Le scandale des marchés publics du Sytral devant la Justice

Au Sytral, l'attribution des marchés publics se déroule selon une procédure bien particulière. Il s'agit de deviner le prix secret fixé par les services en écartant les entreprises les moins chères. Une procédure qui a surpris les établissements Collet, évincés d'un marché sur les travaux du tramway T4. Hier, l'entreprise a saisi le tribunal administratif afin de suspendre un contrat entre l’entreprise Cholton et le syndicat.

Dans la salle d'audience du tribunal administratif de Lyon, Me Simone Majerowicz, qui défend les intérêts du Sytral, râle avant même l'ouverture de la séance. L'ambiance est tendue...Me Raphaëlle Cadet, l'avocate des établissements Collet, vient de lui transmettre une nouvelle pièce au dossier. En ce mercredi après-midi, l'urgence est de mise et le dossier brûlant.

Le 4 décembre dernier, un marché est signé entre le Sytral, organisme présidé par Bernard Rivalta (PS), et l'entreprise Cholton associée à MDTP. La société, spécialisée dans les travaux d'assainissement d'eau, remporte le marché de déviation des réseaux d’eau potable du tramway T4 avec une offre à 1 079 736 euros, alors que sept de ses concurrents ont fait des offres entre 449 000 euros et 751 000 euros. Contrairement au principe légal de choix de l’offre « économiquement la plus avantageuse », c'est ainsi l'une des entreprises les plus chères qui obtient le marché. Collet n’est pas retenu, il ne propose que 560 326 euros…

La procédure employée par le Sytral est inédite. Les entreprises sont notées en fonction de deux critères : le prix et la qualité. Pour le critère prix, l’entreprise qui obtient la meilleure note est celle qui propose un montant le plus proche possible de celui estimé par le maître d’œuvre. Coup de chance pour Jean-Yves Moroni, le patron de Cholton, son offre tombe à 5500 euros près du prix « secret ». Seconde coïncidence : le même jour, il se voit attribuer le marché de l’assainissement, pour le même chantier, et « devine » à 33, 65 euros près le prix caché.

Lors de l’audience, Me Raphaëlle Cadet, l’avocate de Collet, évoque « les dépenses somptuaires » de l’organisme et demande à ce que l’on mette un terme à ces pratiques. « Cette méthode d’évaluation valorise l’offre la plus chère. Elle conduit à évincer purement et simplement les offres anormalement basses, ce qui est contraire à l’article 55 du code des marchés publics (qui impose aux collectivités de justifier par écrit la mise à l'écart d'offres qu'elles jugeraient "anormalement basses". Avec son système, le Sytral s'exonère de fait de cette obligation, NDLR). Il revient au Sytral de nous démontrer que son évaluation est légale. Il en va de l’atteinte à l’ordre public », ajoute t-elle.

Sur le critère du prix, Me Majerowicz fournit une seule explication et avance que « le prix correspond à une qualité ». « Au Sytral, nous avons travaillé avec des entreprises qui pratiquaient des prix inférieurs mais le travail était moins bien fait. La sécurité est aussi un critère de choix. »

Pourtant, M. Wyss le président, jusque-là plongé dans ses dossiers, demande des éclaircissements : « Mais dîtes-moi, je ne comprends pas. Outre l’offre de Cholton, toutes les autres étaient en dessous d’un million d’euros. C’est ça ? ».

Un peu décontenancée, Me Majerowicz semble chercher ses mots l’espace d’un instant et reprend : « Euh, oui mais nous pourrions prendre le problème autrement. Les entreprises qui ont répondu à l’appel n’ont-elles pas sous-évaluées leurs offres ? (…) De toute façon, nous n’avons aucune preuve de l’irrégularité de cette procédure ».

Le tribunal rendra son ordonnance lundi 18 janvier.

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