COMMENT DES CHINOIS VIENNENT PILLER LYON MODE CITY

L'occasion pour les professionnels de réaliser de juteuses affaires, au risque de se faire copier leurs nouvelles collections.

Le premier salon mondial de la lingerie et du balnéaire n'est pas seulement un rendez-vous de négociants, fabricants et autres stylistes de la petite culotte et du soutien-gorge. Les contrefacteurs viennent aussi depuis plus de vingt ans faire leur marché. Les Chinois, plus gros pourvoyeurs de biens contrefaits toutes catégories (selon Interpol), sont parmi les plus assidus.
Les contrefacteurs du "plus grand atelier du monde" opèrent de deux manières : soit ils sont présents en tant qu'exposants pour écouler leurs modèles contrefaits, soit ils ont une accréditation de professionnel. Lors de la dernière édition, les organisateurs du salon ont intercepté, par jour, deux à trois visiteurs un peu trop curieux des nouveaux modèles. Ces contrefacteurs agissent surtout, appareil photo à la main, au "Forum Interfilière", là où sont présentés les tissus les plus tendances pour la saison suivante. Il est en effet beaucoup plus simple de copier un tissu qu'un modèle de nuisette ou de soutien-gorge. "Généralement, il s'agit de fabricant de tissu chinois qui n'exposent pas mais espionnent leurs concurrents, explique Anne-Lise Thauvin, responsable de la lutte contre la contrefaçon pour Lyon Mode City. On vide la mémoire de leur appareil. Mais il est délicat de les exclure tout de suite. En cas de récidive, on le fait sans hésiter".
Dans ce "Forum Interfilière", un règlement intérieur digne d'une prison a été édicté. Il est interdit de prendre des photos, de dessiner, de tirer les fils, de téléphoner et de passer trop de temps à regarder les modèles.
Pour les cas de contrefaçon avérés sur le salon, un bureau spéciale a été créé il y a six ans. Un huissier et un cabinet d'avocat aide les exposants copiés à porter plainte et à monter une procédure en justice. Sans que celle-ci généralement n'aboutisse (voir encadré). Le célèbre dentellier Olivier Noyon* témoigne : "il y a deux ans on a découvert sur un stand chinois, un de nos dessins. Nous avons tout de suite saisi le bureau. L'huissier a fait un constat. Mais il nous était difficile d'aller plus loin puisque l'exposant, un distributeur, renvoyait la responsabilité de la contrefaçon à une société du fin fond de la Chine. Nous n'avons donc pas poursuivi". A l'image du dentellier de Calais, les exposants sont sur les dents et s'apprêtent, une nouvelle fois, à faire la chasse aux photographes pirates. Daniel Perret, le patron de la ligne Millesia et Nina Ricci confie, dépité : "s'ils ne nous copient pas sur un salon, c'est un de nos agents qui leur vend nos nouveaux modèles..."

*Le groupe Noyon est le leader européen de la dentelle de lingerie. Ses principaux clients se nomment
La contrefaçon : une répression à géographie variable
La France dispose d'un arsenal répressif imposant. Une fois constatée, la contrefaçon peut être sanctionnée par une peine pouvant aller jusqu'à 3 ans de prison et 300 000 euros d'amende. Déposés à l'Institut National de Propriété Intellectuel, les marques mais aussi les modèles et les dessins sont protégés. Problème cependant : la contrefaçon provient essentiellement de Chine qui ne protège convenablement que les productions largement écoulées sur son sol. "Et encore, précise Marc-Antoine Jamet, président de l'Union des fabricants pour la protection internationale de la propriété intellectuelle, les procédures sont souvent longues et aléatoires. Si en plus le contrefacteur est installé dans une région reculée, on ne peut quasiment rien faire".

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