Délinquance : le préfet veut " réagir vite et fort "

Mercredi, les chefs départementaux de la sécurité ont été sommés de réagir par le chef de l'Etat en personne. Effet garanti.

Retour de bâton pour la " culture du résultat " qui semble montrer ses premiers signes d'essouflement.

Dans le Rhône, les chiffres de la délinquance sont en augmentation de 2% par rapport à la même période l'année passée. En particulier, les cambriolages ont connu un boom de presque 10% que la baisse des atteintes aux personnes (-6%) n'a pas suffi à contrecarrer.

Des statistiques qui placent malgré tout le département parmi les bons élèves de la République, au 8e rang national.

Une situation dont ne se satisfait pas le préfet du Rhône, Jacques Gérault, ancien directeur de cabinet de Nicolas Sarkozy au ministère de l'Intérieur, qui entend " réagir vite et fort " en rappelant le sens du mot " résultats " aux forces de police et de gendarmerie. " Non seulement il n'y a pas de désaveu de la culture du résultat, mais une affirmation très forte de celle-ci. " a t-il précisé.

Objectif affiché : faire mieux au troisième trismestre 2009 qu'en 2008 à la même date.

" Réagir vite et fort "

Meilleur pilotage, nouveaux outils et meilleur ciblage sont en substance les trois orientations majeures qui devraient permettre de contrecarrer la tendance. Meilleur pilotage grâce à l'Etat major de sécurité qui définira, chaque mois, les priorités du moment.

Au menu de la rentrée : " sanctuarisation " de l'école et renforcement de la coopération avec les services des impôts, les douanes et le rectorat. Les réunions publiques seront également relancées afin de permettre aux habitants de " dire ce qu'ils ont sur le cœur ", dixit Jacques Gérault, et de tisser un lien de confiance entre police et citoyens pour une meilleure information mutuelle. Déjà menée dans le 1er arrondissement, l'expérience aurait permis d'y faire " diminuer la délinquance de 30% ".

Du côté des outils, on retrouve l'expansion de la " vidéo-protection ", un terme qui a détrôné celui de vidéosurveillance. Au programme également, la création d'une brigade expérimentale de protection des familles pour lutter contre la hausse des violences intra-familiales ainsi que la création de deux unités territoriales de quartier (UTEQ) dans les zones sensibles de Vénissieux et de Vaux-en-Velin.

Enfin, la lutte contre les cambriolages et vols à main armée seront au cœur des préoccupations. De janvier à juillet, les vols à main armée ont bondi de 86 % par rapport à l'année dernière. Le plus souvent, il s'agit de petits braquages commis par des pieds nickelés du vol à main armée, mineurs la plupart du temps.

D'où un taux d'élucidation élevé. Les cambriolages de résidences principales ont quant à eux progressé de 17%. Une vague qui touche l'ensemble du territoire. Outre une meilleure occupation du terrain, la police entend faire appel aux voisins curieux et à la police scientifique et technique pour lutter contre le phénomène.

Les Roms en ligne de mire

Comment rendre compte de ces augmentations ? La faute à la crise expliquent les autorités, mais pas seulement. Les responsables de la sécurité du département se sont également dits " pas mal concernés par des populations venues de l'Est ".

Une mise en cause directe, sans plus de détails, si ce n'est sur la manière de remédier au " problème ". Ouvertement visés, les Roms, contre lesquels le prefet entend sortir l'artillerie lourde. " Des hélicoptères seront utilisés pour repérer les camps et faire des perquisitions massives ". Et de prévenir : " pour les personnes en situation irrégulière, c'est la reconduite à la frontière et j'ai donné des consignes très fermes en ce sens ". Des déclarations qui surprennent un peu le syndicat Unité Police (ex-Unsa police) : " Quand on parle avec nos collègues sur le terrain, on parle de délinquance générale, pas de population particulière. S'ils disent cela, c'est qu'ils doivent avoir des chiffres ".

Des chiffres hypothétiques, en tout cas impossibles à obtenir dans l'immédiat auprès de la DDSP. Reprises dans les médias, ces déclarations ouvrent la voie à une stigmatisation pure et simple.

Manque d'effectifs

Mais surtout, le délégué général d'Unité Police, Thierry Clair, peste contre la diminution des effectifs. " En novembre 2008, un protocole d'accord signé par un syndicat minoritaire a acté la supression de 5000 fonctionnaires sur 2 ans " regrette-t-il.

Une diminution qui ne préoccupe guère le préfet : " ce n'est pas l'augmentation des gendarmes et des policiers qui permet d'améliorer les choses, c'est un problème de qualité du travail ". Une parade qui surprend par son décalage avec un discours global appelant à toujours plus d'interpellations.

Autre point noir pour le syndicat, les charges qui pèsent sur la police, non transférées au milieu pénitentiaire. " Il y a beaucoup de policiers qui assurent la garde de détenus en milieu hospitalier. Non seulement cela diminue d'autant les effectifs sur le terrain, mais ça bouffe la vie professionnelle des collègues. " La politique du chiffre commence elle aussi à lasser les fonctionnaires. " Cette politique a des effets négatifs, soutient Thierry Clair. Il y a beaucoup de travail administratif, il faut tout de suite tout écrire pour montrer qu'on fait bien notre travail. Pendant ce temps, on n'est pas sur le terrain. Les statistiques montrent que la culture du résultat a ses limites. " Aucun changement de cap majeur ne semble pourtant à l'ordre du jour.

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