dans une communauté de religieux pour avoir un encadrement plus sûr."

"Je ne sais pas si c'est le Petit Poucet qui sème des cailloux sur la route du cardinal Barbarin, mais si on veut sa peau on va finir par l'avoir avec ce genre de comportement", a réagi son avocat, Me André Soulier. Interrogée par Le Parisien, Christine Boutin abonde en son sens. "Cet homme est victime d'un acharnement politique et médiatique", a déclaré la présidente du Parti chrétien démocrate, qui en a profité pour dénoncer ce qu'elle perçoit comme un "climat de christianophobie qui s'installe en France".

La secrétaire d'Etat chargée de l'aide aux victimes, Juliette Méadel, a de son côté invité le le cardinal à "tirer de cette situation des conclusions évidentes". Sur l'antenne de Radio Classique, elle déclare : "Plus que n'importe qui, Barbarin devrait être sensible à la nécessité de dire pardon."

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