élevage de volailles
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Dans la Dombes, un projet d'élevage industriel de volaille qui dérange

Ils finissent souvent dans nos assiettes. Ce sont les poulets Maître Coq, le Gaulois, ou encore les plats préparés Marie. Et ces marques appartiennent toutes au groupe LDC, qui emploie plus de 17.000 personnes dans l'industrie agroalimentaire française. Aujourd'hui, le groupe est mis en cause par plusieurs associations de défense animale, qui dénoncent la mise en place d'un projet d'élevage industriel de volaille de chair dans l'Ain.

Ce projet d'élevage, piloté par un jeune agriculteur dénommé Nicolas Busi, a été dernièrement approuvé par le Conseil municipal de Chalamont, petite bourgade de la Dombes. Une décision qui a soulevé le mécontentement de l'association L-PEA, qui "s'attaque aux grands projets agricoles nuisibles au bien-être animal, à l'environnement et à la santé des consommateurs".

"L'urine animale dégage de l'ammoniaque qui les brûle"

Et pour cause, difficile de ne pas être interpellé par les informations avancées par l'association, et confirmées par le dossier d'enregistrement du projet déposé à la préfecture du département. Ainsi, la densité d'élevage prévue par le projet est de 22 poulets/m2, "une feuille A4 par poulet", assène-t-on chez L-PEA. Un espace dans lequel l'association considère que les poulets ne peuvent évoluer normalement. Des gallinacés qui sont d'ailleurs sélectionnés pour leur souche spéciale, développée par l'INRA. Une souche permettant une croissance hyperrapide des poulets, qui arrivent à maturité en 35 jours. Et ce au prix de certains sacrifices pour l'association L214 : "il n'y a que les muscles des poulets qui grossissent, et ce déséquilibre entraîne des problèmes pulmonaires chez les volailles, qui sont victimes de crise cardiaque…"

De quoi expliquer le taux de mortalité de 3% des poulets prévu dans le projet. En effet, dans cet élevage , 1200 poulets mourront à chaque cycle, soit tous les 35 jours. Un taux de mortalité quotidienne de 34 poulets, qui devront être ramassés par l'exploitant deux fois par jour.

Mais chez LDC, on se défend de toutes ces critiques : "on est très sensible aux conditions d'élevage des animaux." Le groupe dénonce la désinformation qui entoure le projet : "les associations nous critiquent alors que le bâtiment n'est même pas encore construit." Pour le responsable de l'élevage du groupe, "le taux de mortalité est quelque chose d'un peu fictif". Il le justifie par "des poussins qui peuvent avoir des malformations, tout comme les bébés chez les humains". Une analogie qui peut paraître hasardeuse, quand on sait que ces poulets finiront dans l'assiette du consommateur.

"Les élevages intensifs posent une véritable question sanitaire"

Et c'est là l'autre problématique soulevée par un tel projet. Ainsi, de mauvaises conditions d'élevage des animaux pourraient être à terme dangereuses pour les humains. L'autorité de sûreté européenne des aliments déclare ainsi que "75% du poulet industriel est contaminé par la bactérie campylobacter, principale responsable des maladies diarrhéiques et des intoxications alimentaires". De son côté, l'entreprise assure que "les volailles seront nourries d'aliments à base uniquement végétale et minérale, conformément aux réglementations en vigueur". Des réglementations dont le flou est souvent pointé par les associations. L214 dénonce d'ailleurs "un élevage industriel typique, terreau pour le développement de nouveaux pathogènes". Ces désaccords entre les associations et le groupe exacerbent les tensions. Loué, filiale de LDC, a ainsi déposé une plainte contre la pétition de l'association L-PEA qui circule en ligne, et qui a déjà récolté plus de 40.000 signatures.

Des mairies qui s'opposent

Si le projet déchaîne les passions, les municipalités locales ne sont pas en reste. Alors qu'il impacte Chalamont et la commune limitrophe de Châtenay, les deux municipalités ont tiré des conclusions opposées de la consultation publique organisée au mois de juin. Et chacune d'elles campe sur ses positions. Du côté de Chalamont, le maire déplore "une polémique à Châtenay, suscitée par la désinformation de l'adjointe quant à la teneur du projet". S'il a donné son aval, il n'en reste pas moins "déçu que la zone n'ait pas été classée parc naturel régional, ce qui nous aurait permis de trouver un modèle qui corresponde à ce territoire, avec des appellations, des labels..."

Car la Dombes, c'est aussi une zone d'étangs, au patrimoine environnemental important. Ce qui lui a valu de passer tout juste à côté de la classification comme parc naturel régional en 2015, finalement refusée par Laurent Wauquiez. Le maire de Chalamont "aurait souhaité que ça se passe autrement", "et comprend la démarche des associations". Et s'il y a bien un point sur lequel les deux communes s'accordent, c'est celui-là.

Mais "ce n'est pas une raison suffisante" pour Françoise Goze, première adjointe au maire de Châtenay. Fervente opposante au projet, son avis est implacable : "ils vont commercialiser des produits transformés sous la marque le Gaulois, en faisant croire consommateur qu'il va manger de la viande de qualité. Mais la qualité ce n’est pas ça". Elle soutient la pétition de l'association L-PEA, et espère qu'elle pourra faire bouger les lignes. La décision finale revient désormais à la préfecture de l'Ain, qui n'a pour l'instant pas communiqué. Contacté, le service communication a annoncé que le "dossier allait être examiné par le CoDERF", qui devra émettre un avis. Pour un verdict final qui ne sera connu qu'après cette consultation.

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