@Karine Proriol

Comment Silk in Lyon ressuscite la filière de la soie

L'étoffe de luxe qui fait la renommée de Lyon depuis François 1er est à l'honneur du 21 au 24 novembre, au Palais de la Bourse. Témoin de la bonne santé de la filière.

La deuxième édition de Silk in Lyon, le festival de la soie, s'ouvre ce jeudi à 14h00 au Palais de la Bourse pour quatre jours. Union soyeuse des historiques Marché des Soies et Label Soie, l'événement grand public donne l'occasion de découvrir la soie de l'intérieur, cette étoffe qui a fait la réputation et la prospérité de Lyon pendant près de 350 ans sans discontinuité et est à l'origine du décollage économique du territoire.

Née à Lyon en 1537 sous l'impulsion François 1er, la soie est cinq siècles plus tard est en passe de redonner à la ville ses lettres de noblesse, les entreprises ayant su se renouveler grâce à un savoir-faire séculaire et de multiples innovations technologiques. Quant aux Lyonnais, ils se réapproprient la fierté d'une histoire ancestrale locale.

Lyon, au cœur d'un centre économique

1453. La Guerre de Cent Ans est terminée, à tout le moins, les combats sur le continent entre Français et Anglais ont pris fin. Le royaume de France est restauré. Lyon, qui a rejoint la couronne un tout petit siècle et demi plus tôt, se retrouve au centre d'un nouvel et immense espace économique, profondément modifié par les conflits. Les quatre foires franches annuelles (qui comptent soixante jours au total) participent de manière fantastique à sa prospérité.

Dès 1466, Louis XI ambitionne de faire Lyon le centre de la fabrication de soie du royaume, la noblesse étant très friande de ce tissu acheté à prix d'or aux marchands étrangers, principalement italiens. Le roi compte bien mettre fin au déficit commercial de 500 000 écus annuels causé par l'importation de la soie. Ce sera un échec, les bourgeois lyonnais ne souhaitant pas se mettre à dos les Italiens qui alimentent grandement leurs commerces et leurs activités bancaires.

Ce n'est que soixante-dix ans plus tard, que le tissage de la soie commence à Lyon. En 1537, par lettres patentes, François 1er autorise les négociants piémontais Étienne Turquet et Barthélémy Naris à tisser des étoffes d'or, d'argent et de soie. En 1540,le conseil de la ville de Lyon permet aux soyeux d’appartenir aux corps de métier reconnus.

Dans ces années là, entre 800 et 1 000 personnes vivent du tissage à Lyon. Au XVIe siècle, Colbert structure la production manufacturière qui encadre l'activité de la Grande Fabrique de Soie, regroupant maîtres tisseurs (canuts), marchands-fabricants (soyeux) et tous les métiers touchant à la production de soie. En 1788, Lyon compte plus de 14 000 métiers à tisser en soie et près de 6 000 ateliers, occupant plus de 30 000 tisserands et 30 000 employés, soit 40% de la population lyonnaise. La soierie lyonnaise est alors réputée dans toute l'Europe, notamment grâce aux améliorations techniques apportées par un ouvrier en soie, Claude Dangon (qui sera auréolé du titre de "maître ouvrier du Roi"), qui développe les "métiers à grande tire" qui permettent de réaliser des pièces de soie dans lesquels des dessins tissés sont insérés (des façonnés).

Capitale mondiale de la soie

Lyon est alors l'incontestée capitale mondiale, à tout le moins européenne, de la soie. Ce métier sera utilisé jusqu’en 1820, puis sera remplacé par le métier Jacquard. Quant au ver à soie, il est alors élevé dans des magnaneries du Midi de la France (bâtiments destinés à l’élevage des vers à soie ; conseiller d'Henri IV avait fait planter des milliers de plants de mûriers dans le Midi de la Francequi assurent une grande partie de la production de soie pour Lyon). Arrive la Révolution qui plonge la soierie lyonnaise dans une crise importante : le nombre de métiers à tisser est divisé par deux et celui des professions par quatre. Napoléon 1er relance l'activité grâce à une série de commandes impériales (pour deux millions de francs). Parallèlement à son expansion, l’industrie textile connaît de profonds bouleversements comme les grèves et insurrections de 1831 et 1834 ; les ouvriers mal payés, exploités, se révoltent pour défendre leurs intérêts. Les émeutes sont chaque fois violemment réprimées.

Au cours des années 1840 à 1890, la soie représente 75% de l’activité économique de la ville. Lyon occupe alors la première place aux Expositions universelles. Au 20ème siècle, le déclin sera rapide, malgré quelques brèves périodes de prospérité en 1919, 1920 et 1950. L'arrivée des textiles industriels aura raison de la production lyonnaise.

Malgré tout, Lyon reste le centre névralgique de la filière soie française. Sa force est de rassembler l'ensemble des métiers de la filière, de la conception à la distribution. Quelques manufactures prestigieuses, comme les maisons Tassinari et Chatel (1680), Prelle (1752), Guigou (1826), Sfate & Combier (1850), Bianchini-Férier (1888), aujourd'hui propriété de Brochier Soieries (1890), Malfroy et Million (1939) sont encore en activité.

PRATIQUE
Quand ? Du 21 au 24 novembre
Où ? Palais de la Bourse
3, place de la Bourse
Lyon 2e
A quel prix ? 5€ l'entrée (4,5€ en ligne) par jour; Pass Soie : 10€ (9€ en ligne)

"Tous les Lyonnais ont un lien avec la soie"

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