Grand Stade et petits mensonges, l'OL Land pour les nuls

Ce samedi, le Grand Stade de l'OL va enfin ouvrir ses portes. Près de dix ans après son lancement. En cette veille d'inauguration, Lyon Capitale vous propose un retour sur ce qui a longtemps été un projet maudit.

Interrogé pendant la campagne des municipales de 2014, Gérard Collomb, qui n'affiche que très rarement ses doutes en public, admettra avoir eu quelques sueurs froides avec ce projet. Au point d'avoir du mal à trouver le someil en septembre 2012. À cette époque, le projet lancé une poignée d'années auparavant n'a pas vraiment avancé. Freiné par les recours juridiques et des procédures souvent mal montées, l'hypothèse même d'un l'OL Land est menacée. L'OL ne parvient pas à rassurer les banquiers à l'heure d'investir pour construire un stade à 400 millions d'euros. Gérard Collomb et Jean-Michel Aulas sont notamment otages du choix du site. Les premières dissensions dans ce couple "présidentiel" apparaisse. Le patron de l'OL rappelle notamment qu'il n'est pas responsable du choix de s'implanter à Décines. Dans cette commune de l'Est lyonnais, l'arrivée du club de football a cristallisé des mécontentements. Les opposants (l'association Carton Rouge ou le conseiller municipal écologiste Étienne Tête) multiplient les recours et obtiennent quelques victoires symboliques.

Le temps des recours

De 2007 à 2012, c'est le temps pour l'OL Land de l'obstruction juridique. Le Grand Lyon devra ainsi s'y reprendre à trois fois pour faire réviser le Plan local d'urbanisme, un document essentiel qui a permis de rendre le site du Montout constructible. L'une des enquêtes publiques donnera même du baume au cœur aux opposants. Alors qu'il rédige un avis qu'il sait caduque, un commissaire enquêteur rédige un rapport au vitriol. Pour lui, les investissements publics pour l'accessibilité au stade relève "d'une absence quasi-totale d'utilité pour les habitants des communes concernées". Sur la desserte en transports en commun il pointe : "des kilomètres de voirie, des milliers de places de parking et deux stations de tramway financés par l'argent public ne servent que huit jours par an, en temps cumulé, et au seul profit du groupe privé qui exploitera le stade" qui pourraient relever de "l'abus de biens sociaux". Le projet avance alors lentement. Jusqu'à ce que la France se voit confier l'organisation de l'Euro 2016 de football.

L'Euro 2016 à la rescousse

"Le facteur déterminant de la réussite du projet, c'est le 28 mai 2010. Le jour où la France se voit attribué l'Euro 2016 de football. L'OL Land se serait fait sans l'organisation de cette compétition, mais cela a donné un grand coup d'accélérateur. Il n'était plus dès lors question d'un projet local, mais de l'image de la France. L'ambiance a changé", nous a confié Gilbert Giorgi, vice-président de l'OL en charge du Grand Stade. Dès lors le projet est soutenu politiquement au niveau national. La déclaration d'intérêt général n'est plus qu'une formalité.

Si le stade est purement privé, la main publique a guidé pendant près de dix ans le projet avec beaucoup de bienveillance. " un soutien public s’est révélé indispensable afin de mettre définitivement le futur stade sur les rails", résument ainsi les sénateurs Jean-Marc Todeschini et Dominique Bailly dans un rapport sénatorial en octobre 2013. "Jean-Michel Aulas a toujours eu les appuis qu'il fallait au moment où il le fallait", abonde Michel Forissier, sénateur-maire (LR) de Meyzieu et opposant au projet à son lancement. D'un amendement spécial OL Land dans une loi sur le tourisme au lobbying parlementaire de Gérard Collomb et Michel Mercier, Jean-Michel Aulas a toujours pu compter sur le soutien des décideurs locaux.

La collectivité apporte sa caution

Avec à la clé parfois des aides financières. Ainsi le département du Rhône s'était-il porté garant d'un emprunt à hauteur de 40 millions qui a rendu possible la construction du stade. Les opposants n'ont jamais digéré la vente à des prix avantageux des terrains propriétés du Grand Lyon à l'OL Land. Achetés 40 euros le m2, un prix dont auraient convenu à l'avance Jean-Michel Aulas et Gérard Collomb, ils sont aujourd'hui valorisés 300 euros selon les opposants. Les terrains ont, en effet, été acquis au prix d''un terrain non constructible. "La transaction s'est effectuée sous réserve d'obtention d'un permis de construire. De facto, les terrains acquis par OL Groupe via la Foncière du Montout était constructible", peste Étienne Tête, opposant et auteur de nombreux recours judiciaires contre le Grand Stade. Lors de l'une des trois enquêtes publiques pour la révision du PLU, le commissaire-enquêteur redoutait la possibilité “que les terrains du Montout appartenant à la collectivité soient destinés à être bradés au club lyonnais (...), ouvrant ainsi la voie à d’indécentes plus-values au regard des coûts consentis par la collectivité”. Comme l'expliquait Lyon Capitale, dans son édition de septembre, la puissance publique a aussi volé au secours de Jean-Michel Aulas quand celui-ci peinait à boucler son tour de table.

200 millions d'euros d'argent public

"Gérard Collomb a appelé la Caisse des Dépôts et consignations (le bras financier de l'État, ndlr). Pierre Moscovici (ministre de l'Économie de 2012 à 2014, ndlr) est aussi intervenu. C'est d'ailleurs ce qui explique sa présence lors de la pose de la première pierre. Quand la Caisse des Dépôts et consignations s'asseoit autour de la table, les autres banques sont rassurés et surtout cet établissement propose des prêts à des taux plus avantageux", explique un protagoniste du projet OL Land. Pour permettre aux supporters d'accéder au stade, la métropole de Lyon et le Sytral ont du injecté près de 200 millions. Mais malgré la forte dépense publique, Décines-Charpieu s'apprête à inaugurer ce samedi le premier stade privé de France.

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