Lyon : un site met en lumière l'affaire du prêtre accusé de pédophilie

Les faits datent de près de 25 ans. Pourtant, la lumière n'a pas encore été faite sur la gestion des accusations de pédophilie survenues au sein d'un camp de scouts au foulard vert du groupe Saint-Luc, issu de la paroisse de Sainte-Foy-lès-Lyon. Aujourd'hui, l'association "La Parole Libérée" entend briser les tabous.

Libérer la parole, c'est le but de l'association créée le 17 décembre dernier par les victimes d'agressions sexuelles d'un prêtre entre 1970 et 1991. Abusés entre 9 et 11 ans et aujourd'hui adultes, il n'est jamais trop tard pour constater que si la pédophilie reste taboue, elle restera également difficile à combattre.

Sur leur site Internet, l'association diffuse de nombreux témoignages de victimes, ainsi que plusieurs correspondances à télécharger, entre certains parents avec le diocèse de Lyon, ou même avec le prêtre en question. L'un des documents est d'ailleurs une lettre d'aveux du prêtre, qui aurait écrit aux parents n'avoir jamais nié ce qui lui était reproché.

A l'époque, l'affaire se gère en interne, afin d'éviter tout scandale public. Plusieurs parents de victimes contactent le diocèse de Lyon pour dénoncer les pratiques douteuses qui ont lieues dans les camps de scouts du groupe Saint-Luc. Monseigneur Decourtray prend le dossier en main, le prêtre sera demis de ses missions. Pourtant, quelques mois plus tard, Monseigneur Decourtray - décédé en 1994 - lui confie une nouvelle charge pastorale. Il sera définitivement écarté de ses fonctions le 1er septembre dernier seulement, soit près d'un an après que le cardinal Barbarin ait été mis au courant. Un mois plus tard, c'est le diocèse de Lyon qui décide d'évoquer publiquement l'affaire dans un communiqué.

Enquête judiciaire et procès canonique

Depuis le mois de juillet dernier, une enquête préliminaire de la Brigade de la protection des familles a été ouverte. Reste à savoir si les faits reprochés au prêtre – présumé innocent puisqu'il n'aurait pas encore été entendu par la police – seront prescrit. Pour François Devaux, président de l'association " La Parole libérée" : "seul un juge décidera si les faits sont prescrits ou non. L'affaire devrait passer au parquet la semaine prochaine. Mais ce qui a été dit de manière officielle par le diocèse de Lyon soulève bien des questions. La gravité du sujet que l'on traite a-t-elle été prise en compte ? Le 18 mai 2015, le cardinal Barbarin nous a dit avoir pris la décision de retirer un homme considéré à risque pédophile de ses fonctions. Pourtant, le prêtre aurait continué d'officier jusqu'à l'été dernier. Si le diocèse veut jouer la carte de la transparence, nous aimerions bien savoir quelles mesures de sécurité ont été prises pour qu'entre le mois de mai et le mois d'août, le prêtre ne soit pas en contact avec des enfants."

Mardi, le diocèse s'est exprimé par un communiqué : "L'Eglise a changé". Il précise qu'aucune plainte n'a été déposée contre le prêtre en question depuis 1991. Le cardinal Barbarin déclare se tenir à disposition des victimes pour les recevoir et envisage la tenue d'un procès canonique à l'issue de la procédure civile. Une action louable mais un peu tardive pour François Devaux : "le procès canonique en soi, je trouve que c'est une bonne chose, je trouve ça juste dommage qu'il arrive si tard. Il y a eu plusieurs avertissements en 1980 et en 1991. Au sein de notre association, il faut voir le témoignage de Laurent. Il affirme avoir, à l'initiative de Régine Maire, membre du diocèse chargée aujourd'hui du dossier, eu un rendez-vous pour parler de ce qu'il a subit en 2011 avec le Monseigneur Brac de la Perrière. Ce qui est quand même surprenant, c'est que Régine Maire et le cardinal Barbarin affirment n'être au courant que depuis 2014. En tant que président de l'association, je suis là pour révéler tout ce qui pourrait être de nature à l'être, que ce soit dans le cadre de la justice civile, de l'association ou d'un procès canonique. J'essaye simplement de faire le lien entre la volonté ferme et courageuse d'un pape et celle des fidèles. Car je ne peux pas croire qu'il y ait un fidèle qui puisse justifier de tels agissements et de tels manquements dans le cadre de l’Église." L'affaire, toujours aussi douloureuse, est donc aujourd'hui entre les mains de la justice, après vingt ans de silence.

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