Françoise Nyssen demande des places de spectacle pour les migrants

La ministre de la Culture a demandé mercredi aux établissements culturels d’agir en faveur de l’intégration des migrants. Un discours accueilli avec beaucoup de scepticisme par les théâtres lyonnais.

Famille de migrants à Tabanovce

Sur le papier, la démarche a de quoi plaire. Mercredi 17 janvier, Françoise Nyssen, s’est exprimée à l’occasion des Biennales internationales du spectacle, organisées à Nantes. Dans son discours aux responsables culturels du pays, la ministre de la Culture a notamment encouragé les établissements à ouvrir leurs spectacles aux migrants. Françoise Nyssen a défendu l’accueil et l’intégration des personnes immigrées. La ministre de la Culture semble prendre ainsi le contre-pied de la ligne politique controversée qu'Emmanuel Macron et Gérard Collomb tracent depuis plusieurs mois.

Dans des propos rapportés par Le Monde, Françoise Nyssen aurait demandé aux établissements culturels "que des places leur soient réservées pour assister à des spectacles, que des ateliers de théâtre, de cirque, de danse leur soient proposés". "Vous pouvez combattre les stéréotypes qui les frappent, agir pour leur droit à la considération, en racontant leur histoire dans vos spectacles ; en leur faisant une place dans vos programmations", a-t-elle martelé.

Mais en réalité, la situation est bien plus complexe. Contactés par Lyon Capitale, Didier Vignali, directeur du théâtre Le Croiseur, et Marc Lesage, directeur du Théâtre des Célestins, nous ont fait part de leur scepticisme.

"Les migrants préfèrent avoir un toit qu’aller au théâtre"

Claudia Stavisky et Marc Lesage © Christian Ganet

© Christian Ganet
Claudia Stavisky et Marc Lesage.

Didier Vignali n’y va pas par 4 chemins : "C’est de la démagogie pure et simple. C’est le même gouvernement qui bazarde les subventions pour Le Croiseur, pour toutes les structures intermédiaires et alternatives du territoire. Moi je veux bien, mais on n’a pas les moyens, on nous a déjà retiré 37 000 euros/an de subventions". Un dépit partagé par Marc Lesage : "Ces déclarations de bonnes intentions m’épuisent. C’est très sympathique, mais c’est plus compliqué que ça. Les discours comme ceux-ci c’est juste histoire de dire qu’on a fait quelque chose. Il faut qu’il y ait une véritable démarche derrière."

Pour le directeur du Théâtre des Célestins, la ministre se trompe tout simplement de priorité : "L’État pourrait commencer par mettre en place l’accueil des migrants avant de se soucier de leur trouver des places de spectacle. Je pense que les migrants préfèrent d’abord avoir un toit que de se précipiter au théâtre."

"On a besoin de vraies structures d’intégration"

Didier Vignali

©TimDouet
Didier Vignali

Les deux directeurs accusent le coup face aux déclarations de Françoise Nyssen sur son engagement dans le "combat contre la ségrégation culturelle" : "Dans les faits, il y a rien à attendre de ces déclarations, regrette Didier Vignali, directeur du théâtre Le Croiseur. Ça résonne bien, mais dans la réalité on constate un démantèlement des initiatives citoyennes. Le réseau secondaire a d’abord besoin d’actes. Cette ministre on ne la connait pas, on ne la jamais vu. Cet espèce d’évangélisme est un peu suspect."

De son côté, Marc Lesage rappelle que de tels programmes existent déjà : "On ne fait pas un cas spécifique de la population des migrants. On a déjà des dispositifs qui permettent l’accès au théâtre à des publics éloignés, que ce soit géographiquement, socialement ou économiquement. Ça fait partie de notre ouverture au monde. Ça n’empêche pas qu’on a besoin de vraies structures d’intégration. On ne peut pas aller dans la rue à la recherche des migrants pour leur dire de venir voir nos spectacles. Ça doit passer par des structures relais, qui doivent recevoir de l’aide du gouvernement pour se mettre en place. Les dispositifs d’accueil et d’intégration doivent être étendus, les centres d’accueil sont déjà débordés."

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