Roger Gonnet, haut gradé de la Scientologie, apostat et repenti

Huit ans plus tard, l'organisation le déclarait "suppressif", c'est-à-dire traître et ennemi à abattre. (Article paru dans le numéro de Juin de Lyon Capitale. Retrouvez-y un dossier complet sur les dérives sectaires)

"J'étais OT 7, NOTs". Comprenez l'un des plus hauts grades de l'Eglise de Scientologie. Un operating thetan, dans le jargon, celui qui est "cause de vie" et maîtrise la matière, l'énergie, le temps et la pensée. Tout un programme. Roger Gonnet préside alors le Centre de dianétique de Neuville-sur-Saône.

Premier édifice scientologue hors Paris, le centre fut créé par Roger Gonnet, après avoir été initié aux écrits du gourou par un oncle convaincu : "je m'intéressais pas mal à Freud et Young à l'époque. Le best-seller de Hubbard, La Dianétique, parlait psychologie sous un angle nouveau. J'ai trouvé ça bien". Ils suivent des programmes, dépensent plus de 70 000 euros. La manipulation est en marche. Ils décident de passer à la vitesse supérieure. Ni une ni deux, il audite sa femme avec la technique de l'électromètre. Ils ont la trentaine et sont emballés. "Certains cours de communication et de pédagogie ne sont pas bêtes et permettent de faire des progrès" reconnaît-il encore aujourd'hui. Il décide d'en faire ses choux gras. C'est un succès, bien qu'il ne soit payé que l'équivalent du Smic.
Un président de fac' à la Sciento
Dans la villa beaujolaise de 900 m2, un demi-millier de personnes vient "étudier", "du simple paysan au pdg, en passant par des professions libérales et même un ancien directeur de fac de Lyon". En quelques années, les recettes dépassent les 2 millions de francs (300 000 euros). La moitié est reversée au siège. "En tant que directeur de centre, on m'a enseigné les techniques pour aborder les gens, comment utiliser les tests de personnalité truqués, l'électromètre, comment dilapider les adeptes, etc.". Au bout d'un temps, c'est la suspicion. "J'ai commencé à douter des cours, à prendre peur des méthodes hubbardiennes, complètement totalitaires et paranoïaques. Tout était instrumentalisé, on détournait les techniques pour mettre les adeptes en situation d'infériorité. Et puis le prix des cours avaient été multipliés par 10. C'était du grand n'importe quoi !". Alors, Roger Gonnet décide d'en informer les hautes instances.

Volé, ruiné, humilié et "tué"
Il est convoqué à Copenhague, le siège européen de la secte. On ne rigole plus : l'adepte, qui plus est haut gradé, conteste.

Pendant ce temps, en France, des scientologues pillent la villa de Neuville... Et commencent le déménagement pour la place des Capucins. En dix jours, Roger Gonnet et sa femme ont tout perdu. En 82, il est déclaré SP, suppressive person, le pire opprobre pour un scientologue ; condamné à mort pour les trillons d'années à venir (en scientologie, on ne fait jamais les choses à moitié !).

Roger Gonnet ne se contente pas de faire son mea culpa : retiré à la campagne, dans une petite bicoque près du lac des Sapins, il passe les trois quarts de l'année devant ses ordinateurs, entouré de livres aux couvertures ésotériques, de murs de dossiers, à décortiquer sur son site les rouages de cette "immense escroquerie et machine à tuer"*. "J'en fais un combat personnel, assène-il. Le XXIe siècle pourrait être scientologue si on laissait faire".
A lire : La Secte, secte armée pour la guerre. Chronique d'une "religion" commerciale à responsabilité illimitée (Alban Editions), de Roger Gonnet.

Notre dossier complet sur la Scientologie en cliquant ici lien

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