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Label “Fait maison” : “je fais confiance aux clients”

Le ministère de l’Économie a publié mi-juillet un décret portant mention “Fait maison” permettant de distinguer les bons cuisiniers des moins bons. Qu’en pensent les intéressés ? Benjamin Ferier, le chef du Petit Gadin à la Croix-Rousse (Lyon 4e), nous répond.

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Des plombes qu'on avalait de travers. Et puis il y eut ce 11 juillet et son fameux dicton : à la Saint-Benoît, le coucou chante dans les bons endroits, ou bien il est mort de froid. On écopa de la deuxième partie de phrase, l'estomac dans les talons. Ce 11 juillet fut publié au Journal officiel le fameux décret sur le "fait maison". Ou comment "mieux informer le consommateur sur les plats qui lui sont servis", permettant de différencier les cuistots qui utilisent des produits frais de ceux qui assemblent les kits Lego de l'agro (alimentaire).

Sur le papier, l'idée faisait saliver. Dans l'assiette, on risque de dégobiller. "On est foutu, on mange trop. On est foutu, on mange trop. Mais qu'est-ce qu'on fera quand on sera gros ?" chante Souchon. Car peuvent entrer dans la composition d'un plat “fait maison” les produits "épluchés, à l'exception des pommes de terre [imaginez du McDo en "fait maison" ! NdlR), pelés, tranchés, coupés, découpés, hachés, nettoyés, désossés, dépouillés, décortiqués, taillés, moulus ou broyés, fumés, salés" mais aussi tous ceux qui sont "réfrigérés, congelés, surgelés, conditionnés sous vide". Mais, là où l'on reste comme deux ronds de flan, c'est lorsqu'il est dit que le restaurateur peut utiliser des produits transformés ailleurs, du moment qu'est indiquée la "marque du produit ou le nom du professionnel qui l'a fabriqué expressément". J'ai la rate qui s'dilate, j'ai le foie qu'est pas droit, j'ai le ventre qui se rentre, j'ai l'pylore qui s'colore...

Si, à Lyon Capitale, vous l'aurez sûrement compris, on s'est fait notre propre idée de ce label “Fait maison”, on est allé voir quelques restaurateurs pour savoir ce qu'ils en pensaient et comment ils travaillaient.

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Restaurant : Le Petit Gadin

Chef : Benjamin Ferier
Adresse : 17 rue d’Austerlitz, Lyon 4e

Lyon Capitale : Que pensez-vous du label “Fait maison” ?

Benjamin Ferier : Je trouve que ce label n'est pas très clair pour le client. Chez nous, on fait tout maison. Mais il suffit pour certains restaurateurs d'acheter une pâte toute prête et de réaliser une tarte avec, ou bien d'ajouter un brin de ciboulette sur un poisson congelé pour obtenir le label “fait maison”. Moi, je fais confiance aux clients pour s'apercevoir très vite de la fraîcheur des produits. En résumé, je ne vois pas bien ce que ce label peut nous apporter.

Quelle est la provenance de vos produits ? Pour quelle cuisine ?

On ne travaille que des produits frais, beaucoup de poissons qui viennent de la poissonnerie Le Saint-Pierre, des fruits et des légumes qui viennent de la région, ils peuvent venir de pays étrangers aussi – on se sert chez DC Plateforme –, mais on essaie de privilégier les fruits et légumes de saison. On va aussi chercher nos produits sur le marché de la Croix-Rousse. Le seul produit qui n'est pas frais chez nous, ce sont les gambas qui arrivent d'Argentine, mieux vaut qu'elles soient congelées, celles-là, pour faire le voyage (rires). Notre cuisine est beaucoup faite à base de poisson, avec une tendance asiatique. Nous proposons à la carte cinq entrées et six plats et desserts. Du dos de cabillaud poché au lait de coco, avec gingembre, citronnelle, curry vert, coriandre et citron vert. La carte tourne environ tous les deux mois, il y a une rotation. Les desserts sont tous faits maison, y compris la pâte, ce n'est pas de la grande pâtisserie mais plutôt des desserts du type brasserie : crumble, fondant au chocolat, tartes. On ne propose pas de plats qui peuvent être industrialisés, même le haddock fumé est fait maison chez nous.

Pouvez-vous nous citer un plat typique “fait maison” servi dans votre restaurant, et comment le différenciez-vous du même plat chez l’industriel ?

Les briques de gambas sauvages au tandoori, c'est le seul plat à base de surgelé que l'on sert au restaurant car les gambas sauvages viennent d'Argentine. Ce plat, par exemple, ne peut pas être préparé à l'avance, car sinon les feuilles de brique s'humidifient et elles sont toutes molles. Chez nous, elles sont bien croustillantes. On ne sert pas de plats préparés et, rien qu'en lisant notre carte, le client peut le comprendre très vite. C'est pour cela que le label, je ne vois pas bien ce qu'il peut nous apporter. Dans la mesure où la carte parle d'elle-même et où nos produits se doivent d'être frais, sauf les gambas qui sont malgré tout travaillées maison. C'est nous qui les roulons dans la feuille de brique et qui les faisons mariner dans le tandoori.

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