Michel Mercier © tim douet
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M. Mercier au Conseil constitutionnel : ses casseroles dans le Rhône

L’ancien président du conseil général du Rhône va vraisemblablement intégrer le Conseil constitutionnel après avoir été choisi par Gérard Larcher, le président du Sénat. Emprunts toxiques, projets jamais réalisés, budgets qui explosent, département au bord de la banqueroute..., Lyon Capitale republie ci-dessous un article (mis à jour) paru en 2014, qui éclaire d’une autre lumière les années Mercier au département.

Michel Mercier © Tim Douet

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Michel Mercier.

Les casseroles que nous laisse Michel Mercier

article paru dans Lyon Capitale n°737 (octobre 2014) mis à jour

Présenté comme un bon gestionnaire, pensant ses projets avec son “bon sens paysan” et son attachement à l’utilité de chaque euro public dépensé, le sénateur a navigué entre des renoncements qui ont empêché de faire sortir de terre des axes de transport structurants et les boulettes financières. Il laisse un héritage pour le département, mais surtout pour la métropole, qui risque d’être longtemps indigeste.

Des emprunts toxiques pour la métropole

Après avoir vendu ses bijoux de famille pour payer le musée des Confluences et respecter sa promesse de ne pas faire financer son projet présidentiel par l’impôt, Michel Mercier a commis sa plus grosse boulette en signant des emprunts toxiques. À lui seul, le conseil général du Rhône a souscrit un quart des emprunts toxiques des départements français et plus que l’ensemble des régions réunies. Au total, Michel Mercier a signé pour 380 millions d’euros de prêts spéculatifs. Certains contrats pouvaient même déraper, avec des taux d’intérêt pouvant dépasser la barre des 30 %. Pour faire face à l’incendie qui menaçait les finances du département, Michel Mercier avait alors négocié avec les banques une “sécurisation” de la dette.

Mais sa stratégie consistait surtout à mettre la poussière sous le tapis. Le département avait ainsi obtenu que certains emprunts toxiques restent à des taux fixes jusqu’en 2015 avant de reprendre leur mécanique infernale ensuite. Des emprunts récupérés ensuite par la Métropole de Lyon. Salée, la facture laissée par Michel Mercier pour son passage à la tête du département du Rhône. Une facture salée qui coûtera 424 millions d'euros d'indemnités, répartis entre la Métropole et le Nouveau Rhône. En prenant en compte l'aide apportée par le fonds de soutien mis en place par l'Etat, près de 230 millions d'euros, il reste 127 millions à la charge de la métropole et 69 millions pour le département. Un fardeau plus qu'un héritage, que les contribuables devront donc assumer pour près de 200 millions d'euros.

L’autoroute “qui finit dans un champ de patates”

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Tous les automobilistes ayant un jour emprunté l’A89 en arrivent forcément, à l’entrée dans l’agglomération lyonnaise, à se demander qui a pu décider de faire déboucher une autoroute au milieu de nulle part. C’est aussi une partie de l’héritage des années Mercier. Aucun conseiller général de l’Ouest lyonnais n’a accepté de faire passer l’autoroute au milieu de sa commune pour la raccorder à l’A6. Résultat, l’A89 s’achève à La Tour-de-Salvagny, à 6 kilomètres de l’autoroute à laquelle elle était censée s’arrimer. Pourtant, au sein du conseil général, de nombreuses voix se sont élevées pour dénoncer une situation ubuesque. “Cette autoroute va finir dans un champ de patates, dans le vide”, prévenait la maire de Dardilly, Michèle Vullien, en janvier 2013 avant la livraison de l’ouvrage. Mais Michel Mercier n’a jamais voulu trancher la question. Et Pierre Jamet, son ancien bras droit, de botter en touche : “La décision revenait à l’État, pas au département.”

Musée des Confluences, le cadeau empoisonné

Musée des Confluences 2015 ()

© Tim Douet
Musée des Confluences de nuit 2015

Ce projet lancé avec un budget de 60 millions d'euros aura finalement coûté exactement 306 980 575,20 euros. Une somme qui n'a pas pesé sur la métropole, le musée ayant été livré avant la création du Grand Lyon. Mais ce legs pourrait pourtant polluer l’horizon budgétaire de la métropole pendant des années. Car le coût de fonctionnement du musée (18 millions d'euros) est largement financé par les subventions publiques, qui représentent 14 millions d'euros dont 12,8 millions d'euros proviennent de la Métropole. Trop cher pour le Nouveau Rhône, Christophe Guilloteau avait annoncé fin 2016 que le département ne verserait plus sa participation de 1,2 million d'euros dans le fonctionnement du musée à partir de 2017. Une somme en plus à gérer pour la Métropole.

