Mai 68 : qu'est-ce qu'on liquide ?

Il a pris un mot d'ordre de 68 : jouir sans entrave, et le fait à la face du monde et du public" s'amusait le député européen. Dotés tous deux d'un solide sens de l'humour et de la formule, Cohn-Bendit et Ferry se sont livrés à un examen critique et enthousiaste de l'événement, lors du débat public puis du dîner privé qui suivit.
Au rayon des acquis à ne pas liquider, Luc Ferry citait "le côté le plus formidable de 68 : la victoire de la famille d'amour, fondée sur le sentiment et non plus sur l'intérêt et la raison".

Au rayon des "conneries" à dénoncer, Dany Cohn-Bendit se livrait à un véritable mea-culpa : "CRS-SS c'était une vraie connerie, et élections pièges à cons aussi : on n'avait pas compris en quoi les institutions démocratiques parlementaires étaient aussi une protection contre la folie humaine". D'ailleurs l'anarcho-libertaire estime aujourd'hui qu' "on a besoin de plus d'institutions internationales, de plus d'OMC, de plus d'Europe".
Principal point d'achoppement entre les deux hommes : l'école.

Pour Luc Ferry, la rénovation pédagogique d'après 68, basée sur "l'auto-construction des savoirs", "la pédagogie de l'hameçon" et "le jeunisme" a oublié les héritages et "déconstruit les valeurs traditionnelles". Résultat, inimaginable avant 68 : "l'illettrisme est devenu le problème majeur des années 2000".
Mais Cohn-Bendit continue à défendre mordicus, contre l'autoritarisme imposé, "la capacité d'emmener les enfants vers le désir d'apprendre et de les protéger contre la désintégration sociale qui les cerne".

Plus inattendu, Luc Ferry mettait vertement en cause la société de consommation. "C'est le grand capital qui a fait mai 68, libérant la société de consommation de masse. Or la consommation, c'est l'adiction ; pour y arriver, il faut casser les valeurs spirituelles et morales". Alors comment peut-il soutenir un président "bling bling", rolex au poignet et top-model au bras, qui exalte cette société de consommation ? "Nico est complexe" confiait-il lors du dîner qui suivit le débat à la Villa Gillet. "Et Clara est une chic fille" poursuivait-il, confirmant avoir eu une liaison éclair avec la chanteuse. Et puis "Chirac est un c..." et "ma copine Roselyne (Bachelot) est très drôle" racontait-il encore.

Dans un tout autre registre, Daniel Cohn-Bendit revenait sur sa grande inquiétude face "au retour du religieux en Europe, qui frappe en priorité les femmes et les homosexuels" et au commerce du nucléaire civil. "En mettant aux mains de sociétés comme la Tunisie ou l'Arabie saoudite l'industrie nucléaire, on risque de faire péter la baraque pour des contrats de 4 milliards. C'est de la folie !"

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