Lyon 1 – Campus de la Doua © Université de Lyon
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Manque de logements étudiants : "Lyon est complet"

Chaque année, la période de la rentrée est un parcours du combattant pour l'obtention d'un logement étudiant. À Lyon, beaucoup commencent les cours sans avoir trouvé où se loger.

"J’enchaîne les allers-retours depuis Albertville pour des visites sans succès depuis plusieurs semaines", raconte Léa, excédée. Cette étudiante de l’INSEEC entame sa rentrée dans cinq jours. Elle cherche un petit studio dans la ville de Lyon, mais c’est devenu très difficile à obtenir : "Les propriétaires demandent des garanties impossibles et des loyers exorbitants pour des appartements pas toujours décents ", raconte-t-elle, choquée par les pratiques de ces professionnels. "Pourtant, j’ai un garant, mais il ne touche “que” 2000 euros. J’ai une bourse et l’APL (Aide personnalisée au logement) qui couvrent largement le loyer. À croire que ce n’est pas suffisant.

La période fin août, début septembre est délicate pour la recherche de logements étudiants. Cette rentrée 2019 ne fait pas exception. Lyon est une des villes françaises les plus attractives pour les étudiants. En 2019, la ville en accueillait 160 000, et d’après les pronostics dévoilés par la Métropole de Lyon et l’Université de Lyon, leur nombre augmenterait jusqu’à 195 000 en 2030. Pourtant, en cette rentrée 2019, la ville peine déjà à loger ces jeunes.

Des agences et propriétaires difficiles

Valentin, étudiant en master Intervention et développement social, s’est confronté au même problème. Il est en quête d’un studio depuis début juillet. Il ne travaillait pas et passait ses journées à chercher un appartement : "J’étais plutôt réactif. J’appelais les particuliers et les agences dès que l’annonce était postée. Mais une fois que je faisais la visite, mon dossier se retrouvait perdu dans une pile", raconte-t-il, désabusé. Dès lors, c’est la concurrence et le jeu de “Qui a le meilleur dossier?”. Malgré sa rapidité, le sien est toujours passé à la trappe. Pourtant, il est étudiant, il travaille à temps partiel et son garant gagne six fois le montant du loyer. Mais ce n’est toujours pas assez pour les agences : "Il y a tellement de demandes que les propriétaires et les agences se laissent le privilège de choisir la personne avec la meilleure situation. Je comprends qu’ils aient des exigences, mais là…", relate-t-il, à cran. À plusieurs reprises, on dit au jeune homme qu’il a toutes ses chances. On lui demande de patienter. Une semaine. Puis deux. Puis trois. Le doute s’installe et la réponse tombe, négative. "C’est irresponsable. Ils profitent de la précarité et de l’urgence de nos situations. On se retrouve à courir après les réponses et ça crée un stress supplémentaire, dans une situation qui n’est déjà pas facile", confie-t-il, complètement désarçonné. Ce début septembre, sa situation n’a pas bien avancé : "Je connais pas mal de gens qui ont pu et peuvent m’héberger. Mais je n’imagine même pas pour les autres étudiants qui n’ont pas cette chance". 

"Lyon est complet"

Chloé est une étudiante martiniquaise. Elle ne connaît personne à Lyon et est arrivée en ville le 31 août. Cette étudiante en master digitale a aussi commencé à chercher un logement début juillet, sans grand succès.  "Les 7000 km de distance, le décalage horaire, l'indicatif téléphonique inconnu sont des freins auxquelles j'ai dû me confronter avant même mon arrivée ici", narre-t-elle, découragée. Elle a tout tenté : résidences étudiantes, résidences CROUS, particuliers, colocations… Mais la seule réponse qui semble ressortir selon elle : "Lyon est complet". Elle loge actuellement dans un hôtel lyonnais, mais malgré son arrivée en ville, le problème persiste : "Vu la période, ça n'a rien changé. J'ai eu quelques réponses qui se sont avérées négatives ou des arnaques".

"Sur 13 000 arrivants, seuls 9 000 logements sont proposés"

On pourrait penser que cette situation est inhérente au contexte de la rentrée scolaire, mais ce n’est pas le cas. Elle n’est qu’exacerbée par cette dernière. Selon Patrick Lozano, président de l’Union des syndicats de l’immobilier Rhône-Alpes (UNIS Rhône-Alpes), cette pénurie des logements touche tout le monde et tient à plusieurs paramètres. La première est la pression démographique. "La métropole de Lyon est attractive, notamment en matière d’offre d’emploi. Par conséquent, sur 13 000 habitants qui arrivent chaque année, seulement 8000 à 9000 logements leur sont proposés", relate-t-il. La présence d’un fort public étudiant ne fait qu’amplifier ce déséquilibre, avec une forte demande sur les logements de petites surfaces. 

Le spécialiste de la gestion de biens locatifs et de copropriété remarque aussi que le manque de logement en construction, ainsi que les propriétaires qui se tournent de plus en plus vers le système Airbnb, sont deux autres facteurs aggravants. "Chez UNIS, on évoque ce problème depuis deux ans. C’est d’ailleurs un phénomène que l’on retrouve dans toutes les métropoles, et Lyon ne fait pas exception", note Patrick Lozano. Toutefois, le président reste optimiste : "Le nouveau Plan Local d'Urbanisme et de l'Habitat (PLUH) adopté par le Grand Lyon en mai dernier permettra peut-être d’améliorer la situation". Celui-ci prévoit la production de logements étudiants bien situés par rapport aux transports collectifs, ainsi que l’amélioration de l’inscription des Campus dans la ville et les quartiers avoisinants. "Par contre, il faudra attendre au moins deux ans avant d’en voir les effets", conclut ce dernier. En attendant, les étudiants devront s’armer de patience et d'ingéniosité afin de réussir à se loger dans de bonnes conditions, pour entamer cette nouvelle année scolaire.

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