Montage LC Hubert Julien-Laferrière et Thomas Gassilloud
© Tim Douet

Verrou de Bercy : les députés LREM du Rhône se justifient

Alors que six groupes politiques habituellement opposés s’étaient mis d’accord sur sa modification, les députés LREM ont fait bloc ce mardi pour conserver intact le “verrou de Bercy”. Ils sont parvenus de justesse à faire rejeter l’amendement visant à modifier cette vieille prérogative du ministre du Budget. Explications d’Hubert Julien-Laferrière et Thomas Gassilloud.

Alors qu'une première tentative de suppression pure et simple avait été balayée, le Sénat avait transmis à l'Assemblée nationale un amendement qui visait à modifier partiellement le verrou de Bercy. L'attente d'une modification de ce dispositif était telle que des députés de tous les bancs ont soutenu l'amendement. Une situation assez rare pour que certains d'entre eux reconnaissent là un véritable "fait politique". Pourtant, le groupe de la majorité a pesé de tout son poids pour rejeter le texte et y est parvenu, à seulement 20 voix près.

Le verrou de Bercy est un dispositif qui date de 1920. Il désigne le monopole du ministre du Budget sur les décisions de poursuites judiciaires en matière de fraude fiscale. Concrètement, cela signifie que le ministère de l'Économie et des Finances est le seul à pouvoir décider (avec la commission des infractions financières) d'engager des poursuites pénales, ou non, dans les cas de fraude fiscale. Le dispositif faisait partie de ces vieilles spécificités françaises oubliées des parlementaires, jusqu'à ce que l'affaire Cahuzac et les Panama Papers en révèlent les failles. De plus, il est particulièrement critiqué puisqu'il revient sur le principe de séparation des pouvoirs, mais aussi sur l'égalité des citoyens devant la justice.

“La transparence peut être un frein à l’efficacité”

Ce blocage de la majorité surprend après une campagne présidentielle d'Emmanuel Macron largement fondée sur la transparence et la fin des privilèges des élus. Alors, pour défendre leur vote, nul autre choix pour certains députés que de revenir sur certaines promesses de campagne. Pour Thomas Gassilloud, député LREM du Rhône, qui a voté contre l'amendement, "le principal souci, c'est de conserver une efficacité en matière de fraude fiscale”. “Je ne suis pas pour la transparence à tout prix, nous a-t-il déclaré. Elle peut parfois être un frein à l'efficacité." L'élu insiste : "J'attends qu'on me prouve que l'on sera plus efficace sans le verrou qu'avec." En effet, selon les députés ayant rejeté l'amendement, le droit commun serait moins efficace que la négociation pour juger certaines affaires de fraude fiscale.

Une première fronde dans la majorité présidentielle ?

Autre argument qui revient dans la bouche des parlementaires de la majorité, celui de ne pas se précipiter. "Il faut se donner le temps de la réflexion, ne pas céder à la précipitation", insiste ainsi Hubert Julien-Laferrière, lui aussi député LREM du Rhône. Alors que de nombreux travaux avaient déjà été conduits sur le sujet, il a finalement été décidé de créer une mission d'évaluation qui devra rendre son avis à la fin de l'année. Un délai insupportable pour l'opposition, qui voit là une volonté du Gouvernement de gagner du temps. Pourtant, Hubert Julien-Laferrière l'assure, "la mission d'information n'est pas là pour enterrer le sujet”. “Je suis convaincu que nous viendrons à modifier le verrou de Bercy", a-t-il affirmé à Lyon Capitale.

Aussi, malgré le barrage en force des députés LREM, il semblerait que la machine soudée du début de mandat connaisse ses premières divisions. En effet, 30 députés MoDem ont voté pour faire sauter le verrou. De plus, 12 députés LREM ont également soutenu l'amendement face à leurs collègues du parti, et 12 d'entre eux se sont abstenus. Sur 351 députés LREM au total, la fronde est minime, mais notable pour un parti qui a toujours dit vouloir régler ses désaccords en interne.

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