Andromaque © Simon Gosselin

Théâtre : deux classiques revisités aux Célestins

Jean Racine et Georges Feydeau sont au programme de ce mois de novembre.

En juin dernier, lorsque le patron des Célestins, Pierre-Yves Lenoir, a dévoilé sa nouvelle saison, nous avions constaté que les auteurs classiques y avaient retrouvé une place plus marquée. Il nous l’avait expliqué : Les artistes, après des prises de parole très frontales sur des sujets sociétaux, géopolitiques, éprouvent sans doute le besoin de revenir aux classiques, pour les réinterroger. Dans notre teaser de saison, on parle de rejouer les classiques. Il s’agit bien de les remettre en jeu sur un plateau. C’est aussi une façon d’aborder les grandes questions humaines, philosophiques, métaphysiques.”

En ce mois de novembre, hasard de la programmation, on trouvera au théâtre sang et or deux de nos plus importants metteurs en scène hexagonaux, Stéphane Braunschweig et Stanislas Nordey, qui ont chacun consacré leur dernière création à un dramaturge classique (Jean Racine pour le premier, Georges Feydeau pour le second).

Une Andromaque ensanglantée

Dans sa version d’Andromaque à l’affiche des Célestins, Stéphane Braunschweig montre combien le rôle-titre (interprété par l’excellente Bénédicte Cerutti) est une héroïne féministe, c’est dans l’air du temps. Et ce n’est pas faire mentir l’œuvre, composée en alexandrins par Jean Racine. Mais il met surtout en avant le poids des guerres (la pièce se situe un an après la guerre de Troie), la façon dont cela influence la psychologie des personnages par les blessures profondes qu’elles y ont creusées. Aujourd’hui, on parle de stress post-traumatique, et c’est bien de cela qu’il s’agit. Ce syndrome qui peut engendrer un désir irrépressible de vengeance, de violence, de viol. Pour sa troisième mise en scène d’une œuvre de Racine, après Britannicus et Iphigénie, le patron du théâtre de l’Odéon a choisi une scénographie terrible et belle. C’est devant une vaste étendue de sang, dans laquelle ils ne manqueront pas de se jeter, que les huit personnages se débattent, englués dans une histoire qui les dépasse. Qui s’appuie sur le fameux triangle amoureux au cœur de la pièce, Oreste aime Hermione qui aime Pyrrhus qui aime Andromaque, dont l’équation, depuis que Racine l’a imaginée en 1667, semble toujours aussi impossible à résoudre.

L’Hôtel du Libre-Échange © Jean-Louis Fernandez

L’Hôtel du Libre-Échange

Même s’il a surtout mis en scène des textes contemporains, Stanislas Nordey est en terrain connu avec Georges Feydeau. L’ex-directeur du Théâtre national de Strasbourg (qu’il a dirigé de 2014 à 2023) avait obtenu l’un de ses plus beaux succès avec sa version de La Puce à l’oreille, créée en 2004. Il retrouve d’ailleurs une partie de la troupe de La Puce à l’oreille(dont Olivier Mellano, guitariste de Dominique A et Miossec, qui signe la composition musicale) pour cette nouvelle incursion dans l’œuvre de Feydeau, L’Hôtel du Libre-Échange. Une comédie moins connue aujourd’hui, bien qu’elle ait fait un triomphe lors de sa création en 1884. Mais où l’on retrouve tous les ingrédients qui font la vis comica de Feydeau. Des quiproquos en cascade, une construction aussi délirante que maîtrisée, des gags désopilants et surtout un sens du rythme époustouflant. Avec, bien entendu, au cœur de ce maelstrom, une histoire d’adultère, de sexualité incontrôlable qui met aux prises deux couples d’amis qui entendent bien se cocufier mutuellement dans le discret hôtel du Libre-Échange.

Andromaque – Du 13 au 23 novembre ; L’Hôtel du Libre-Échange–Du 27 novembre au 5 décembre aux Célestins

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