Olli Rehn Pierre Moscovici
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Déficit : comment Paris a arraché la clémence de Bruxelles

Le ministre de l'Economie devrait exposer mercredi en conseil des ministres son programme de stabilité, véritable feuille de route de sa stratégie économique. La France réduirait en 2014 son déficit public à 2,9% du PIB, ce qui est loin de satisfaire aux critères européens. Mais le gouvernement s'engagerait sur la réforme des retraites et la baisse des dépenses.

Pierre Moscovici (à droite) et Olli Rehn, ici en mars 2013 © Maxppp

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Ce mercredi, le ministre de l'Economie, Pierre Moscovici, présentera en conseil des ministres son programme de stabilité et de convergence. Dans la foulée, il l'enverra à Bruxelles. Cette feuille de route de la stratégie économique du gouvernement est d'importance : elle fait l'objet d'une réponse de la Commission, puis de recommandations adressées par le Conseil Européen. Or il n'y avait qu'à lire celles du 6 juillet 2012 pour y trouver les principales réformes lancées quelques mois plus tard. "Lutter contre la segmentation du marché du travail (...) en concertation avec les partenaires sociaux, notamment en ce qui concerne la procédure administrative applicable aux licenciements individuels (...) introduire un système fiscal plus simple et plus équilibré qui déplacerait la pression fiscale du travail vers d'autres formes de fiscalité (...) notamment les taxes vertes et les taxes sur la consommation", mentionnait le texte. En découlaient l'accord de flexi-sécurité et le pacte de compétitivité (crédit d'impôt coupé à la hausse de la TVA).

"C'est pas 2,9%"

La France se sait attendue par ses partenaires européens. Déjà en 2013, l'objectif de réduction du déficit public à 3% du PIB n'a pas été atteint. Le sera-t-il en 2014 ? Le déficit devra se situer "nettement en dessous de 3%", prévenait le 22 février le commissaire en charge des questions économiques et monétaire, Olli Rehn. En langue commissaire, cela signifierait 2,5% maximum. "C'est pas 2,9%", nous avait soufflé un collaborateur du commissaire finlandais, le mois dernier.

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C'est pourtant bien l'objectif retenu par Pierre Moscovici, dans son programme de stabilité et de convergence, selon le Monde. Le ministre de l'Economie s'en est expliqué sur BFM TV ce week-end : atteindre un déficit de 2,5% du PIB en 2014 ne serait "pas quelque chose de raisonnable", plongeant le pays dans la récession.

Les signaux envoyés par Hollande à Bruxelles

Un bras de fer est-il engagé entre la France et la Commisssion européenne ? Jusqu'alors, le gouvernement a pu compter sur la clémence des autorités européennes. Ainsi, le 22 février, lorsqu'il reconnaissait le dérapage français, Olli Rehn invoquait "des événements économiques négatifs et inattendus". Le Finlandais adressait même un satisfecit à la France, estimant que les réformes accomplies "montrent que les défis sont relevés". Cette indulgence s'explique pour une part par l'atonie de la croissance : un nouveau tour de vis dans la 2e économie de la zone euro pourrait finir de plonger tout le continent dans la récession.

Cette clémence bruxelloise a aussi été arrachée à la suite d'un intense travail de lobbying côté français. Sitôt élu, le président Hollande a envoyé des signaux positifs à la Commission : à Paris, s'il augmentait le Smic et restaurait partiellement la retraite à 60 ans ; à Bruxelles, il promettait une gestion budgétaire rigoureuse. "Il a souvent fait venir ses ministres ici. La Commission a eu l'impression d'avoir été un partenaire considéré, ce qui n'avait pas toujours été le cas sous Sarkozy", raconte un acteur que nous avons contacté.

Bruxelles veut une baisse de la dépense

Le programme de stabilité et de convergence ne devrait pas complètement mécontenter la Commission européenne. Il contient par exemple la transposition législative de l'accord de flexisécurité négocié par les partenaire sociaux. Et sans doute la réforme des retraites souhaitée par Bruxelles et initialement prévue en 2014.
Ensuite, la Commission y trouvera ce qu'elle attendait : une baisse des dépenses. Ces derniers années, la diminution du déficit français a été obtenue "sur plus des deux tiers par la hausse des recettes, et moins d'un tiers par la baisse des dépenses", selon Mathieu Plane, économiste à l'OFCE. Or d'après le collaborateur d'Olli Rehn, "la hausse des impôts a davantage un effet négatif sur la croissance que la baisse des dépenses. Le Figaro de ce jour explique que l'effort français porterait à 70% sur la baisse des dépenses et à 30% sur la hausse des impôts. Un changement de cap ?

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