Plus noire que noire, la nouvelle militance "kémite"

Dernier né à Lyon : Kemra. Kémites pour la Renaissance Africaine. Combien sont-ils ? Ils refusent de le dire. Quelques dizaines tout au plus à Lyon où cette association a été créée. Organisation à la fois visible et invisible : un site internet accessible à tous mais la plupart des membres refusent d'être photographiés.

Kémites ? Selon cette organisation, c'est le nom qu'il faut donner aux habitants de Kemet, l'Afrique. Un monde plus ou moins mythique, une Egypte ancienne vue comme le berceau de toute civilisation africaine, comme la civilisation gréco-romaine est le berceau de l'Occident. Les kémitistes prennent donc volontiers des noms égyptiens, come Upahotep, l'un de leurs responsables : " En Afrique explique-t-il les noms renvoient vers ce que nous sommes ou ce que nous voulons faire ". Lui ne se reconnaissait pas dans un nom aux consonnances occidentales, il a donc demandé un changement d'état civil dans son pays d'origine le Sénégal, avant de chercher à obtenir la même chose en France. Selon eux, il y aurait un seul peuple africain, qui aurait été " kidnappé et déporté par les flots de l'Histoire " à travers l'Afrique elle même (1 milliard de kémites), l'Amérique du Sud (200 millions) l'Amérique du Nord (57 millions) l'Asie (50 millions), les Caraïbes (33 millions) et enfin l'Europe (18 millions). Leur emblème est une carte de l'Afrique retournée où le pôle sud se trouve en haut.

La promotion de la "beauté nubienne "
Ils veulent promouvoir la culture "kémite" en Afrique et dans la diaspora. Ils prônent une indépendance politique, culturelle, et économique. Ils parlent d'un patrimoine commun à tous les Africains, par delà les différences nationales, ethniques, tribales qui divisent pourtant ce continent. Bien sûr, ils fustigent l'esclavage : " un traumatisme qui traîne de génération en génération ". Ils voudraient demander réparation devant l'Histoire mais aussi devant les tribunaux. Ils rendent les Européens responsables de tous les conflits africains " Au Rwanda, la rivalité entre les Tutsis et les Hutus a été fabriquée artificiellement par les colons belges, alors qu'au fond c'était un même peuple et une même langue ". Ils font la promotion de la "beauté nubienne " celles des femmes et des hommes africains dans leur tradition, débarassés des influences occidentales, débarrassés des effets de mode qui prônent des filles noires aux cheveux lisses et aux nez fins. Ils se posent en équilibre sur une revendication de type " identitaire ", une sorte de nationalisme culturel. Les métis n'y sont pas forcément bien vus, les blancs ou " leucodermes ", par forcément les bienvenus. Ils se disent pourtant ouverts sur l'extérieur. " Il faut que sur le continent ce soient les kémites qui décident pour parler d'égale à égal avec les autres ". Les autres ce sont les Chinois (1 milliard) les Eeuropéens (400 millions). Ils voudraient constituer une fédération parafricaine de taille à rivaliser avec les autres blocs continentaux.

"La réussite, c'est Lilian Thuram"
Pas de révolution, peu d'actions de rue ou de coups d'éclat. Ils revendiquent des activités plutôt bon enfant. Comme le partage des savoirs. Beaucoup sont des étudiants. Ils partagent leurs cours entre eux pour bénéficier des connaissances des autres. Ils recherchent des documents, CD, DVD, ouvrages rares pour les expédier sur le continent africain vers d'autres étudiants. Ils organisent du soutien scolaire. Ils vont dans les quartiers voir les " kémites " pour leur donner le goût des études et des bibliothèques. " Pour beaucoup de jeunes explique Upahotep, la réussite, c'est Lilian Thuram, mais tout le monde ne deviendra pas footballeur, il ne faut pas qu'ils abandonnent les études à 16 ans ". Mais s'agit-il de partager des savoirs ? Ou des convictions ? Ils proposent de l'aide à la création d'entreprise, au développement des commerces et entreprises kémites. Pour Tetnic ils ont organisé des distributions de flyers. Quelquefois ils proposent du marketing, du merchandising. Ils ne se définissent pas comme " radicaux ", ne partagent pas toutes les prises de positions de Kemi Seba, mais admirent le courage qu'il a de faire bouger les choses, de faire avancer la question noire. Ils le soutiennent quand même, quoi qu'il fasse, par solidarité, parce que c'est un kémite.

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