Nouvelles addictions : les "no-life" sont-ils fous ?

A l'heure où la plupart des Lyonnais pensent aux vacances, à la piscine, et au soleil ... 3% d'entre eux restent en tête à tête avec leur ordinateur. Passion ou pathologie ? Le préfet délégué pour l'égalité des chances de la région Rhône-Alpes, Alain Marc, lance une campagne de lutte et de prévention contre les addictions et met l'accent sur leurs nouvelles formes.

Dans le cadre de la mission nationale de lutte contre les addictions, le préfet délégué pour l'égalité des chances de Rhône-Alpes, Alain Marc, tire la sonnette d'alarme. Dans son collimateur, les nouveaux comportements addictifs : jeux de hasard, jeux vidéo et réseaux sociaux, désormais accessibles à tous et à tout moment grâce aux nouvelles technologies.

La population de ces "nouveaux addicts" est estimée à 3% des consommateurs par les associations d'assistance spécialisées. Cependant aucune enquête officielle n'a été menée à ce jour. Pour cause, la frontière entre un comportement normal et pathologique est beaucoup plus dure à diagnostiquer pour ces addictions 2.0 que pour les addictions plus classiques comme l'alcool, le tabac ou la drogue.

De manière générale, les comportements sont dits addictifs lorsque la relation de dépendance à l'égard du produit est tellement forte qu'elle entraine des troubles physiques et psychiques. Les formes d'addiction nouvelles, elles, n'impliquent pas d'addiction à une substance, mais plutôt au plaisir que l’espérance de gain ou de réussite va procurer.

Un phénomène en augmentation ?

Une étude menée par des organismes privés indique que 84% des Français penseraient qu'ils sont moins concentrés et moins productifs depuis qu'ils utilisent smartphones et réseaux sociaux.

Ces résultats inquiètent, mais pas autant que le phénomène d'isolement. "Le nombre de jeunes participants aux activités de groupe organisées par la ville baisse chaque année. Même lorsqu'ils viennent, ils nous disent qu'ils préfèreraient être devant leur ordinateur", témoigne Sonia Madoui, directrice du Service de la jeunesse et des sports d'Ecully. Or, c'est précisément au moment où la consommation du produit empiète sur les rapports que la personne entretient avec le monde extérieur que le comportement commence à être pathologique.

Un addictologue au centre LYADE à Lyon explique : "Les réseaux sociaux, de même que les jeux en ligne donnent au joueur un sentiment virtuel d’omnipotence et d'omniprésence qui peut masquer les avantages de la vie réelle. " Parmi les jeux qui poussent à l'isolement il cite World of Warcraft, mais précise que cela est encore plus grave avec les jeux d'argent.

Malgré tout, aucun suivi officiel et régulier ne donne l'évolution de ces nouvelles addictions dans la région. Toutefois, il apparaît beaucoup plus récurrent chez les jeunes de 11 à 25 ans. "Les changements psychologiques, affectifs et intellectuels rendent les adolescents particulièrement vulnérables aux addictions", explique le docteur Olivier Revol, Neuropsychiatre à l'Hôpital Neurologique de Bron. Rien d'étonnant donc, dans le fait que la campagne de lutte cible cette tranche d'âge en priorité.

L'isolement première phase de la dépression

D'autant qu'être un "nouvel addict" présente un risque autrement plus important que celui de passer pour un "no life". Les professionnels du monde médical associent cet isolement de la vie réelle (ou IRL pour Isolement in Real Life), à la première phase de la dépression nerveuse. Or, d'après le bilan de santé 2009 de la région Rhône-Alpes, le nombre de suicides liés à la dépression croit constamment depuis 10 ans. En particulier chez les 11-25 ans. Attention toutefois aux amalgames. Il serait faux de faire un pont direct entre addiction aux nouvelles technologies et suicide. En effet, ce bilan de santé régional ne distingue pas les différents facteurs qui conduisent à la dépression. D'ailleurs la typologie "nouveaux comportements addictifs" n'existe pas encore à l'Observatoire Régional de la Santé.

Michael Stora, psychologue clinicien, se veut plutôt rassurant : "Nos adolescents ont grandi avec la culture de l'écran. Les jeux en réseau peuvent parfois même favoriser la socialisation". La preuve en est que pour les joueurs, le sigle IRL ne signifie pas "Isolement in Real Life" mais "In Real Life". C'est le nom qu'ils ont décidé de donner ironiquement aux rencontres organisées entre eux dans "la vraie vie".

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