L’heure bleue de Juliette Parisot

“Du bleu”, nous propose la galerie Artae. Parmi les glorieux emblèmes – Claude et Pierre Buraglio, Sarkis – qui assurent mais radotent quelque peu, la découverte a pour nom : Juliette Parisot, photographe.

Déjà, à la Renaissance, les peintres venaient chercher les pigments de l’indigotier dans le sud du Maroc, où le land-artiste belge Jean Vérame a ainsi repeint les rochers de Tafraout. Anish Kapoor – dont une œuvre est actuellement présentée au MAC de Lyon – nous a plongés dans le bleu profond de ses sculptures, fortement suivi par le peintre Paul Raguenes, installé vers Pélussin et ici présent avec des sculptures très “don-juddiennes”. Enfin, bien sûr, Yves Klein a breveté son fameux International Klein Blue (IKB) pour nous mener au cœur de la contemplation.

Dans l’exposition intitulée “Du bleu”, à la galerie Artae, figurent de glorieux emblèmes, tels Claude et Pierre Buraglio – à qui est offerte parallèlement une “Carte blanche” à l’IUFM-Confluence(s) contre une carte… bleue ici –, ainsi que Sarkis. Tous trois assurent mais radotent quelque peu. Juliette Parisot propose ses photographies. Au Maroc, elle n’a pas photographié l’indigo, mais Tanger. Elle cite Klein : “Le bleu n’a pas de dimension, il est hors dimension.” Elle intitule son travail L’Heure bleue.

L’heure de Juliette

Née à Lyon en 1986 (27 ans donc), Juliette Parisot a suivi des études de photographie – ni à Arles ni à l’ENS Louis-Lumière mais à l’école privée parisienne Icart. C’est ici l’une de ses premières expositions mais les Lyonnais ont pu l’apercevoir pour les Nuits sonores avant de la retrouver fin juin à la Biennale d’art contemporain de Nîmes dont le thème sera “Dehors et de rêves”.

Son Heure bleue propose une série d’instants singuliers, des moments d’arrêt dans la tourmente du temps et de la vie qui courent éperdument. La succession des jours, des fins de jour. Quand le bleu du ciel s’éteint, va basculer dans l’obscurité totale puis la disparition ; parfois traversé par un nuage. Ce “concept” veut donc rendre la matérialité impossible – invisible ? – de l’impalpable, qu’un appareil photo poussé à sa sensibilité maximum va pourtant devoir fixer. Seul ou enveloppe d’une ville, ce ciel devient matière, texture, couleur, lumière finissante sinon monochrome. Le rendu, qu’aucune reproduction de la photo ne pourra transmettre, est magnifié par le grain épais, très pictural, du support Dibond. Quelque chose vient sourdre, murmurer, s’inscrire avant de se taire ; tout en nuances, douceur et sensualité, bien ailleurs qu’un simple minimalisme. Isolée ou en polyptique, chaque image vit autonome ; à la fois tableau et fresque, toujours photographie. Sur un thème pourtant sassé et ressassé, à mi-voix et avec volupté, Juliette Parisot fait entendre sa singularité.

On pourra regretter la “monstration” – comme on dit aujourd’hui – quelque peu momifiée de la galerie. Rien ne dépasse, rien d’un peu bizarre, aucun fou artistique. Bref, très pro, mais rien de libre à l’ère de la pensée artistique unique. Presque un choc, alors, que ce superbe travail sans bleu à l’âme, de Juliette Parisot, et ses intentions à suivre, des rêves à venir au moment de la nuit ; au-delà d’une esthétique revendiquée.

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Du bleu. Du 31 mai au 9 juin, à la galerie Artae, 11 rue Aimé-Collomb (Lyon 3e).

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