Fabienne Lévy : "l'UMP va pouvoir continuer à se droitiser"

INTERVIEW - La secrétaire nationale du Parti radical valoisien et vice-présidente de la fédération du Rhône du parti de Jean-Louis Borloo, revient sur le divorce de son parti avec l'UMP, jeudi 7 avril. A Lyon, elle envisage de s'affranchir de l'UMP, notamment au Grand-Lyon, mais soutient toujours le candidat UMP pour les municipales de 2014.

- Lyon capitale : Le président du Parti radical valoisien*, Jean-Louis Borloo, a annoncé jeudi 7 avril, le divorce de votre parti avec l'UMP. Pourquoi s'est il affranchi de la majorité présidentielle ?

- Fabienne Lévy : Il y a des moments dans la vie où quand on ne s'entend plus, on est obligé de divorcer. On était marié à l'UMP en tant que "parti politique associé", donc c'était plus facile pour nous de partir.
Les dernières élections (cantonales, NDLR) ont bien montré le désintérêt des électeurs pour la politique de Nicolas Sarkozy, elles sont même apparues comme une sanction de la politique du chef de l'Etat. Ce qui nous conforte dans l'idée que nous avons un truc énorme à jouer.

Il est vrai que les électeurs ont besoin des idées du centre aujourd'hui, du pragmatisme responsable qu'a montré Jean-Louis Borloo au gouvernement. Jusqu'en 2007, il a été à la cohésion sociale, il a rénové le quartier de La Duchère, par exemple, à Lyon. Avec l'ANRU, il a modifié le paysage social. Ensuite, il a fait de l'écologie. Le Grenelle de l'environnement ne se serait pas fait sans lui. Il menait cette politique, mais il le faisait au milieu des questions identitaires. Toute cette politique est un peu abandonnée aujourd'hui.

Jean-Louis Borloo est donc déçu, il veut autre chose. A gauche l'offre est multiple. A droite, il faut qu'elle le soit aussi. On est bien obligé d'avoir deux jambes à son corps. Nous sommes prêts à jouer le rôle de la deuxième jambe. Donc c'est pour ça qu'on lance cette idée d'alliance républicaine, écologiste et sociale.

Mais attention, nous ne sommes pas dans le ni-ni de François Bayrou. Je crois que c'est très clair. Jean-Louis Borloo aidera le candidat de droite qui sera au deuxième de la Présidentielle, sauf évidemment, s'il appartient au FN.

- Ce divorce du parti radical avec l'UMP va-t-il avoir des conséquences à Lyon ? Des divorces de certains membres de votre parti avec ceux de la majorité présidentielle sont-ils à envisager dans les assemblées locales ?

- Des divorces, il y en aura forcément. A la Région Rhône-Alpes d'abord où je suis élue, le groupe est composé de radicaux et de nouveaux-centre, nous ne nous sommes pas encore réunis pour savoir ce que nous allions faire.

Ce que je peux dire en revanche, c'est que dès l'année dernière, nous avons demandé à être vice-présidents pour avoir des temps de parole différents du groupe de Françoise Grossetête (UMP). D'ailleurs, à la Région, le groupe ne s'appelle pas UMP, mais UDC : "Union de la droite et du centre". Tant qu'on a notre liberté de parole et de vote, cette alliance à la région devrait se poursuivre.

Maintenant, il y aura surement des problèmes au moment de la Présidentielle, lorsque les écuries se mettront en marche. On pourrait se poser la question de quitter le groupe si jamais il y avait un problème avec le FN ou avec notre liberté de parole, mais je ne le pense pas. Franck Reynier, en revanche, le président de la fédération Rhône-Alpes du parti radical et maire de Montélimar, député UMP-radical, est prêt à quitter l'UMP à l'Assemblée nationale, il le fera certainement en mars prochain. Nous verrons bien.

- Au Grand-Lyon, allez-vous vous affranchir de l'UMP ?

- Nous avons quatre élus à la communauté urbaine, membres d'un groupe à forte majorité UMP. Et à côté, il y a plusieurs groupes centristes. Peut-être que le divorce se justifiera. Mais cela se fera forcement en accord avec les uns et les autres. On a déjà eu des demandes des maires centristes en ce sens.

