Tharaud, maître des jeux

Jamais un siècle ne fut tant préoccupé par l’interprétation dans toute l’Histoire de la Musique, aujourd’hui l’interprète est devenu presque aussi important que l’œuvre, alors chaque mois Lyon Capitale analyse les secrets de jeu des plus grands musiciens...

Certains pianistes possèdent une grâce rare et infinie de jeu qui les différencie à jamais de tous les autres, Alexandre Tharaud est de ceux-ci. C’est avec le violoncelliste Jean-Guihen Queyras que le pianiste prodige donnera un concert exceptionnel à Piano à Lyon avec un programme des plus alléchants : Bach, Schubert, Brahms et Berg.
Au piano, une animation quasi-céleste le transfigurait.” Ces mots d’André Gide extraits de Si le grain ne meurt définissent à merveille la générosité et la magie d’Alexandre Tharaud en concert. Créateur génial des œuvres de Bruno Mantovani, Renaud Gagneux et Thierry Pécou, le pianiste français d’une quarantaine d’années peut se targuer aujourd’hui d’une renommée internationale. Son goût du risque et sa maîtrise d’un très large répertoire ont fait de lui une référence dans l’interprétation de Bach, Poulenc, Ravel, Schubert et Debussy. Il resplendit aussi dans le répertoire de Chopin, à tel point qu’aujourd’hui il est souvent comparé au légendaire Dino Lipatti. Pourtant sa façon de s’emparer du compositeur est tout simplement unique, le pianiste sans trahir la partition a réussi à transcender le romantisme de l’œuvre en lui offrant une grandeur éminemment dramatique.

Aujourd’hui, il donne à entendre les œuvres de Chopin “qui creusent les plaies et rongent les blessures de l’âme, avec les dents acérées de leurs accords”, comme l’écrivait en 1905 le romancier et critique Edmond Jaloux. Après les Valses de Chopin enregistrées en 2006, Chopin, journal intime vient de paraître (Virgin classics) ; le pianiste propose une sélection d’œuvres qui mettent à nu non seulement le compositeur mais plus encore lui-même, musicien sensible se livrant dans une interprétation d’une rare intimité, notamment dans la Ballade n°1, op.23.
Des digressions et audaces de Tharaud

Alexandre Tharaud a beau être un artiste passionné de musique de chambre et une star du classique, il navigue néanmoins dans différents univers. En 2007, il surprend son monde avec Erik Satie, Avant-dernières pensées (harmonia mundi), un des plus beaux enregistrements des œuvres du compositeur où le musicien s’est entouré de personnalités inattendues comme Éric Le Sage, Juliette, Jean Delescluse, Isabelle Faust et David Guerrier. Un Je te veux inoubliable, interprété avec la chanteuse Juliette, montre que Tharaud ose tout et ne fait pas la fine bouche devant le Satie populaire aux accents cabaret plein de charme désuet et de mélancolie languissante. Le concert avec Jean-Guihen Queyras est donc très attendu d’autant plus que les deux musiciens travaillent souvent ensemble et sont en symbiose parfaite comme le confirme l’enregistrement d’Arpeggione Sonata de Schubert. “La musique étant l’art de l’instant, le moment du concert est celui où les subconscients de l’interprète, du compositeur et de l’auditeur sont, idéalement, en total éveil et osmose”, des mots de Jean-Guihen Queyras qui présagent un concert de toute beauté.
Alexandre Tharaud et Jean-Guihen Queyras. Le 29 janvier, salle Molière, Lyon 5è. 04 78 47 87 56. www.pianoalyon.com

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