Parc de Miribel-Jonage : faut-il verbaliser les baigneurs ?

"Ils vont faire quoi ? Verbaliser chaque enfant qui se baigne en zone non-surveillée ?" Depuis la publication de la lettre du préfet de l'Hérault conseillant aux maires du littoral de verbaliser les vacanciers ne respectant pas les interdictions de baignade, l’efficacité de la proposition pour diminuer les noyades pose question, y compris autour du lac de Miribel-Jonage.

À l'instar de son homologue de l'Hérault, le préfet de Rhône-Alpes va-t-il, lui aussi, inciter à verbaliser les baigneurs qui s'ébattent en dehors des zones de baignade surveillée ? Pour l'instant, Jean-François Carenco ne souhaite pas s'exprimer sur le sujet qui soulève pourtant de nombreuses interrogations.

Les PV empêcheraient-ils les baigneurs de braver les règles de sécurité ? Ceux-ci changeraient-ils de comportement ? Lyon Capitale est allé à la rencontre des baigneurs du Grand Parc de Miribel Jonage pour comprendre leur motivation à s’installer en zone non-surveillée et connaitre leur avis quant à une possible verbalisation.

"S'isoler pour être au calme"

En ce mois d’août ensoleillé, les berges non-surveillées du lac des Eaux Bleues sont jonchées de serviettes, de pelles et de seaux malgré le signalement "baignade interdite". La plupart des baigneurs ne le remarquent même pas. "C'est interdit ici ? Je ne le savais même pas" s’étonne Saida. "Si on vient ici, c'est parce qu'on veut pêcher et qu'en zone surveillée ce n’est pas possible", explique son amie, Nicole, qui elle, avait bien vu le panneau blanc.

Outre la pêche, la recherche d'ombre et de tranquillité semble être une des raisons principales. "On s'isole parce qu'on veut être au calme, loin des chiens et des enfants des autres", indique Fati venue au parc avec sa bande de copines. En effet, pas facile d'accéder à leur "petit endroit super tranquille" en contrebas du chemin : hamac, siège pliable, pieds presque dans l'eau... leur après-midi loin de tout s'annonce des plus reposants.

Chacun ses responsabilités

Mais alors, que font-ils de l'interdiction ? "Chacun doit prendre ses responsabilités", estime Isabelle. Cette mère de famille profite de la fraîcheur du lac. "On reste conscient des dangers : mon mari est dans l'eau avec les enfants et moi je surveille de l'extérieur. On est toujours à l'affût", rajoute-t-elle. Un peu plus loin, Navy fait de même. Elle ne quitte pas des yeux sa fille de 6 ans : "je lui interdis d’aller plus loin que le bord, elle ne sait pas nager". Car les baigneurs semblent réalistes : "si c'est interdit c'est que c'est justifié. Je connais quelqu'un qui est mort ici, il est tombé dans un trou", raconte Nadia.

Des avis opposés

Quand vient la question de la verbalisation des baigneurs en infraction, deux écoles s'affrontent. "Des amendes pourquoi pas, mais il faudrait aller jusqu'au bout alors. Ce pourrait être un meilleur balisage et des patrouilles qui informent et sanctionnent tout le monde. J'irai sur les plages surveillées à la seule condition d’une amélioration", explique Isabelle.

Un point de vue loin d'être partagé par Saïda qui juge cette idée "complètement nulle". Une autre baigneuse, Karima, estime que ce n’est qu’une façon "de faire de l'argent". De toute manière, ce n’est pas sûr que cela fasse changer le comportement des gens selon Navy.

Une solution pas adaptée

Pour Jean-Luc Toussaint, responsable de la sécurité du parc, cette verbalisation est tout simplement impossible à mettre en œuvre. "Le parc fait 2 300 hectares, il est impensable de surveiller tout le monde. On fait de la prévention, on ne peut s'amuser à aller verbaliser les gens. Il y a des panneaux, ils savent que c'est à leurs risques et périls", estime-t-il.

Denis Chagny, directeur administratif et financier de la société qui gère l’ensemble du parc, partage le même avis. "Cela peut être utile, mais pas dans une configuration comme la nôtre où l’on a 10 km de berges. Ce serait bien trop difficile à imposer au public qui ne comprendrait pas". Pour lui, la solution serait plutôt d’agrandir les zones de surveillance, "mais le problème c’est que cela demande plus de personnel et plus de maitres-nageurs. Les mesures d’interdiction sont mises en place mais on ne peut pas aller contrôler tout le monde", déplore-t-il. "Notre rôle c’est plutôt de faire de la prévention". En effet, un atelier de mise en condition de sauvetage est donné tous les dimanches matins dans le parc.

Deux noyades en dehors des zones de baignade

Mais ce n’est pas suffisant pour Isabelle : "Il faudrait une présence humaine sur les plages, on ne voit jamais personne". Fati et sa bande de copines constatent la même chose : "Déjà qu'on ne voit ni de patrouille de prévention, ni de police, je ne vois pas comment ils feraient pour contrôler tout le monde". Depuis le début de la saison estivale, deux noyades ont eu lieu au Grand Parc de Miribel-Jonage, dont une mortelle. Les deux drames se sont déroulés en dehors des zones de baignade surveillées.

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