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@ Audrey Chabal

Tué pour des cigarettes : un an après, le meurtrier court toujours

Foued Guessoum a été abattu le 31 août 2009 pour un paquet de cigarettes. Un an après, le meurtrier présumé est toujours en fuite et la jeune femme, à l'origine de l'altercation qui a précédé le coup de feu, n'a jamais été inquiétée par la justice. L'avocat de la famille, Maître David Metaxas, demande à la police judiciaire de reprendre l'affaire. Bilal Guessoum (photo), le frère de la victime, n'y croit plus.

"La souffrance est toujours la même. Le deuil ne peut pas commencer tant que Khoutir et Messai n'ont pas été incarcérés." Les traits tirés dans son appartement villeurbannais, Bilal Guessoum (photo) a l'impression, un an après le meurtre de son frère, que rien n'a été fait. Le 31 août 2009, Foued Guessoum, le gérant d'une entreprise de nettoyage âgé de 35 ans, était abattu à bout portant pour un paquet de cigarettes. Depuis, l'enquête piétine.

Il était 23 heures lorsqu'une jeune femme éméchée, Lila Messai, entre dans la brasserie de la Poste à Villeurbanne pour acheter un paquet de cigarettes. La serveuse ayant rangé sa caisse lui oppose un refus. "Elle a alors attrapé la serveuse au cou et s'est mise à l'insulter", raconte David Metaxas, l'avocat de la famille de Foued Guessoum. "Peu après, elle est revenue avec Redouane Khoutir, avec qui elle avait une liaison. À son tour, il a exigé un paquet de cigarettes. Deuxième refus. Khoutir lance alors des menaces à l'encontre de la jeune employée", poursuit l'avocat.

La suite : "Khoutir revient seul sur les lieux, une capuche sur la tête. Il reste un quart d'heure face à Foued Guessoum, puis lui tire une balle en plein cœur, à deux ou trois mètres de lui. Il ne lui a laissé aucune chance", selon Maître David Metaxas qui considère Khoutir comme "l'ennemi public numero 1." Quelques minutes plus tard, Lila Messai, après avoir reçu un appel de son amant, revient sur les lieux où elle est interpellée par les services de police dépêchés sur place. Après sa garde à vue, elle est laissée libre et Redouane Khoutir est toujours en fuite.

"Une stratégie qui ne fonctionne pas"

Pour l'avocat de la famille, la fuite de Redouane Khoutir démontre l'impuissance des enquêteurs. Depuis un an, les recherches sont menées par la brigade criminelle de la Sûreté départementale. "Je ne peux pas croire à un attentisme volontaire de la part de la police, s'insurge Maître Metaxas. Cela signifie donc que la stratégie ne fonctionne pas. Khoutir n'a plus de moyens, c'est un homme qui se cache, il n'est pas plus fort que la police. Et c'est pourquoi je demande depuis six mois à ce que la police judiciaire (PJ) s'empare de l'affaire. La PJ a l'habitude de ce genre d'enquête et a d'excellents résultats."

Contactée par Lyon Capitale ce mardi, la PJ affirme ne pas avoir "encore" l'affaire en mains. Une situation qui pourrait changer, espère l'avocat, avec l'arrivée d'un nouveau juge d'instruction ce lundi. Mais Bilal Guessoum n'y croit pas trop. "Mon frère n'intéresse personne. La justice me dégoûte et ce n'est pas le remplacement d'un homme qui y changera quoi que ce soit." Une "haine" contre la justice qu'explique Maître David Metaxas : "Je n'ai jamais vu un tel traitement judiciaire ! J'ai porté plainte à trois reprises contre Lila Messai, qui continue de se balader avec un sourire narquois à quelques mètres des Guessoum." Des plaintes pour agression, complicité de meurtre et non dénonciation de crime, qui ont toutes été rejetées. "Cette fille est complice à 2000%, s'énerve Bilal Guessoum, je veux que la justice s'occupe d'elle."

"Un homme en fuite n'ayant plus rien à perdre"

Adam-Foued. C'est le prénom donné par la compagne de la victime, enceinte au moment du drame, au petit garçon dont elle a accouché le 12 février dernier. "Il était heureux, se souvient son frère. Il voulait faire la surprise à la famille mais me l'avait confié quelques jours auparavant." Maître David Metaxas a promis un procès à la famille Guessoum. Une promesse qui tient lieu de mission. "Que va-t-on dire à son fils, né orphelin de père ?", s'interroge l'avocat.

Pour David Metaxas, la précédente condamnation de Redouane Khoutir l'inscrit de fait aux réseaux du grand banditisme. En 1984, l'homme, alors âgé d'une vingtaine d'années, avait été arrêté à la suite d'un braquage à Mâcon durant lequel un policier avait été tué. En août 2009, Khoutir était en libération conditionnelle depuis huit mois. Si l'avocat ne critique pas la décision de mise en semi-liberté prise par le juge d'application des peines (JAP), il s'inquiète de savoir cet homme en cavale. "Il est dangereux et n'a plus rien à perdre."

L'enquête, qui s'était un temps orientée vers les réseaux de grand banditisme et d'intégrisme, n'a apparemment rien donné. Le vice-procureur Jean-François Varaldi et la Direction départementale des services de police (DDSP), contactés lundi, assurent que des pistes sont explorées et que les recherches se poursuivent. En attendant, les parents de Foued vivent prostrés, ne sortant plus de chez eux, dans l'expectative d'un coup de téléphone qui leur annoncerait l'arrestation de Redouane Khoutir.

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