Cité de la gastronomie : la commission décrypte l’échec lyonnais

ENTRETIEN - Lyon ne fait pas partie des trois villes sélectionnées pour composer le socle du réseau des Cités de la gastronomie. Pourtant, la commission qui a rendu son avis ce vendredi 11 janvier précise que la ville "ne doit pas être exclue du dispositif". Lyon a-t-elle perdue toute ses chances ? Quelles sont les causes de son échec ? Pierre Sanner, secrétaire général de cette commission et directeur de la Mission française du patrimoine et des cultures alimentaires, répond aux questions de Lyon Capitale.

Lyon Capitale : Lyon a-t-elle totalement et définitivement perdu la Cité de la gastronomie ?

Pierre Sanner : Plutôt qu’une Cité de la gastronomie, nous avons privilégié un réseau de Cités avec un socle fort incarné par Tours, Rungis et Dijon qui défendaient toutes les trois d’excellents dossiers. Plusieurs points dans le projet lyonnais ont empêché sa désignation, mais ils ne condamnent pas Lyon, qui pourra intégrer le réseau des Cités de la Gastronomie, sans pour autant faire partie du socle Tours-Rungis-Dijon. Les points sur lesquels le dossier a péché peuvent être éclaircis et de nouvelles propositions apportées. C’est en tout cas ce que nous souhaitons.

Pourquoi Lyon a-t-elle échoué ?

La légitimité historique de Lyon est avérée et dans l’esprit de tous les membres de la commission, "la capitale mondiale de la gastronomie" a vocation à faire partie du réseau ; mais à ce jour, trop d’interrogations planent sur le dossier, notamment sur sa conformité avec le cahier des charges très exigeant imposé par l’Unesco et ses engagements pour incarner le repas gastronomique des Français.

Même si l’installation de la Cité de la gastronomie au cœur de l’Hôtel-Dieu est séduisante, le dossier lyonnais annonçait 3 500 m² dédiés au projet, sur les 54 000m² du Grand Hôtel-Dieu, soit moins de 10% de la surface de l’édifice. En outre, la commission doute de la cohérence des différentes activités sur l’ensemble du site, notamment le ratio activités pédagogiques et culturelles, et espaces marchands, ces derniers étant fortement représentés. Le rapport entre les activités commerciales et culturelles n’était pas clairement lisible. Et leur indépendance totale par rapport aux gestionnaires de la Cité questionnait également. Par exemple, dans certains autres dossiers, il est prévu que les commerces reversent une redevance pour participer au fonctionnement de la Cité de la gastronomie, ce qui n’était pas le cas dans le projet lyonnais.

Qu’en est-il de l’idée d’associer Santé et Nutrition, défendue dans le dossier lyonnais ?

La proposition d’une collection permanente d’un espace de 800 m² dédiée à la santé semble plutôt être imposée par la nécessité de conserver les collections des Hospices Civils de Lyon sur place. La relation entre santé et gastronomie ne figure pas dans le cahier des charges de l’Unesco en vue de la création de la Cité de la gastronomie. Cette orientation n’était peut-être pas la plus opportune puisqu’elle s’inscrit difficilement dans l’incarnation du repas gastronomique des Français.

L’idée de base était de désigner une Cité alors comment en est-on arrivé à ce réseau de Cités ?

En 1985, on imaginait déjà en France un très grand centre dédié à la gastronomie ; un Beaubourg de la cuisine qui ne soit pas un musée d'histoire naturelle. C’est ce que nous souhaitions mettre en place avec la Cité de la gastronomie. Mais en l’absence de projet permettant une telle réalisation, et avec trois très bons dossiers qui se complétaient, sans qu’un seul sorte vraiment du lot, nous avons préféré opter pour une forme de réseau pour tirer le meilleur de chaque projet.

Ce réseau est-il amené à se développer ?

Le réseau des Cités de la gastronomie que nous proposons est un concept original que Lyon a évidemment vocation à rejoindre. Notre but est de fédérer un réseau de villes autour de notre tradition de repas gastronomique à la française. À terme il devrait s’ouvrir à toutes les villes qui en feront la demande et déposeront un dossier. Les départements ultra-marins, le sud-ouest de la France, l’Alsace, par exemple, seront évidemment encouragés à y participer. Finalement un tel dispositif qui permet le rayonnement de toute la France à l’international est plus conforme aux exigences de l’Unesco.

Les ministères demandent des compléments d’informations, notamment sur les volets financiers. Certains dossiers peuvent-ils flancher dans la dernière ligne droite ?

A priori et sans trop m’avancer, non. Nous avons noté quelques points qui méritaient d’être précisés dans certains dossiers et il est normal que les ministères obtiennent des garantis devant des enjeux aussi importants. Des points d’étape financiers devraient être faits assez régulièrement d’ici à l’ouverture des sites, les premières inaugurations étant prévues pour mi-2016.

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