Laurent Wauquiez 10.16 région 2
© Tim Douet

Wauquiez : 13 ans de droits à la retraite pour un poste occupé 2 mois

Laurent Wauquiez a de nouveau été placé en détachement de son poste au sein du Conseil d’État, le 4 septembre. Lyon Capitale s’est interrogé sur la légalité de cette pratique, qui permet à des fonctionnaires élus de cumuler points de retraite et avancement pour des postes qu’ils n’occupent pas.

"Monsieur Laurent Wauquiez est placé en position de détachement pour une durée de cinq ans." Un arrêté daté du 4 septembre 2017 stipule que, comme depuis 2004 et sa première élection en tant que député de la Haute-Loire, Laurent Wauquiez restera en détachement du Conseil d'État jusqu'au 19 juin 2022. Une position qui lui permet, parallèlement à sa carrière politique, de conserver son avancement et de cumuler des points de retraite en tant que maître des requêtes. Alors même qu'il n'a pas mis les pieds au Palais-Royal depuis plus de treize ans. Et qu'il n'a occupé ce poste que deux mois.

"Placards dorés"

Major de la promotion Nelson-Mandela de l'ENA, Laurent Wauquiez a commencé sa carrière en tant que fonctionnaire au sein du Conseil d'État. Il s'est rendu rue Saint-Honoré pendant trois ans à partir du 1er avril 2001 et sa nomination comme auditeur de seconde classe. Promu maître des requêtes le 1er avril 2004, il ne restera à ce poste que deux mois. Le 14 juin de la même année, il est mis en disponibilité pour convenances personnelles "afin de se consacrer à la campagne électorale en vue d'une élection législative partielle", indique l'arrêté de l'époque.

Sitôt élu, Laurent Wauquiez passe de la position de disponibilité à celle de détachement, bien plus avantageuse puisque "les fonctionnaires détachés conservent leurs droits à avancement et à la retraite", a précisé le Conseil d'État à Lyon Capitale. Seules les promotions de grade sont bloquées. Depuis 2004, Laurent Wauquiez n'a plus jamais occupé le poste de maître des requêtes, mais il continue de bénéficier des droits qu'il procure. "Les élus issus de la fonction publique sont favorisés par rapport à ceux issus du privé, glisse Jean-Christophe Picard, de l'association Anticor. On se rend compte que les carrières des élus dans la fonction publique s'apparentent à des placards dorés".

Pas concerné par la loi Cahuzac

Lyon Capitale a voulu vérifier la légalité de cette pratique. Depuis 2014, la loi Cahuzac de moralisation de la vie politique oblige les parlementaires et les ministres à se mettre en disponibilité, et non plus en détachement, de leurs postes de fonctionnaires - "en position de disponibilité ou dans la position équivalente prévue par son statut ne lui permettant pas d'acquérir de droits à l'avancement et de droits à pension", dit l'article 24. Mais la loi ne s'applique qu'aux ministres et aux parlementaires "à compter du premier renouvellement de l'assemblée (...) suivant le 31 mars 2017". Laurent Wauquiez n'était donc pas concerné en tant que député de la Haute-Loire au cours de la dernière législature.

Aujourd'hui, en tant que président du conseil régional d'Auvergne-Rhône-Alpes, il n'est plus légalement obligé d'adopter ce statut de disponibilité et peut rester en détachement. Reste que, d'un point de vue moral, ce genre de pratique a désormais du mal à passer. On se souvient du tollé qu'avaient provoqué les révélations de Marianne en 2014 sur la situation de François Hollande, alors en détachement de la Cour des comptes depuis plus de trente ans. En tant que président de la République, lui non plus n'était pas touché par les obligations prévues par la loi Cahuzac. La droite ne s'était d'ailleurs pas privée de critiquer la situation de l'ex-chef de l'État.

Bruno Le Maire, alors dans le même parti que Laurent Wauquiez (l’UMP), avait en 2012 précédé le législateur en démissionnant de la fonction publique. "Le statut d'élu doit être incompatible avec le maintien dans la fonction publique, c'est une question d'équité", confiait-il alors. Il avait été imité trois ans plus tard par Nathalie Kosciusko-Morizet. Depuis, Bruno Le Maire incite régulièrement les politiques à démissionner de la fonction publique. Notamment Emmanuel Macron, qui a pris cette décision fin 2016, le jour de sa déclaration de candidature à la présidence de la République. Laurent Wauquiez y a toujours été opposé.

Contacté, l'entourage de Laurent Wauquiez s'est refusé à toute réaction.

Lire aussi : Laurent Wauquiez réagit à l'article de Lyon Capitale

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