Écrivain et psychiatre au Vinatier, Emmanuel Venet vient de publier Manifeste pour une psychiatrie artisanale aux éditions Verdier. Il s’insurge contre le scientisme qui gagne une discipline devant pour lui être centrée sur le patient et non sur des protocoles et dénonce également les logiques économiques qui sous-tendent cette médecine à flux tendu. Le psychiatre évoque aussi une société qui accroît les souffrances psychiques et s’inquiète d’un confinement tentant “d’essentialiser” nos activités.
Emmanuel Venet : Oui, parce que dans la communauté médicale à laquelle j’appartiens, je fais partie des rares personnes à l’ouvrir. Une grande gueule, d’après moi, c’est quelqu’un qui peut dire librement et haut et fort le fond de sa pensée. Je me sens une grande gueule par rapport à ce que j’ai écrit dans mon dernier livre. Dans la vie, je ne suis pas un stentor qui pousse des coups de gueule régulièrement, mais là, il me semblait important de dire des choses. Dans la psychiatrie publique, beaucoup de gens pensent comme moi, mais ne sont pas en mesure de l’exprimer parce que leur statut est trop précaire. Je suis en fin de carrière et donc en situation de prendre ce risque. Je peux me faire le porte-voix de ceux qui ne peuvent tenir ces propos.
Qu’est-ce qui motive votre coup de gueule ?
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