Sensibiliser son enfant à une consommation responsable

Dans un monde qui pousse à la surconsommation, les enfants sont soumis quotidiennement à de multiples tentations : vêtements, produits high-tech, sorties… De leur côté, les parents n’ont pas toujours le courage, ni la volonté de résister aux sollicitations incessantes de leur progéniture. Pourquoi est-il important, voire urgent, d’apprendre à mieux – et moins – consommer ? Comment éduquer son enfant à la consommation ?

En général, quand un enfant ou un adolescent consomme, il est focalisé sur son désir, plutôt que sur les conséquences de sa consommation. Il achète, sans trop se poser de questions, guidé par de nombreuses incitations, provenant des médias, des réseaux sociaux, de l’entourage… “Mieux consommer, cela passe déjà par moins consommer !, souligne Marie Duboin, auteure de L’abus de consommation responsable rend heureux (édition Eyrolles). Mais on ne peut pas dresser une liste de shopping de ce qu’il faut acheter. Il faut prendre conscience de sa consommation, avoir un regard sur elle sans pour autant la juger. C’est primordial d’inculquer cette démarche à nos enfants, car ils sont les citoyens de demain, et il faut les amener à développer leur esprit critique.

Expliquer ses choix et transmettre ses valeurs

Consommer n’est pas un acte anodin, qui sert juste à se faire plaisir. L’enfant doit comprendre que sa consommation a un impact au niveau écologique, économique, social… Ce qui lui permettra de l’orienter pour qu’elle soit juste et équitable pour tous. En faisant attention à ce qu’il achète, il peut protéger la planète, éviter le gaspillage des ressources naturelles, lutter contre l’exploitation humaine et animale, respecter son corps… “La consommation est un très bon support pour transmettre nos valeurs, qu’elles soient altruistes, humanistes, écologiques…, note Marie Duboin. D’autant que les plus petits sont naturellement empathiques et ont une conscience écologique innée. On peut se servir des exemples du quotidien pour justifier nos choix et faire passer les messages, ce qui sera plus efficace qu’un grand discours. Lorsqu’on achète un produit de seconde main, on explique par exemple que c’est un bon moyen d’économiser la grande quantité d’eau nécessaire à sa fabrication, ce qui est important car les ressources de la terre ne sont pas inépuisables. Si l’on choisit un produit fabriqué localement, cela évite la pollution générée par un transport en bateau ou en avion et la multiplication des intermédiaires. On peut aussi amener les enfants à se questionner sur les conditions de fabrication des produits : dans certains pays, les enfants sont exploités et les travailleurs très mal payés...

Mettre en place des réflexes et proposer des alternatives

Sensibilisés à la composition des produits, leur provenance et leurs conditions de fabrication, les enfants vont développer certains réflexes, qui les aideront à devenir des consommateurs responsables et aguerris : privilégier les circuits courts, acheter et vendre d’occasion, lire les étiquettes des vêtements, jouets, aliments, produits de beauté et d’hygiène… À ce titre, certaines applications du type Yuka ou CompoScan aident à décrypter la composition des produits cosmétiques et/ou alimentaires. “Généralement, on peut leur dire que moins une étiquette est longue, mieux c’est, ajoute Marie Duboin. Selon leur sensibilité, ils peuvent aussi se fier aux labels, comme par exemple Écocert, Cosmébio, Vegan ou autres…

Et pourquoi ne pas fabriquer soi-même certains produits ménagers et cosmétiques ? L’occasion d’entrer un peu plus dans le détail de leur composition et de leur impact écologique, tout en partageant une activité ludique. Selon l’auteure : “Cuisiner en famille est aussi super important. C’est une transmission de savoir et une véritable opportunité de donner à son enfant le goût des bons produits.

Une bonne prévention aussi contre les plats tout prêts remplis d’additifs et de conservateurs… Les cadeaux peuvent aussi être traités différemment. “Depuis que je suis petite, j’ai toujours fabriqué des cadeaux avec des produits de récupération, pour les anniversaires, Noël…, explique Valentine, 11 ans. Les gens sont touchés car ils savent que j’y ai passé du temps, et cela me permet de réaliser des produits écologiques tout en faisant des économies.

