Après Davy Tissot en 2021, un autre chef Lyonnais étoilé est en lice pour le Bocuse d'Or France, porte d'entrée du concours Europe, puis pour la grande finale mondiale à Lyon, en 2027.
Originaire du Mans, Gaëtan Gentil a forgé son savoir-faire dans de prestigieuses maisons étoilées. Il a notamment travaillé au Cheval Blanc, à Courchevel, aux côtés des chefs Yannick Alléno, triplement étoilé, et Denis Fetisson. Il s’est également essayé aux concours, nourrissant cette ambition dès ses débuts. Après un passage chez Emmanuel Renaut, chef triplement étoilé de Flocons de Sel, à Megève, il a retrouvé Denis Fetisson pour l’ouverture de ses deux restaurants, L'Amandier et La Place de Mougins, où il a occupé le poste de sous-chef.
Son parcours professionnel s’est enrichi lors de son passage au Crillon avec le chef Jean-François Piège, puis lorsqu’il a succédé au chef David Toutain pour prendre les rênes de L'Agapé Substance, à Paris.
En 2015, c’est à Lyon, ville dont est originaire sa compagne Céline Boinon, qu’ils ont décidé d’ouvrir ensemble leur propre restaurant, Prairial affirmant une cuisine responsable et engagée saluée par une étoile au Guide Michelin en 2016, ainsi que par une étoile verte pour sa gastronomie durable.
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En 2023, le couple repousse les frontières de l’expérience et déménage à Confluence dans un lieu entièrement repensé qui leur ressemble. Le restaurant se réinvente avec un espace entièrement ouvert, où les tables gravitent autour de la cuisine, au cœur de la salle. Cette vision innovante fait fusionner cuisine, salle et sommellerie dans une harmonie totale, proposant ainsi une expérience immersive aux convives. Quelques mois après son ouverture, Prairial confirme son étoile au Guide Michelin et son étoile verte.

Lyon Capitale : On vient d'apprendre, avec surprise, votre candidature pour la sélection du Bocuse d'Or, dont l'enjeu est de désigner le futur candidat qui représentera la France à l’Europe, puis lors de la grande finale à Lyon en 2027. Pourquoi vous-êtes vous lancé dans le concours ?
Gaëtan Gentil : Le Bocuse d'Or, c'est un rêve depuis que j'ai 17 ans, c'est-à-dire depuis que j'ai débuté dans le métier, il y a vingt trois ans. J'étais alors en CAP, en 2002 je crois. J'avais participé à un concours qui se tenait à Dardilly sur le thème des truites des fjords de Norvège, qui allait devenir le sujet du Bocuse d'Or un an plus tard. Le concours était présidé par Paul Bocuse, avec les anciens gagnants du Bocuse d'Or et les participants du futur concours. C'était incroyable. Depuis cette époque, je me suis toujours intéressé à ce concours. Depuis cette époque, je rêve de le faire.
Les récents triomphes français au Bocuse d'Or monde, en 2021 du Lyonnais Davy Tissot et en 2025 Paul Marcon c'est le déclencheur, la petite étincelle en plus ?
Ça conforte effectivement...
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Avez-vous aussi l'envie de prouver quelque chose, à vous ou aux autres ?
À moi-même ? Non, pas forcément. Le Bocuse d'Or est un concours qui m’intéresse parce que, contrairement au concours du MOF (Meilleur Ouvrier de France) qui est un concours entre soi et soi, sans challenge avec les autres participants, au Bocuse d'Or , il y aune vraie compétition entre chefs cuisiniers. Il y a aussi la dimension internationale qui m'intéresse beaucoup avec vingt-quatre candidats des quatre coins du monde. Et puis, le Bocuse d'Or reste un concours très artistique, très créatif. C'est très stimulant.
Vous êtes l'un des très rares candidats à concourir au Bocuse d'Or en ayant une étoile au guide Michelin, comme Davy Tissot avant vous. Est-ce une pression supplémentaire ?
