Clément Drognat-Landré, porte-parole de La rue est à nous Lyon, est l'invité de 6 minutes chrono / Lyon Capitale.
La ZTL de Lyon (zone à trafic limité) décidée par les écologistes qui entrera en vigueur le 21 juin fait des mécontents de tous bords. Depuis des semaines, les Défenseurs de Lyon, une association qui regroupe principalement des commerçants, alertent sur l'impact sur la fréquentation de la Presqu'île qu'aura cet outil. La rue est à nous, un collectif qui milite pour un rééquilibrage de l'espace public, déplore de son côté les trop nombreux concessions des écologistes par rapport à l'objectif initial. "Sur le rééquilibrage de l'espace public on aurait sans doute pu être plus ambitieux et on aurait pu piétonniser réellement", regrette Clément Drognat-Landré, le porte-parole de ce collectif.
"Il y a sans doute eu une certaine frilosité qu'on regrette également par rapport à des oppositions très vocales. C'est d'ailleurs pas le seul sujet sur lequel il y a eu des petits retours en arrière. On pense aux voies lyonnaises notamment où il n'y aura pas du tout le kilométrage annoncé en début de mandat", appuie Clément Drognat-Landré.
La retranscription intégrale de l'entretien avec Clément Drognat-Landré
Bonjour à tous et bienvenue, vous regardez 6 minutes chrono, le rendez-vous quotidien de la rédaction de Lyon Capitale et aujourd'hui nous accueillons Clément Drognat-Landré. Vous êtes porte-parole à Lyon du collectif La rue est à nous, un collectif qui plaide pour une meilleure répartition de l'espace public, d'une certaine manière vous allez être exaucé à Lyon puisque en juin va entrer en vigueur la ZTL, zone à trafic limitée qui finalement va restreindre l'accès aux rues de la presqu'île aux seuls habitants et à quelques professionnels qui auront une dérogation pour circuler dans la presqu'île. Les écologistes ne veulent pas employer le mot piétonnisation, est-ce que vous vous considérez que c'est une piétonnisation ou qu'ils ont raison c'est pas du tout une piétonnisation ?
On considère effectivement que c'est pas une piétonnisation, on le regrette d'ailleurs, on pense que la majorité aurait pu aller plus loin dans le rééquilibrage de l'espace public. La zone à trafic limitée effectivement elle limite l'accès à la presqu'île à un certain nombre de personnes, elle garantit quand même encore l'accès à beaucoup d'ayants-droit et de piétonnisation en réalité il y en aura assez peu, il y a effectivement le nord de la rue de la République, il y a quelques petits bouts de rues ici ou là qui sont un peu piétonnisés, un peu végétalisés, mais sur le rééquilibrage de l'espace public on aurait sans doute pu être plus ambitieux et on aurait pu piétonniser réellement.
Vous auriez fait comment vous, vous y seriez pris comment ? Pas l'autorisation pour tout le monde du matin et carrément des axes fermés ?
Sur la piétonnisation, on pense qu'il fallait une magistrale piétonne réellement de la confluence jusqu'à la Croix-Rousse. Ensuite, il aurait fallu plus végétaliser, plus piétonniser et pas le petit patchwork qu'on a fait à droite à gauche. Sur la zone à trafic limité effectivement on aurait un petit peu changé les règles, on aurait limité l'accès le matin. Je pense qu'à terme ce serait aussi bien qu'on envoie des signaux notamment aux opérateurs de la logistique en leur disant que s'ils peuvent livrer en électrique c'est mieux et du coup en gardant un créneau pour la livraison électrique ou en tout cas la cyclo-logistique par exemple mais la livraison zéro émission moteur plutôt que tout type de véhicule. Effectivement on aurait aussi fait une zone à trafic limité plus large, plus grande. Là le périmètre est quand même très restreint. Il n'y avait pas de raison à notre sens que ça n'aille pas au moins jusqu'à Perrache voire même jusqu'à la confluence.
Comment vous expliquez que les écologistes ne soient pas allés au bout de votre projet ou en tout cas au bout d'un projet de piétonnisation qu'on soit sur cet aménagement hybride c'est que finalement ils ont intégré certaines revendications d'opposants, de commerçants, d'habitants peut-être de la presqu'île. Comment vous expliquez cette timidité ?
Je pense qu'il y a plusieurs explications sur cette timidité. D'une part il y a le fait que ce soit quand même un dispositif relativement nouveau en France pas forcément compris par tous et toutes, pas forcément connu. Donc je pense qu'il y a eu une volonté de commencer sur quelque chose de pas trop important ce qu'on peut regretter par ailleurs. Et ensuite effectivement il y a sans doute eu une certaine frilosité qu'on regrette également par rapport à des oppositions très vocales. C'est d'ailleurs pas le seul sujet sur lequel il y a eu des petits retours en arrière. On pense aux voies lyonnaises notamment où il n'y aura pas du tout le kilométrage annoncé en début de mandat. Les commerçants et les commerçantes, on en a beaucoup entendu, à titre personnel je ne suis pas sûr que ce soit une majorité qui soit opposée à la zone à trafic limitée mais en tout cas on en a beaucoup entendu exprimer leur opposition. Nous ce qu'on rappelle à la rue est à nous, c'est que ce genre de dispositif, la zone à trafic limitée mais en règle générale, les politiques qui visent à rééquilibrer le partage de l'espace public qui visent à remettre les gens réellement dans la ville et à leur permettre de se réapproprier l'espace ce sont des politiques qui profitent toujours aux commerçants et commerçantes.
Quand vous regardez par exemple ce qui peut exister à l'étranger notamment en Italie, pays pionnier sur les ZTL, il n'y a pas un effondrement des commerces ?
Tout à fait, en réalité même leur chiffre d'affaires, leur bénéfice augmente quand on rend la place aux gens puisque les clients sont plus souvent à pied ou à vélo ou même en transport en commun qu'en voiture, notamment dans les centres-villes. Vous parliez de l'Italie, c'est totalement vrai mais si je prends par exemple la zone à trafic limitée qui s'appelle zone de circulation restreinte à Gand en Belgique, ça a aussi mené à une énorme augmentation des ventes des commerces à Copenhague, à Madrid, vraiment partout où c'est arrivé en Europe mais aussi en France quand il y a des politiques relativement similaires ça a bénéficié aux commerçants et commerçantes.
Pour vous il y a un biais français, un attachement français à la voiture ?
Je ne sais pas s'il y a un attachement français à la voiture, je pense que nos villes se sont développées autour de la voiture et que là on essaye de sortir petit à petit de ça parce qu'on est plus au fait des problématiques que la voiture entraîne que ce soit des problématiques de pollution atmosphérique, de sécurité routière, d'accès à la ville. Je pense que certains, les dispositifs s'ils marchent bien en Italie notamment c'est parce qu'ils sont connus et qui sont ancrés dans la culture du pays pas en France encore. Je ne pense pas qu'en France on soit incapable de mener des politiques de la sorte et qu'on soit particulièrement attaché à la voiture. Je pense qu'il y a des craintes qui sont fondées et légitimes pour certains usages, pour certaines personnes qui ne peuvent pas se passer de la voiture notamment les ouvriers mais aussi des personnes à mobilité réduite par exemple. Je pense que si on arrive à permettre à ces personnes d'utiliser leur voiture et à être débarrassé de tout le trafic de gens qui peuvent utiliser des solutions alternatives on en sortira gagnant.