Georges Fenech, ici à l’Hotel de Ville de Lyon, en tant que conseiller municipal du 6e arrondissement de ©Tim Douet
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Bataclan, attentats, justice : le magistrat Georges Fenech se confie à Lyon Capitale

Ancien juge d’instruction à Lyon, Georges Fenech a présidé la commission d’enquête parlementaire sur les attentats du 13 novembre 2015. Il signe le livre "Bataclan, Paris, Stade de France. Le procès", au moment où s’ouvre l’affaire de ces tueries de masse. Ce jeudi, les parties civiles sont appelées à la barre.

"Nous n’étions clairement pas prêts." Ni les services de renseignement ni la police. "Organisation trop complexe, inadaptée, mal coordonnée et partage insuffisant de l’information." Le magistrat lyonnais  Georges Fenech n'y va pas par quatre chemins. Dans son livre "Bataclan, Paris, Stade de France. Le procès" (éditions du Rocher), l'ancien président de la commission d'enquête parlementaire sur les attentats du 13 novembre 2015 revient sur les failles et les dysfonctionnements qui ont permis les attentats. L'occasion aussi d'aborder la justice pénale, la sortie de prison des djihadistes, l'ultra-communautarisme associé à l'économie mafieuse de la drogue, l'islamisation des banlieues. Grand entretien. Lyon Capitale : Êtes-vous une grande gueule ? Georges Fenech : J’essaie de toujours tenir un propos équilibré jamais pointé de sectarisme ou de partisanisme. Je tente d’avoir un esprit le plus objectif possible et d’être compris du plus grand nombre. Quelle est votre dernière colère ? La colère n’est pas un sentiment qui me caractérise, je préfère toujours débattre, sans esprit de polémique. Je n’ai aucun règlement de comptes, avec personne, à mener. Vous avez parlé de sectarisme. Ancien président de la Miviludes (Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires), vous connaissez bien le processus d’emprise mentale. La déradicalisation, fausse bonne solution ? Mon expérience me l’a appris : faire revenir un individu endoctriné à un esprit libre et éclairé est une mission quasi impossible. D’ailleurs, les quatre centres de déradicalisation mis en place sous Manuel Valls, alors Premier ministre, ont très vite fermé car cela ne fonctionnait pas. Le terme de déradicalisation est totalement inapproprié. Je préfère celui de désengagement : vous pouvez considérer que la loi religieuse est supérieure aux valeurs de la République, en revanche la violence ne doit jamais être un moyen d’imposer votre idéologie. C’est le désengagement par rapport à l’expression violente.
"Faire revenir un individu endoctriné à un esprit libre et éclairé est une mission quasi impossible"

La violence va être au cœur du procès du Bataclan, qui se déroule devant la Cour d’assises spéciale de Paris jusqu’en mai 2022. Qu’en attendez-vous ? J’attends la vérité sur ces événements du 13 novembre. J’attends aussi la recherche de preuves de la culpabilité des individus qui comparaissent, et que soient prononcées des condamnations à la hauteur de la gravité de ces faits inédits. J’attends enfin une recontextualisation de ces épisodes tragiques, comprendre comment ils ont pu se produire, comment ces individus ont pu échapper à nos radars. Peut-on rendre la justice avec 6 mois d’audiences, 1 763 parties civiles, 350 avocats ? C’est tout le défi actuellement soumis aux juges. Il s’agit d’un procès hors norme – je rappelle le tentaculaire dossier d’instruction de 472 tomes et d’un million de pages. C’est tout simplement le plus grand procès depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Ces attentats ont d’ailleurs été décrits partout comme “le 11 septembre français”. Vous savez, on a déjà eu l’expérience d’audiences très longues. Je pense au procès Barbie, qui s’est tenu à Lyon, de mai à juillet 1987, qui avait été filmé pour l’histoire, comme c’est le cas pour celui des attentats du 13 novembre, avec l’aménagement d’une salle spécifique, la salle des pas perdus, comme à Paris.  

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