- Et à Lyon ? Patrice Huguet, conseiller municipal radical, a indiqué vendredi 9 avril, qu'il continuerait à faire partie du groupe "Ensemble pour Lyon" qui défend la candidature UMP de Michel Havard pour les prochaines élections municipales de 2014. Cela ne vous pose-t-il pas un problème sur le fond ?

- Nous en avons parlé, il n'est pas question de jouer des scissions inopportunes, je reste avec Michel Havard. Imaginons qu'un candidat centriste se présente contre lui en 2014, alors je réviserais peut être ma copie. Mais aujourd'hui ce n'est pas le cas, nous sommes à fond derrière lui. Il entretient d'ailleurs de très bons rapports avec Jean-Louis Borloo. Il n'y a aucune raison d'être bête …

- Mais que vont penser les électeurs d'un parti qui défend une stratégie au niveau national et une autre au niveau local ?

- Michel Havard est député UMP, mais à Lyon, le groupe d'opposition qu'il a créé au conseil municipal s'appelle "Ensemble pour Lyon" donc, il n'y a pas d'antagonisme, pas de fracture entre le national et le local. Moi je suis profondément ancrée dans l'idée que le parti radical est différent de l'UMP, et au contraire, on apporte de la valeur ajoutée à la liste de Michel Havard.

Sa liste ne sera pas mono-colore, il y aura des gens de l'UMP, des radicaux, des centristes, des gens de la société civile. Rappelons-nous Gérard Collomb, cela ne l'a pas empêché de faire appelle à des gens du MoDem. Anne-Sophie Condemine, que je sache, a été élue sur les listes d'Anne-Marie Comparini (UDF) à la région. S'il avait pu en rameuter d'autres, il l'aurait fait. Vous voyez bien les appels du pied qu'il a fait aux radicaux lors de l'élection du président du conseil général.....

Non, je crois qu'il ne faut pas confondre deux choses : l'adhésion à un parti politique et la co-construction d'un projet municipal qui, au contraire, s'enrichit de toutes nos différences. C'est formidable ! On est différents et on est indépendants.

Mais pour travailler à l'intérieur des collectivités, c'est un peu différent, on n'est pas obligé de se mettre en groupe politique, on peut travailler tous ensemble. Surtout quand il n'y a pas assez pour faire un groupe. Patrick Huguet, ne va pas faire un groupe à lui tout seul. L'enjeu d'une collectivité c'est un enjeu global. Michel Havard a besoin des autres pour gagner. Il ne peut pas gagner tout seul dans son coin.

- Finalement vous êtes encore très liée à l'UMP à qui vous devez beaucoup, vous n'avez pas peur que certains électeurs interprètent ce divorce comme une simple stratégie visant à rapporter des voix à Nicolas Sarkozy en 2012 ? S'éloigner au premier tour, pour mieux se rapprocher au deuxième … Jean Louis Borloo a-t-il l'intention d'imposer ses vues au prochain président de la république ?

Il n'a l'intention d'imposer rien du tout. On est train de faire notre projet. Après, il y a des gens qui vont voter pour ce projet. Si notre score est important, nous serons entendus. S'il est plus important , alors c'est nous qui serons aidés par l'UMP. La majorité présidentielle, on lui doit beaucoup, mais elle nous doit beaucoup aussi. Sarko sans Borloo, il n'y avait pas de Grenelle de l'environnement, pas de cohésion sociale. A Lyon, si Perben n'avait pas appelé une partie des radicaux -pas assez à mon goût-, il aurait peut-être perdu un peu plus encore .... La France est diverse, dans ses couleurs, dans ses religions, elle doit être diverse aussi dans ses partis politiques. Cela à sans doute été formidable d'être associé à l'UMP, mais toutes les bonnes choses ont une fin. Nous reprenons notre liberté.

- Qu'en sera-t-il lors des législatives en 2012, certains de vous pourraient-ils être candidats à la députation hors de l'UMP ?

Nous proposerons aussi des candidats, face à l'UMP, aux législatives. Pour qu'au premier tour, il y ait un vrai choix. Et au deuxième, nous nous rassemblerons. Ainsi, nous rendons service à l'UMP. Comme cela, ils vont pouvoir continuer à se droitiser....

(*) Dans le Rhône, le parti radical de droite, dit valoisien, compte environ 400 adhérents et 30 élus.

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