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Fraudes au péage : les sociétés d’autoroute ripostent

Pour éviter de « casquer » au péage, certains automobilistes très imaginatifs usent de combines. Avec parfois des techniques qui peuvent être dangereuses. Mais les sociétés d’autoroute veillent et mettent en place la riposte pour protéger leur manne.

Prendre l’autoroute coûte cher. 31 euros, c’est la somme qu’il faut débourser par exemple au péage pour relier Lyon à Paris. Mais, à ces gros montants des trajets longues distances, s’ajoutent les petites sommes du quotidien : 2 euros pour emprunter le périphérique nord Teo par exemple. Certains sont alors tentés de franchir la barrière… sans payer. Qui n’a jamais vu, dans son rétroviseur, une voiture s’engouffrer derrière lui, profitant de la barrière que vous veniez de lever grâce à votre acquittement ? C’est ce qu’on appelle faire « le petit train ». Un passage rapide dans le sillon du véhicule qui précède, avec non seulement le risque de collision, mais également une mise en danger pour le personnel à pied qui travaille sur les barrières de péages.

Frauder au péage ce n’est pas resquiller

Au-delà du geste incivique, frauder sur les autoroutes est un délit et cela peut coûter cher. « C’est bien plus grave que simplement resquiller. Il s’agit d’un délit punissable de fortes amendes et de peines de prison avec sursis », précise Philippe Abraham, responsable du département clientèle chez AREA. Un passage en force à un péage par exemple est sanctionné par une amende de catégorie 2 pouvant atteindre 150 euros.

Outre le petit train, il y a bien d’autres martingales pour éviter de cracher au bassinet. Certaines plus subtiles que d’autres voire parfois un tantinet tordues, comme la technique du double ticket, astuce par laquelle l’usager tente de diminuer son péage en présentant au guichet un ticket non représentatif de la distance réellement parcourue. Mais toutes ces « techniques » sont aussi illégales les unes que les autres... Nous ne les détaillerons évidemment pas, pour éviter de faire naître des « vocations ».

Frauder peut coûter cher

Area, qui gère plus de 2 200 Km de voierie s’est lancée dans la traque aux fraudeurs, et elle le fait savoir. Elle met en oeuvre des moyens de dissuasion afin de décourager ces pratiques. A ce jeu-là, la société d’autoroute a déjà réussi à faire condamner deux automobilistes à de très lourdes amendes et même à des sanctions pénales. Le premier a dû reverser 2 480,70 euros au titre de dommages et intérêts à la société AREA pour des fraudes commises sur l’autoroute A43, entre août 2006 et novembre 2008. Il écope également, au pénal, de 400 euros d’amende. Le deuxième automobiliste, quant à lui, a été condamné à 8 692,10 euros d’amende complétée par une sanction pénale de 15 jours d’emprisonnement avec sursis, pour avoir à de nombreuses reprises tenté de minorer son péage entre août 2006 et mars 2008.

Ces infractions vident petit à petit les caisses du géant des autoroutes. Pourtant, selon Philippe Abraham, seuls 1 à 2 passages sur 1 000 sont frauduleux. Alors pourquoi faire de la fraude un cheval de bataille ? Par « souci d’équité » selon le porte parole d’AREA : « il n’est pas normal que certains payent et d’autres non ».

La lutte contre la fraude

AREA ne lésine désormais plus sur les moyens de surveillance pour traquer les fraudeurs. L’analyse des temps de parcours, par exemple, permet de mettre en avant des incohérences dans les durées des trajets. C’est ainsi que les Autoroutes du Sud de la France avaient réussi à confondre deux chauffeurs-livreurs de la région de Perpignan qui utilisaient une technique de double ticket. Les 6 heures de trajet pour effectuer les quelques kilomètres d’autoroute qui séparaient les deux péages, avaient alors éveillé les soupçons (l’Indépendant 10 février 2010).

Autre outil de lutte contre la fraude au parcours, les moyens vidéo en voie. Ces caméras permettent, en cas d’un passage en force d’un véhicule de pouvoir l’identifier grâce à sa plaque et de rapporter les faits à la brigade d’autoroute. En effet, l’agent derrière son écran de contrôle est assermenté, et donc habilité à témoigner d’une infraction d’une manière irréfutable. Des péagiers assermentés… Doit-on craindre de voir d’ici peu les receveurs au péage, carnet à souche à la main, verbaliser les contrevenants? Philippe Abraham n’exclut pas totalement cette éventualité : « Ce n’est pas d’actualité. Mais qui sait si un jour on ne sera pas dans la même situation que les contrôleurs SNCF.» Pour l’avenir, AREA peaufine déjà d’autres moyens de lutte contre la fraude comme un système vidéo de reconnaissance automatique de plaques qui doit d’abord être soumis à la validation de la CNIL*.

Protéger la poule aux œufs d’or

Pourquoi la solution la plus simple pour limiter le taux de fraude ne serait-elle pas simplement de baisser le prix du ticket ? Car après tout, comme le soulignait Lyon Capitale dans son numéro de mai, les concessions d’autoroute restent extrêmement lucratives pour le groupe Eiffage. Les concessions APRR et AREA représentent 14% du chiffre d’affaire de la maison mère, mais sont l’activité la plus lucrative en fournissant plus des deux tiers de la marge du conglomérat. AREA, par la voix de Philippe Abraham justifie ses prix par la grande qualité du réseau autoroutier, du point de vue des infrastructures, des services et de la sécurité. « Il y a cinq fois moins d’accidents sur autoroute que sur le reste du réseau routier» argue t-il. Il minimise la rentabilité des péages : « Sur 10 euros : 3 vont à l’Etat, 3 dans le remboursement des investissements, 2 financent l’exploitation et 2 dans la construction ». Et de préciser : « La particularité du paiement de l’autoroute, c’est qu’il se fait au coup par coup. A l’inverse, le paiement de l’utilisation des autres voies types routes nationales est noyé dans la masse des impôts. »

* Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés

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