Faut-il surtaxer les cigarettes des fumeurs malades ?

"Bien pire que le Médiator : le tabac", dans un billet du 6 février 2011, Jacques Attali plaide pour une interdiction totale du tabac en France, comparant ses méfaits à celui du médicament tristement célèbre. A l'heure où les paquets de cigarettes arborent désormais des photos censées choquer le consommateur, l'association SOS Tabac propose une solution radicale : la mise en place de distributeurs automatiques ne délivrant qu'un seul paquet par jour et dont les prix seraient indexés sur l'état de santé du fumeur.

Alors que des Lyonnais lancent la commercialisation d'étuis de paquets de cigarettes à petit prix, Jean-Pierre Marguaritte président de SOS Tabac n'est pas surpris : "les solutions mises en place par le gouvernement sont toutes contournables. Pour l'interdiction des mineurs, il suffit au jeune d'envoyer un adulte, les images choquantes sur les paquets seront cachées par les consommateurs, quant aux hausses du prix du tabac, elles ont de moins en moins d'impact, il faut mettre en place des solutions radicales pour inciter les gens à arrêter de fumer". Par ailleurs, toujours selon l'association, la loi Evin ne serait pas respectée par certaines campagnes de publicité qui poussent les consommateurs à se rendre dans les bureaux de tabac : "la Française des Jeux, et le PMU incitent les citoyens à pénétrer dans ces lieux; si nous portons plainte, les buralistes devront choisir entre vendre des jeux à gratter ou des cigarettes".

Des distributeurs intelligents

Ainsi lors d'une rencontre avec le docteur Loïc Josseran, conseiller technique du secrétariat d'état chargé de la santé, l'association a proposé une nouvelle méthode de distribution du tabac censée aider les consommateurs à arrêter de fumer. Dès lors, SOS Tabac milite pour la mise en place de distributeurs automatiques de cigarettes dans un espace réservé chez les débitants de tabac. Premier volet de l'idée, les paquets de cigarettes ne pourraient être achetés que par carte bleue, évitant ainsi aux mineurs de pouvoir se servir, tandis que les machines ne seraient en mesure de ne délivrer qu'un seul paquet par jour, par acheteur. Néanmoins, cette formule déjà utilisée dans des pays comme l'Allemagne* serait complétée par la mise en place d'une surtaxe variable indexée sur l'état de santé du fumeur. Ce dernier serait gardé en mémoire dans une seconde carte à puce, délivrée uniquement par les pharmaciens, sur présentation d'un certificat médical, attestant la présence ou non d'éventuels problèmes de santé ou situations à risques tels que le diabète, l’hypertension, le cholestérol, un cancer ou une grossesse.

Les pharmaciens au centre des enjeux

Si un tel système était mis en place, les pharmaciens deviendraient alors un élément incontournable. L'association espère ainsi que ces derniers inciteront les fumeurs à cesser ou à ralentir leur consommation tout en les orientant vers des aides aux sevrages qu'ils commercialisent depuis de nombreuses années. Par conséquent, suivant les informations du certificat médical, les pharmaciens auront le pouvoir de classer le fumeur dans une catégorie prédéfinie, l'obligeant ainsi à payer ses cigarettes plus ou moins chères suivant les risques sanitaires qu'il encourt. Selon, SOS Tabac, "ce système de taxation-responsabilisant ferait supporter aux fumeurs les dépenses de santé qu'ils génèrent et pas seulement les non-fumeurs […] 70 % des non-fumeurs supportent financièrement les dépenses de santé liées au tabagisme et à ses conséquences, estimées par certains experts à 10 milliards d'euros, soit un tiers du déficit de la branche maladie de la Sécurité Sociale".

Une approche globale

L'acquisition des distributeurs intelligents serait à la charge des débitants de tabac, qui conserveraient leurs marges, tout en "réemployant son temps libéré à d'autres offres de services", toujours selon SOS Tabac. De plus les machines pourront distribuer des bons de réduction valables sur les aides ou substituts pour arrêter de fumer, inscrivant ainsi le projet dans une approche globale. Jean-Pierre Marguaritte regrette que les prix de ces derniers soient encore trop élevés, tandis que le remboursement de l’Assurance Maladie, à hauteur de cinquante euros par an, demeure pour lui insuffisant : "l'augmentation espérée du volume de vente des médicaments d'aide au sevrage tabagique permettrait de demander un effort à l'Industrie pharmaceutique qui réduirait leurs prix de façon à les rendre financièrement plus accessibles". Enfin l'association estime que la mesure ne pourrait fonctionner que si les pays limitrophes décidaient de mettre en place des systèmes identiques, évitant ainsi que les fumeurs traversent la frontière pour leurs achats. Néanmoins, en ces temps électoraux, il n'est point sûr que le gouvernement donne suite à ces propositions qui ne manqueront pas de lancer le débat.

* Les distributeurs allemands sont déjà en mesure de connaitre l'âge de l'acheteur et refusent de délivrer un paquet si ce dernier à moins de 16 ans.

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