Lundi 25 janvier, des étudiants occupent les locaux de l’IEP pour réclamer la réouverture des universités © Antoine Merlet

Retour des étudiants dans les universités, il y a urgence… à faire confiance

Éditorial du magazine Lyon Capitale de février 2021


La promesse d'Emmanuel Macron d'une réouverture progressive des universités sera t-elle tenue à la veille de l'annonce de possibles restrictions supplémentaires ? La situation dramatique que connaissent certains étudiants doit être prise en compte. Pourquoi ne pas leur faire confiance pour respecter les gestes barrières ?

Il y a ceux qui dénoncent inlassablement des mesures disproportionnées. Et il y a aussi ceux, plus silencieux mais plus nombreux, qui ont accepté les mesures restrictives avec philosophie, malgré les sacrifices endurés. Parmi cette majorité moins vindicative, il y a des voix qu’on n’avait pas ou peu entendues depuis le début de la crise sanitaire. Des voix qui ont pourtant l’habitude d’exprimer leurs revendications dans la rue de manière quelque peu bruyante.
Ces voix, ce sont celles de près de deux millions d’étudiants des universités françaises qui ont fait preuve d’une grande patience, face à d’inédites privations de liberté.

Parce qu’il avait pour objectif de préserver la santé de leurs aînés, plus fragiles, ils ont accepté un confinement avec une sagesse presque inhabituelle.
On moquait leurs frustrations face à l’impossibilité de sortir, de se divertir et de cultiver leurs relations sociales. On les imaginait même heureux de faire la grasse matinée ou de rester scotchés devant Netflix…En réalité, de ces restrictions, la plus cruelle a bel et bien été l’impossibilité de venir étudier. Ils ont souffert de ne pas avoir pu assister aux cours dispensés par leurs enseignants, échanger avec leurs camarades, élaborer des projets et poser les jalons de leur avenir…

À la sortie d’un été plus insouciant, nous avions rencontré ces jeunes adultes qui avaient accueilli le deuxième confinement avec philosophie. Ils nous affirmaient “qu’avoir 20 ans était plus facile que d’en avoir 70”.

Mais en quelques mois, cette jeunesse a basculé de l’indulgence à la résignation. Puis de la résignation à la détresse. L’isolement, l’inquiétude, la précarité ont gagné une immense partie des étudiants. Plus de deux tiers d’entre eux se sont sentis en décrochage*. Petit à petit, tout cela s’est transformé en colère qui s’est exprimée sur les réseaux sociaux, puis dans les manifestations et enfin dans les facs occupées…


“Faites-nous confiance pour respecter les gestes barrières !”


Les mesures annoncées en janvier par Emmanuel Macron – une journée en présentiel, deux repas par jour à un euro, aide psychologique – sont un début non négligeable. Mais il est indispensable d’accélérer la réouverture des universités par une action plus volontariste.
"Pourquoi serions-nous moins aptes à respecter les règles de distanciation que des élèves de maternelle, des collégiens ou des lycéens ?"  nous dit dans ce numéro Madeleine, étudiante engagée dans les actions syndicales et associatives. “Faites-nous confiance pour respecter les gestes barrières !” implore t-elle.

Pourquoi pas ? Nous pourrions la prendre au mot et même aller plus loin…

Laissons donc ces jeunes adultes mettre en place une organisation pour leur retour : tests Covid, mesures de distanciation, vérification des gestes barrières, gestion du retour par groupes… Tout cela porté par les associations d’étudiants, BDE, syndicats, sous la supervision des enseignants. Après tout, l’organisation des soirées, sorties de ski, compétitions sportives, galas, remises de diplômes ou autres actions fait partie intégrante de la formation des élèves, sollicitant leur capacité à gérer des projets.

L’idée est utopique ? Risible ? Peut-être pas tant que cela. Certains d’entre eux n’ont pas attendu pour initier, seuls, des distributions de repas ou des actions solidaires à destination des étudiants les plus précaires. On aurait tort de les croire incapables de se mobiliser.

Surtout, les talents ne manquent pas dans nos universités : gestion, logistique, communication, entre autres, et, bien sûr, compétences médicales.
Pourquoi ne pas utiliser ces forces vives ne demandant qu’à en découdre avec cet ennemi invisible qui leur a gâché l’année scolaire ?
Cette génération est celle qui doit imaginer notre futur. Acceptons de la mettre à contribution au plus vite pour relever ce défi en leur donnant notre confiance. Elle leur est indispensable pour discerner un avenir qui peine à s’éclaircir. Allez chiche ?


* Étude de l’institut Ipsos pour l’association étudiante Fage : 84 % des étudiants se sont sentis en décrochage.

 

 

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