Suicides : les policiers du Rhône déçus par les annonces de Collomb

Alors que 60 policiers et gendarmes se sont suicidés depuis le début 2017, Gérard Collomb a demandé une “évaluation des mesures de prévention des suicides mises en place et les moyens d’en renforcer encore l’efficacité”. Des annonces qui ne satisfont pas les policiers du Rhône.

44 policiers et 16 gendarmes se sont donné la mort depuis le début de l’année 2017. Pour stopper cette vague de suicides, Gérard Collomb a demandé aux trois directeurs généraux de la Police nationale, de la Gendarmerie nationale et de la Sécurité intérieure “de lui présenter une évaluation des mesures mises en œuvre pour prévenir les suicides parmi les forces de l’ordre”, dans l’optique d’“évoquer les dispositifs de prévention existants et les moyens d’en renforcer encore l’efficacité”, selon un communiqué du ministère de l’Intérieur.

 

 

“Déconsidération totale”, “sentiment d’abandon”

Les annonces du ministre de l’Intérieur sont insuffisantes pour les policiers lyonnais, qui estiment que le ministère ne traite pas la question par le bon boût. “Les psychologues, c’est les finalités. Mais avant il y a des facteurs qui font que les fonctionnaires vont mal qu’il faut changer, estime ainsi Yann Rouchier, du syndicat FPIP. Pour s’attaquer au mal-être des policiers, il faut régler la problématique du management, qui aujourd’hui est inexistant, voire parfois à la limite du harcèlement hiérarchique. Il ne faut pas sous-estimer non plus la déconsidération totale du boulot et le sentiment d’abandon total des effectifs.”

Un “management infantilisant totalement dépassé”

Le mal-être des forces de police s’est amplifié depuis 2015 et la vague d’attentats qui a touché la France. “On tire la sonnette d’alarme sur les conditions et le temps de travail des collègues depuis la vague d’attentats, mais on n’est pas vraiment écoutés. Quand un policier national est employé de manière intense depuis 2015, forcément, au bout d’un moment, le corps et l’esprit peuvent lâcher”, confie Sébastien Thillet, secrétaire départemental du syndicat Unité-SGP Police. Lui aussi dénonce un “management infantilisant totalement dépassé, couplé à un manque de reconnaissance du travail des policiers, notamment sur la voie publique” ; “tout cela met le moral des effectifs en berne, d’autant que cela se passe dans des conditions de travail exécrables à cause du matériel”, souligne-t-il.

La politique du chiffre “existe toujours”

Outre la surmobilisation due aux attentats, les deux syndicalistes dénoncent une politique du chiffre pratiquée à mots couverts. “À la base, l’essence même de notre métier, c’était le service public. Mais il y a eu une politique du chiffre mise en place après 2008. Si, publiquement, elle est terminée, elle existe encore à travers le management. Bien sûr, cela dépend des officiers et des directeurs. Dans le Rhône, il semblerait plus que l’on soit dans cet état d’esprit. Mais, dans les affectations à telle ou telle tâche, on sent que cela existe toujours”, déclare Sébastien Thillet, pour qui “le constat est là, avec soixante suicides en moins d’un an…” “Et qu’est-ce qui est fait par notre administration ? Rien du tout pour le moment !” se désespère-t-il.

La prévention, ça passe par des week-ends

Plus qu’une amélioration des “dispositifs de prévention”, les policiers souhaitent une “resocialisation” des agents afin de prévenir les suicides. “Aujourd’hui, certains fonctionnaires de police ont un week-end de repos sur six. Ils travaillent sur un rythme “quatre jours de service/deux jours de repos” qui est d’un autre temps. Nous, ce que l’on souhaite, c’est passer sur un cycle de vacation forte qui permet d’avoir un temps de repos d’un week-end sur deux et d’un mercredi. La resocialisation passera par là”, conclu Sébastien Thillet.

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