Jules et Jim Cauchetier Truffaut
Jeanne Moreau dans “Jules et Jim” de François Truffaut © Raymond Cauchetier

Expo : Jean-Luc, François, Claude et les autres

Le photographe Raymond Cauchetier, né en 1920, fait partie de ces chanceux qui ont vécu et documenté le mouvement cinématographique le plus intéressant de l’histoire du XXe siècle : la Nouvelle Vague. Son travail est visible à Lyon jusqu’au 26 juillet.

Jeanne Moreau dans “Jules et Jim” de François Truffaut © Raymond Cauchetier

Jeanne Moreau dans “Jules et Jim” de François Truffaut © Raymond Cauchetier

À la fin des années 1950, les cinéastes français sont vieillissants. Leur cinéma, qui a connu son apogée dans les années 1930, continue à user des mêmes recettes, selon trois piliers : un scénariste-dialoguiste, un tournage en studio et des vedettes populaires et néanmoins talentueuses. Autour de la déjà fameuse “revue jaune” (Les Cahiers du cinéma, réunissant en tête Chabrol, Truffaut et Godard, chroniqueurs cinéphiles désireux de passer bientôt derrière la caméra) et du critique André Bazin, se constitue un noyau de futurs réalisateurs qui prendra le contre-pied de ce que Truffaut nommera avec mépris le “cinéma de papa”.

Images d’une libération

En 1958, Chabrol tourne Le Beau Serge, en 1959, Les Cousins. La même année, Truffaut réalise Les 400 Coups et, en 1960, Jean-Luc Godard tourne À bout de souffle, emblème absolu de la Nouvelle Vague. Raymond Cauchetier en sera le photographe de plateau, entre autres chefs-d’œuvre (Jules et Jim, Une femme est une femme, Lola, Cléo de 5 à 7).

Jean Dessailly et Françoise Dorléac dans “La Peau douce” de François Truffaut © Raymond Cauchetier

Jean Dessailly et Françoise Dorléac dans “La Peau douce” de François Truffaut © R.Cauchetier

Au-delà des images cultes connues et finalement un peu épuisées (le couple Belmondo-Seberg dans À bout de souffle, ou la course du trio sur le pont de Jules et Jim), et des magnifiques actrices devenues icônes cinématographiques comme Anna Karina, Jean Seberg ou Jeanne Moreau, les photographies réunies ici rappellent surtout les conditions de libération du cinéma et de l’avènement de la Nouvelle Vague. D’abord, grâce aux avancées techniques, avec l’apparition de caméras légères, à un travail en équipe réduite et une économie de moyens, et à la rue comme lieu de tournage (rues essentiellement parisiennes, pour ne pas dire germanopratines).

Godard et Truffaut les mains dans le cambouis

Jean-Luc Godard et Jean Seberg sur le tournage d’“A bout de souffle” © Raymond Cauchetier

Jean-Luc Godard et Jean Seberg sur le tournage d’“A bout de souffle” © R.Cauchetier

Les clichés les plus intéressants de Cauchetier sont de loin ceux qui montrent l’envers du décor : un Godard tirant d’une main la chaise roulante pour les besoins d’un travelling et de l’autre les dialogues qu’il lit en direct aux acteurs d’À bout de souffle, ou un Melville pinceau à la main, apportant lui-même les dernières retouches aux motifs d’un char allemand sur Léon Morin, prêtre, ou encore Truffaut à bord d’une 2CV étêtée sur le tournage de Baisers volés.

Même si la Nouvelle Vague s’essouffla rapidement (sa dilution se situe vers 1962, les cinéastes fers de lance se reclassant rapidement pour le pire et le meilleur : Truffaut et Chabrol tomberont dans les travers du cinéma bourgeois qu’ils dénonçaient, Godard pratiquera un cinéma plus expérimental, provocant et inventif), elle n’en a pas moins réveillé et revigoré le cinéma français, et influencé le cinéma mondial, en faisant de la désinvolture et de l’irrespect des aînés les conditions d’une nouvelle forme artistique.

La Nouvelle Vague 1958-1968 – Photographies de Raymond Cauchetier. Jusqu’au 28 juin, à la galerie photo de l’institut Lumière, 3 rue de l’Arbre-Sec, Lyon 1er. Du mardi au samedi, 12h-19h.
– Exposition prolongée jusqu’au 26 juillet –
Suivez-nous
tiktok
d'heure en heure
d'heure en heure
Faire défiler vers le haut