La garantie d’emprunt du Grand Stade

En novembre 2012, Michel Mercier a volé au secours du Grand Stade. En faisant adopter une garantie d’emprunt de 40 millions d’euros en faveur d’une filiale de l’OL, il a rendu la construction du stade des Lumières possible. En clair, si l’OL ne parvient pas à rembourser un prêt de 80 millions, c’est le conseil général qui paiera à sa place, et en l’espèce le contribuable. Ce coup de main a permis à Jean-Michel Aulas et à Vinci, le constructeur de l’OL Land, de boucler leur tour de table. Mais, là encore, Michel Mercier n’aura pas à supporter le risque longtemps. Cette garantie d’emprunt circonscrite au territoire du Grand Lyon pèsera à partir du 1er janvier 2015 uniquement sur la métropole. Ce qui peut être vu comme un juste retour des choses. Car cette décision a été prise alors que Michel Mercier et Gérard Collomb avaient engagé les discussions qui ont conduit à la création de la métropole. Celui qui était encore à l’époque président du conseil général n’avait pourtant aucune raison de souscrire cette garantie d’emprunt. Le département n’avait jusque-là apporté qu’un écot marginal à l’OL Land. Michel Mercier a accepté de se mettre en avant dans un dossier polémique pour sauver la mise à Jean-Michel Aulas et surtout à Gérard Collomb. Le président du Grand Lyon aurait voulu souscrire cette garantie d’emprunt, mais il savait ne pas pouvoir compter sur une majorité pour faire adopter une telle délibération. Pour Michel Mercier, le risque n’était pas grand. Lui savait qu’à moyen terme il refilerait cette garantie risquée à Gérard Collomb.

Rhônexpress ou l’obligation de résultat

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Le conseil général ne cesse de rappeler que Rhônexpress fait partie des cadeaux offerts, généreusement, au Grand Lyon avec la création de la métropole. Une assertion partiellement vraie. Le service dégage des bénéfices. Et la communauté urbaine doit prier pour que les marges durent dans le temps. Dans le contrat signé avec Vinci, qui a construit et exploite le tram qui relie la Part-Dieu à l’aéroport Saint-Exupéry, le département a accepté une subvention d’équilibre. Si Vinci ne rentre pas dans ses frais, la puissance publique lui versera de l’argent. Où l’on comprend un peu mieux la pression exercée sur une entreprise qui proposait une liaison similaire en bus, beaucoup moins chère. Pour éviter toute concurrence, le Sytral a aussi supprimé les lignes de bus qui permettaient de se rendre à l’aéroport pour 1,80 euro. Laissant le Rhônexpress, une des navettes les plus chères d'Europe, comme unique solution pour rejoindre l'aéroport Lyon-Saint-Exupéry.

Le TOP qu’il n’aura jamais réalisé

Si Louis Pradel est le père du tunnel de Fourvière et son célèbre bouchon éponyme, Michel Mercier a beaucoup œuvré pour que ce dernier dure dans le temps. En 1990, il se répartit avec Michel Noir, alors maire de Lyon et président de la Courly, les rôles pour la réalisation du périphérique lyonnais. Le Grand Lyon réalisera la partie nord (Teo) et le conseil général le tronçon ouest (TOP). Si Michel Noir a tenu sa promesse, vingt-sept ans plus tard celle de Michel Mercier reste au stade des études. Son éventuelle réalisation n’est pas prévue avant 2030. Il a réussi entretemps à en confier la charge au Grand Lyon. “Nous voulions le réaliser. Nous étions prêts à lancer le projet quand le Conseil d’État a annulé le marché entre la Courly et Bouygues-Dumez. Nous avons dû sortir un milliard de francs pour racheter Teo et nous n’avions plus l’argent pour réaliser le Top”, se justifie Pierre Jamet, ancien directeur de cabinet de Michel Mercier au conseil général, où il était surnommé le “vice-président”.

Difficile pourtant d’imaginer que le Top a failli dépasser le stade de la promesse. Quand le Grand Lyon a repris le dossier en main, Gérard Collomb a dû se pencher sur le tracé. Et surtout le coût est passé du milliard de francs évoqué par Pierre Jamet à 3,5 milliards d’euros. Des proches de Michel Mercier ont même le toupet de faire reposer sur Gérard Collomb l’absence de l’ouvrage qui doit boucler le périphérique lyonnais : “C’est à cause de la promesse qu’il a faite aux écolos d’enterrer les routes que le TOP ne se fera jamais.” Aujourd'hui ce TOP n'est toujours qu'au stade de l'étude.

Le COL saboté

TOP/COL ()

Chez Michel Mercier comme Gérard Collomb, le COL (contournement ouest de Lyon) est devenu un prétexte pour expliquer les retards à l’allumage du TOP. Et aussi une manière de ne faire aucun des deux. Ces deux infrastructures routières sont des serpents de mer. Il aura fallu attendre 2011 pour que le conseil général rende son avis sur le tracé du COL. Et les préconisations du département pour celui-ci sont une manière déguisée d’abandonner le projet, comme la promesse de Gérard Collomb d’enterrer le TOP. Michel Mercier a enfin choisi de faire passer le COL au plus loin du Rhône et des cantons ruraux, qui sont pour la plupart entre les mains des élus de sa majorité. Le tracé passerait par la Loire, quitte à devoir creuser un tunnel d’une vingtaine de kilomètres pour passer sous les monts du Pilat avant de se raccorder à l’A7.

Le patrimoine bradé

Michel Mercier, qui est longtemps passé pour un bon gestionnaire, nous a gratifiés de quelques mauvais placements à partir du milieu des années 2000. Une fâcheuse série qu’il a entamée avec la vente des actions de la CNR et de deux sociétés autoroutières (ASF et APRR). Rétrospectivement, le conseil général aurait eu tout intérêt à garder ses parts de la Compagnie nationale du Rhône. Le département les a cédées pour 63 millions d’euros. Or, six ans plus tard, ce portefeuille d’actions aurait été estimé à 460 millions d’euros. Mais le conseil général s’était débarrassé rapidement de ses participations pour renflouer le colossal musée des Confluences.

Lire aussi : Emprunts toxiques : les belles carrières des élus fautifs

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