Ce n’est pas une pression, non, pas forcément. Je n’ai pas vraiment fait le tour des autres candidats. Je me concentre sur moi. Chacun a son profil, son expérience, son vécu. Ce n’est pas parce qu’on est étoilé qu’on est forcément au-dessus. Certains ont travaillé davantage dans des restaurants, d’autres dans le traiteur, etc. Ils ont d’autres qualités qui font qu’ils restent des candidats sérieux. L'étoile n'est donc n’est pas une pression supplémentaire.
Quelles qualités justement faut-il avoir pour concourir au Bocuse d’Or ?
Je pense qu’il faut déjà être conscient de tout ce que ce concours implique : des sacrifices à faire, du temps que demande la préparation au Bocuse d'Or, que ce soit financièrement ou en investissement personnel. C’est important d’avoir ça en tête. Ensuite, il faut faire ce qu’on aime et y mettre son identité.
Quel a été le processus de sélection au Bocuse d'Or, entre votre envie de participer et le fait de l'acter auprès du Team Bocuse d’Or ?
Comme je le disais, ça fait longtemps que je veux faire le Bocuse d'Or. Mais je n’étais pas forcément en position de pouvoir le faire les autres années. Il y a deux ans, on travaillait sur un nouveau lieu pour notre restaurant Prairial, donc ce n’était pas possible. Il y a quatre ans, c’était la période du Covid-19. Les années précédentes, c’était compliqué aussi. Aujourd’hui, j’ai le lieu (à Confluence, NdlR). Ce nouveau lieu, ça fait huit ans qu’on y pense, qu’on travaille dessus, qu’on le cherche. Ces dernières années, je n’étais donc pas serein pour lancer un projet comme participer au Bocuse d'Or. Maintenant, c’est bon. On a aussi une équipe qui permet de dégager du temps et de se consacrer pleinement à ce concours. Et surtout, j’ai mon commis, ce qui est une chose importante. Je sais que sans lui, je ne me serai pas lancé. On s’est manifesté pour 2024. Ensuite, on a eu le sujet qui est tombé, en mars, pour la sélection. J’ai simplement répondu au sujet et envoyé ma proposition. Et j'ai été retenu avec cinq autres candidats.
Comment vous préparez-vous ?
Pour l’instant, pour moi c'est encore un peu vague, car on vient juste d'être sélectionné. On en saura plus le 21 juillet avec le sujet du concours et la finale le 21 octobre. Il y aura une première phase, plus sur papier à créer, voir ce qu'on va faire et après retour de vacances, on sera plus dans l'opérationnel. Avant le 21 juillet l'objectif est de monter une équipe.
D'ailleurs, quelle est votre garde rapprochée ?
Pour l’instant, le commis, c’est Mathis Blain, 21 ans Il était apprenti chez nous il y a deux ans. Je l’ai repris en pâtisserie, il a fait un CAP pâtisserie, et il passera en cuisine à partir de septembre. Ça fera plus de deux ans qu’il est avec nous. Il fait partie intégrante de l'équipe de Prairial. Le coach sera Maxime Laurenson, chef étoilé du restaurant Rustique. Je le connais depuis dix ans. L’avantage, c’est qu’il est proche de moi, on a les mêmes horaires, les mêmes jours de repos. C’est bien pour pouvoir dégager du temps.
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Et au niveau de l’équipe ?
Pour le reste, je n’ai pas encore eu le temps. On a commencé à en parler mercredi (18 juin, NdlR) pour voir qui contacter et comment s’entourer. Et même si certaines personnes ne seront pas présentes physiquement, elles pourront apporter leur soutien ou des conseils. Il y aura, je pense après les sélections du Bocuse d'Or France, un accompagnement du team France Bocuse d'Or. Pour l'instant, on est encore autonomes.
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Stress, envie d'en découdre ?
Bien sûr qu’il y a de l’envie, sinon je ne me lancerai pas là-dedans. Le stress, pour le moment, ça va. On attend le sujet et on verra après. Pour l’instant, non, il n’y a pas trop de stress.
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