Décrypter les influences multiples

Chez les ados, cette sensibilisation à la consommation responsable peut se corser. Si elle n’a pas été faite en amont, tout est rattrapable… Mais le problème principal est l’influence qu’ils subissent de toutes parts, sans en être forcément conscients : grandes marques, influenceurs, mais aussi amis dans la vraie vie et sur les réseaux sociaux… Aux parents de les aider à se rendre compte des manipulations dont ils sont la cible. Il ne faut pas non plus hésiter à les ramener à la réalité en leur rappelant que ce qu’ils voient sur les réseaux sociaux, n’est pas la vraie vie, et que l’envers du décor n’est peut-être pas doré… “On peut expliquer à son ado qu’il y a des placements de produits dans les séries, de la part des youtubeurs qu’il adore… Il faut l’aider à décrypter les ficelles du marketing qui poussent à surconsommer… S’il découvre qu’il est manipulé, ça le fera réfléchir. Les ados aiment bien remettre en question la norme.

J’ai beaucoup aimé le film The Truman Show, dans lequel les placements de produits sont tournés en dérision, témoigne Jules, 15 ans. Ça m’a aidé à prendre du recul par rapport aux placements de produits que l’on voit sur les réseaux sociaux, et à ne pas me laisser influencer, même si ce n’est pas toujours évident. On a vite fait d’associer la vie des gens qu’on aime bien aux produits qu’ils utilisent.” Avec un ado, il faut être stratégique.

Rien ne sert d’aller à la confrontation. On lui propose notre vision du monde, on lui explique nos choix, on donne l’exemple, on fait preuve de souplesse, on négocie… “Il ne faut pas que l’ado soit marginalisé. C’est son bien-être qui prime avant tout, prévient Marie Duboin. On ne cherche pas à le transformer en consommateur idéal tout de suite, on plante de petites graines qui germeront plus tard. C’est plus important de l’aider à s’accepter, à se sentir bien avec lui-même et avec les autres.” Et en ayant davantage confiance en eux, les jeunes seront d’autant plus armés face aux influences marketing diverses et variées.

Le bonheur n’est pas dans la consommation

Il est important de remettre les choses à leur juste place. Acheter, consommer, ce n’est pas ce qui rend heureux. Cela fait plaisir, certes, mais cette satisfaction immédiate est éphémère, et engendre le besoin de consommer à nouveau ! Penser que son enfant sera plus heureux s’il possède tel téléphone dernier cri ou telle veste à la mode est un leurre. Par ailleurs, on peut lui apprendre à être reconnaissant pour ce qu’il a déjà. Marie Duboin confirme : “Les crises sociales et économiques qui nous guettent, suite à la crise sanitaire, vont contraindre certains parents à aborder les problèmes de baisse de revenus ou encore de perte d’emploi avec leur enfant… Il s’agira bien sûr de le rassurer en lui expliquant que c’est un passage et que ce n’est pas catastrophique ; mais ce sera aussi l’occasion de faire le point sur ce qui est essentiel à nos yeux, ce dont on a besoin pour être heureux et que l’on peut développer dans notre vie, comme les relations, la solidarité, l’entraide… Aider l’enfant à réaliser tout ce qu’il a déjà va lui permettre de se rendre compte qu’il est privilégié, et diminuera son sentiment de frustration. Ce qui n’empêche pas d’avoir des envies!

On peut aussi faire confiance à la faculté d’adaptation des ados. “Quand j’ai expliqué à mes fils qu’on ne partirait que quelques jours pendant les vacances cet été, contrairement à ce que l’on a l’habitude de faire, j’ai été agréablement surprise par leurs réactions, raconte Anouck, mère de deux enfants de 12 et 15 ans. Ils ont compris que c’était une conséquence de la pandémie et ils n’ont pas râlé. Ils savent qu’ils ne seront pas les seuls dans ce cas. Pendant le confinement, ils se sont très bien habitués à vivre sans consommer, et à s’occuper sans faire des choses extraordinaires.” Un bénéfice secondaire de la crise sanitaire, pour apprendre en famille à consommer de façon responsable.

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