INSA à Lyon @WilliamPham

A Lyon, l'Insa féminise les métiers de l'ingénierie et vise la parité femmes-hommes

Alors que la proportion de femmes dans les écoles d'ingénieurs françaises stagne autour des 30 %, à l'Insa Lyon, près de 40 % des étudiants sont des femmes.

En 2022, les femmes ne représentaient que 30 % des élèves dans les écoles d'ingénieurs françaises, selon l'analyse annuelle de l'association Femmes Ingénieures. La même étude fait état de 24 % d'ingénieurs professionnels étant des femmes. Pourtant l'enjeu de la féminisation du métier est double.

39,8 % de femmes élèves ingénieures à l'Insa

Il est dans un premier temps question d'égalité. En 2021, une enquête Ipsos pour les écoles Epitech montrait que seules 37 % des filles envisageaient de s'orienter vers une école d'ingénieur contre 66 % des garçons, alors même qu'elles sont plus de 50 % à être intéressées par les matières scientifiques.

L'enjeu est aussi industriel puisqu'en en novembre dernier, la société des ingénieurs et scientifiques de France alertait dans une tribune sur le manque d'ingénieurs, notamment femmes, dans de nombreuses filières

Lire aussi : Lyon : l'Institut Gaston-Berger alerte sur la baisse de la mixité sociale à l'Insa

A l'Insa Lyon, en 2014 déjà, la proportion de femmes parmi les effectifs totaux des élèves ingénieurs dépassait les 30 %. Sur l'année scolaire 2022/2023, elle a atteint les 39,8 % et même les 42,5 % uniquement sur les effectifs de première année. Ces bons chiffres, en augmentation de dix points en dix ans, sont le résultat d'une volonté politique globale, menée notamment par l'institut Gaston-Berger de Lyon, le Think Tank fondé par l'école en 2015. Sonia Bechet en est la directrice. A l'occasion de la journée internationale des droits des femmes, elle revient sur la politique menée par l'école pour favoriser l'égalité entre les femmes et les hommes.

Lyon Capitale : Comment expliquez-vous ces bons chiffres ?

Sonia Bechet : D'un côté, il y a notre système d'admission en première année, sans concours, qui prend en compte le contrôle continu. Au niveau du groupe Insa, pour 30 % de bachelières qui candidatent, nous avons un taux de plus de 42 % de femmes en première année.
Je tiens à dire que les jeunes filles n'ont aucun traitement de faveur, c'est une rumeur qui court parfois chez les étudiants qui donne un sentiment d'illégitimité à certaines étudiantes.

"Avec le temps, il y a un effet boule de neige, plus on a de jeunes femmes étudiantes plus les candidates potentielles se sentent légitimes"

Sonia Bechet, directrice de l'institut Gaston-Berger de Lyon

LC : C'est donc le contrôle continu qui favorise les jeunes femmes ?

SB : Oui, elles ont souvent un meilleur parcours scolaire et des meilleurs résultats. Plusieurs études ont montré qu'en situation de concours, les jeunes femmes se sentent moins aptes que les garçons et ont du mal à faire émerger leur réel niveau. C'est également le mode d'admission qui explique que la proportion de femme diminue en troisième année.
Des élèves issus d'autres formations peuvent être admis à l'Insa en entrée directe. Là, le vivier d'élèves est assez masculin, on tombe à 24,5 % de femmes admises en troisième année.

LC : A la manière de vos actions pour la mixité sociale, vous travaillez également sur les mentalités ?

SB : On est très attentifs à ce que les filles, autant que les garçons, puissent s'identifier à ce qu'on va leur proposer en sollicitant autant d'étudiants femmes que garçons pour venir leur présenter l'école. Sur la communication également on fait très attention à mettre des filles et à être plus inclusifs.

Source : livre blanc Insa

Avec le temps, il y a un effet boule de neige, plus on a de jeunes femmes étudiantes plus les candidates potentielles se sentent légitimes. D'autant que l'on travaille également à ce que les femmes se sentent bien au sein de l'Insa. Notre chargée de mission égalité de genre, Clémence Abry-Durand est en lien avec les associations étudiantes pour faire de la prévention contre les violences sexistes et sexuelles. A la rentrée, tous les élèves de première année ont eu du théâtre-forum sur le sujet. Nous avons une approche globale pour considérer l'ensemble de ce qui pourrait freiner l'ambition des jeunes femmes.

"Les choses vont dans le bon sens, notamment parce que les entreprises veulent attirer de jeunes femmes ingénieures."

Sonia Bechet, directrice de l'institut Gaston-Berger

LC : En sortie d'école en revanche, une étude de 2016 montrait que les jeunes ingénieures étaient payées en moyenne 2 000 € de moins que les hommes, les choses évoluent ?

SB : Les choses vont dans le bon sens, notamment parce que les entreprises veulent attirer de jeunes femmes ingénieures, le secteur a des problèmes d'attractivité. On constate toujours des écarts de salaires, Clémence Abry-Durand a organisé des ateliers de négociation salariales pour les étudiantes.
Pour nuancer, je dirais que cela peut s'expliquer par les secteurs d'activités. Souvent, c'est l'informatique qui cherche beaucoup d'ingénieurs et de fait avec des salaires plus élevés. Les jeunes femmes sont souvent moins intéressées parce que, tout comme certains hommes, elles pensent que c'est inné, qu'on ne peut pas apprendre si on n'a pas baigné dedans. Il y a là aussi un travail à faire.

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