Najat

Najat Vallaud-Belkacem, porte-parole et ministre

PORTRAIT - La Lyonnaise décroche le ministère des Droits des femmes et le porte-parolat du gouvernement. Une distinction dont elle "avait vraiment envie" et qui honore une carrière-éclair, qui a réellement débuté en 2004. Lancée par Gérard Collomb, propulsée par Ségolène Royal, Najat Vallaud-Belkacem a réussi à se faire élire sous son propre nom en 2008, aux cantonales.

Porte-parole elle avait été, porte-parole elle était, porte-parole elle restera. Najat Vallaud-Belkacem a été nommée ce mercredi à ce poste au sein du nouveau gouvernement, après l'avoir été lors des campagnes de Ségolène Royal en 2007 puis de François Hollande en 2012. Une mission qui lui sied à merveille : au cours de sa carrière, la télégénique Lyonnaise a plutôt réussi à éviter les dérapages verbaux et les chausse-trappes, peinant cependant à développer une expression singulière – lors d'un débat, en 2007, Roselyne Bachelot avait brocardé "sa langue de bois" en dépit de son jeune âge. Najat Vallaud-Belkacem décroche aussi un ministère de plein exercice : les droits des femmes. "La voici à l'épreuve du feu au plus haut niveau", se réjouit Jean-Jack Queyranne, qui se proclame comme "son 2e père" après Gérard Collomb.

Deux pères : Collomb et Queyranne

Née en 1977 dans le Rif marocain, Najat Vallaud-Belkacem est arrivée en France, dans la banlieue d'Amiens, en 1982. Cette fille d'immigrés réussit un parcours scolaire exemplaire qui la conduit à Sciences Po. Elle y fait deux rencontres déterminantes pour sa carrière politique et sa vie de femme : son futur époux, Boris Vallaud, qui lui donnera deux jumeaux, et Caroline Collomb qui la présente à son maire de mari. La Franco-Marocaine rate l'entrée à l'ENA mais sa copine l'introduit au cabinet du maire de Lyon. Elle s'y distingue par sa discrétion. C'est en 2004 qu'elle se lance en politique, sous le patronage de Jean-Jack Queyranne qui cherche à faire monter de nouvelles femmes, parité oblige. Queyranne gagne la Région : elle décroche la présidence de la commission culture. Elle est encore trop verte pour une vice-présidence, mais devient plus tard conseillère régionale déléguée.

Najat ()

"L'adjointe au 8 décembre"

À cette époque, elle est déjà repérée par les instances nationale du PS, en mal de nouveaux visages. En 2007, présentée à Ségolène Royal par Gérard Collomb, elle devient l'une de ses porte-parole, ce qui fait d'elle le pendant de gauche de Rachida Dati, laquelle est davantage rompue à l'art télévisuel. "Elle a une capacité à apprendre très vite", souligne toutefois Richard Llung, adjoint à Villeurbanne, qui faisait aussi partie de l'équipe de la candidate socialiste. La présidentielle perdue, Najat Vallaud-Belkacem se concentre sur sa carrière : elle défie Dominique Perben dans la 4e circonscription du Rhône, un bastion de droite où elle n'a rien à perdre. Elle y est imposée par le parti, qui désigne cette terre comme promise à une femme et à un candidat issu de la diversité. Autant dire à elle. Les militants du 6e lui réservent un accueil frais. Ses 43,4 % obtenus au 2e tour sonnent cependant comme une victoire.

Najat Vallaud-Belkacem© Tim Douet_005 ()

© Tim Douet

L'année qui suit est la bonne. Elle terrasse le conseiller général sortant, Jean Flacher (UMP), dans le canton de Montchat. Par cette victoire acquise lors d'un scrutin uninominal, elle gagne enfin sa légitimité politique. Dans la foulée, en préparation du congrès de Reims, elle s'émancipe de son tuteur, choisissant "maman Ségolène" alors que "papa Gérard" tente de présenter sa propre motion – les deux textes finiront par fusionner. Qu'importe cette prise de distance : ce n'est pas à Lyon qu'elle se distingue, où elle est raillée comme l'“adjointe au 8 décembre”. "Jusqu'à présent, elle n'a jamais eu l'occasion de montrer de quoi elle était capable", grince une élue lyonnaise.

Elle se cherche une meilleure circonscription

"Najat" songe surtout à confirmer sa dimension nationale. Elle guigne le mandat de député, envisageant un parachutage à Villeurbanne ou dans la 7e circonscription du Rhône, dont le titulaire est Jean-Jack Queyranne. Ne rencontrant pas l'accueil espéré, elle se replie sur la 4e, qu'elle travaille avec opiniâtreté. Elle profite de cette période électoralement calme pour prendre du coffre. Promue secrétaire nationale du PS en charge des questions de société, elle y défend le mariage homosexuel et l'adoption par des parents de même sexe. Elle cosigne avec Guillaume Bachelay un ouvrage : Réagissez ! Répondez au FN de A à Z. Puis, en 2012, publie Raison de plus, plaidoyer contre la fatalité.

Najat Vallaud-Belkacem© Tim Douet_001 ()

© Tim Douet

"Les journalistes l'adorent"

Aux primaires socialistes, elle confirme sa préférence à Ségolène Royal. Beaucoup de ségolénistes de 2007 ont depuis tourné casaque. Pas elle, qui loue la détermination, le toupet et l'audace propositionnelle de la présidente de Poitou-Charentes. Ce choix de la fidélité est finalement récompensé, puisque François Hollande l'intègre dans son staff, au même poste de porte-parole. Au cours de la campagne, elle reçoit une volée de bois vert lorsqu'elle compare Nicolas Sarkozy à Berlusconi ou Poutine. Mais ne s'en sort pas si mal.

"Elle a été excellente. On l'a beaucoup vue, tandis que les autres porte-parole du candidat étaient assez absents", observe Walter Graci, son suppléant aux législatives. "Elle a un sens politique. Elle sait ce qu'il faut faire et elle sait quand le faire, au moment où il faut le faire. Elle sent les choses. Et puis, elle est sympa, les journalistes l'adorent. Najat est une femme d'appareil", confie un élu socialiste lyonnais. Ces dernières semaines, prudente, elle labourait inlassablement sa 4e circonscription les week-ends, en dépit de son emploi du temps surchargé. Mais le spectre d'une défaite très probable de la jeune ministre face à Dominique Nachury (UMP) a poussé le PS à l'exfiltrer de ce bourbier électoral. Ce mercredi soir, Jean-Marc Ayrault a imposé que les ministres battus quittent son gouvernement. Najat Vallaud-Belkacem passe donc le témoin à une autre, Anne Brugnera. Entre une candidature aux législatives et un maroquin ministériel, elle n'a pas eu de mal à choisir. "Elle en avait vraiment envie", nous confie une de ses amies.

Les commentaires sont fermés

Suivez-nous
tiktok
d'heure en heure
d'heure en heure
Faire défiler vers le haut