Le roman-feuilleton de l’affaire

20 avril 1998 : Le PS propose un amendement pour supprimer l’appartement de fonction du président de la Région, Charles Millon, sans savoir qu’il a été attribué illégalement. Les élus FN ne le votent pas, alors que Gollnisch avait justement fait campagne en dénonçant cet avantage. Le Progrès se moque des lepénistes qui “ne savent décidément pas quoi faire pour être gentils avec leur nouveau pote Charles Millon”.

13 mai 1998 : Étienne Tête révèle dans Lyon Capitale que l’appartement de fonction du 17 rue de la Charité (Lyon 2e), dont Charles Millon bénéficie, a été attribué illégalement. L’élu écologiste a levé ce lièvre en recherchant des moyens de faire “tomber” celui qui vient d’être réélu président de la Région grâce au soutien des élus FN. L’avantage en nature dépasse le million de francs. “Dans quelle mesure sa situation très confortable de vie à Lyon ne l’a pas poussé à rester président à tout prix, même avec les voix du FN ?” s’interroge Tête, qui attaque devant le tribunal administratif et fait un signalement au préfet, afin que ce dernier en informe le Parquet.

Août 1998 : Charles Millon quitte discrètement son appartement, faisant ainsi démarrer le délai de prescription de trois ans.

24 janvier 2001 : Une nouvelle enquête de Lyon Capitale révèle, à nouveau grâce à la sagacité d’Étienne Tête, que Charles Millon n’a pas seulement fait payer par la Région le loyer de son luxueux appartement (7500 francs mensuels, plus 50 000 francs de travaux). La collectivité a payé aussi toutes les charges et les factures d’eau, d’électricité, de gaz et de téléphone pour un total supérieur à 1,5 million de francs (229 000 euros).

Mais Charles Millon s’est aussi fait accorder, dans la plus totale discrétion, de très conséquent “frais de personnel”. Le président a ainsi pu disposer chez lui d’un personnel de service à temps plein (170 heures par mois en moyenne) entre 1989 et 1998. Montant de la facture : 2,2 millions de francs (335 000 euros).

30 mars 2001 : Libération s’empare de l’affaire et révèle une clause curieuse du bail du logement de fonction de Charles Millon : “En cas de congé de la Région, celle-ci est “autorisée à céder l’appartement exclusivement à monsieur Charles Millon”. Notre confrère Olivier Bertrand conclut : “Il peut perdre son mandat, pas son logement de fonction.

26 juin 2001 : Le tribunal administratif estime illégale l’attribution du logement de fonction. Entre les loyers et les autres avantages en nature, le montant à rembourser par Charles Millon est estimé à
1,5 million de francs. Millon entame alors une “guérilla” juridique dont le premier épisode se termine devant le Conseil d’État le 27 juillet 2005. Verdict : le logement était bien illégal.

3 octobre 2002 : Étienne Tête porte l’affaire au pénal au nom de la Région Rhône-Alpes. Il dépose plainte avec constitution de partie civile, notamment pour “prise illégale d’intérêt”.

18 décembre 2002 : Le juge d’instruction rend une ordonnance de refus d’informer, estimant l’affaire prescrite. La Chambre criminelle de la Cour de Cassation relancera l’affaire le 3 décembre 2003 en jugeant que la prescription a été suspendue par la demande d’autorisation de se porter partie civile faite au Conseil d’État par Étienne Tête le 6 février 2001.

26 août 2003 : La région Rhône-Alpes, alors présidée par Anne-Marie Comparini (UDF), émet deux “titres de perception”, afin que Charles Millon rembourse ses avantages “indûment perçus”. À savoir : 234 206,84 euros pour le logement de fonction.
Et 91 904,01 euros pour le personnel de maison. Charles Millon attaque cette décision. Mais il commence assez rapidement à rembourser et, selon la Région, a “intégralement remboursé les 326 000 euros qu’il devait” avant l’échéance, fixée à mars 2009.

27 mai 2004 : Le Monde révèle que Charles Millon n’a pas seulement été logé et servi aux frais de la Région, mais qu’il a aussi été meublé ! “Appliques Louis XV, table basse, portrait, gravure, fauteuil Régence, vases, cache-pots... La Région a fourni à la famille Millon jusqu’aux cendriers” relève notre consœur Sophie Landrin. Montant de la facture : 30 490 euros. Constatant que ce mobilier dormait dans un garde-meuble payé 9600 euros par an depuis six ans et le départ précipité de Charles Millon de son appartement, le nouveau président de la Région, Jean-Jack Queyranne (PS), décide de tout mettre en vente. D’après la Région, la vente s’est terminée en février 2005 et n’a permis de récupérer que 5084,15 euros.

8 avril 2005 : Nomination d’un juge d’instruction. Le 13 juillet 2005 le Procureur requiert de poursuivre l’information du chef de “prise illégale d’intérêts par personne investie d’un mandat électif” pour la période 1995-1998.

26 avril 2007 : La Chambre de l’instruction de la Cour d’appel de Lyon précise que la période non prescrite se limite à trois mois, entre le 12 avril 1998 et juillet 1998, date de la dernière facture. La Cour de cassation rejette le renvoi fait par Millon le 9 janvier 2008.

8 avril 2008 : La Cour administrative d’appel de Lyon confirme le rejet du recours de Charles Millon contre les “titres de perception” émis par la Région. Millon se pourvoit en Cassation (en attente de jugement).

5 janvier 2009 : Le juge d’instruction rend une ordonnance de non lieu. Le Parquet fait appel devant la Chambre d’instruction de la Cour, qui infirme cette ordonnance et renvoi Charles Millon devant le tribunal correctionnel de Lyon pour “prise illégale d’intérêt par personne investie d’un mandat électif public”.

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