Affaire Preynat : les interrogations des prêtres face à Barbarin

Ce lundi 25 avril, le cardinal Philippe Barbarin réunit tous les prêtres du diocèse à Écully. Les affaires de pédophilie qui touchent l’Église, dont celle du père Preynat, seront au cœur des échanges. Quelles sont les interrogations qui animent aujourd’hui ces prêtres ?

Suite à l’affaire Preynat, les prêtres ne parlent pas à la presse et renvoient systématiquement vers l’archevêché.Mais, en off, les langues se délient. Certains ne supportent plus l’omerta “et ne se sont pas engagés pour ça”. Alors que des prêtres à Saint-Étienne ou Paris n’hésitent pas à prendre position publiquement sur l’affaire Preynat, mais aussi sur d’autres affaires de pédophilie qui ont pu toucher l’Église, à Lyon c’est le silence.

Selon nos informations, il n’y a pas eu d’interdiction, mais les vicaires généraux ont fait passer la consigne de se rapprocher d’eux avant de répondre aux journalistes. Les langues pourraient se délier après la réunion de ce lundi 25 avril entre le cardinal Philippe Barbarin et les prêtres à la paroisse d’Écully. Lors de cet échange consacré aux affaires de pédophilie, les questions ne devraient pas manquer. Des prêtres veulent “crever l’abcès” pour comprendre et communiquer. La situation devient difficile, il y a eu des précédents entre eux et l’archevêché sur la communication. L’un d’eux explique : “Lors de la Manif pour tous, ceux qui ne reprenaient pas les propos de Mgr Barbarin sur leur compte Twitter ou Facebook se sont fait taper sur les doigts.” Un autre, qui confirme cette information, ajoute : “Il était très ouvert à ses débuts, nous avions beaucoup d’espoir, mais il est devenu traditionaliste.”

Le Barbarin d’aujourd’hui aurait perdu “en dynamisme”. Un proche explique même qu’il a “atteint des sommets lors du conclave de Rome pour l’élection du pape, où il a incarné une Église moderne par le seul fait qu’il se rendait aux réunions à bicyclette”. À Écully, les prêtres auront à cœur de savoir qui ils ont désormais en face d’eux et quelles sont aujourd’hui les impulsions du cardinal.

Vengeance des pro-mariage gay ?

L’une des défenses de ses proches et conseils est d’expliquer que les accusations portées contre Philippe Barbarin pour non-dénonciation dans l’affaire Preynat ne seraient qu’une vengeance des pro-mariage gay. La consigne circule parmi les prêtres, mais ne parvient pas toujours à convaincre. Le doute s’est instillé avec les contradictions du cardinal. Un prêtre, qui s’était impliqué dans sa défense au début de l’affaire, confie avoir très mal vécu l’entretien paru dans La Croix le 10 février, où Mgr Barbarin reconnaît avoir été informé dès 2007 du passé pédophile de Bernard Preynat, et non 2014 comme il l’avait jusqu’alors affirmé dans ses communiqués. Cet “oubli” en cache-t-il d’autres ? se sont demandé beaucoup de fidèles.

Une source interne de l’Église rappelle ainsi que l’une des premières actions de l’archevêque de Lyon “a été l’inauguration de la paroisse Saint-Michel du père Preynat, en septembre 2002”. Ce déplacement fut ensuite rapporté par le journal du diocèse, photo à l’appui. Un échevin, conseiller municipal lyonnais et chrétien, s’est interrogé dans une tribune publiée sur notre site sur la possibilité que le cardinal ait été informé dès 2002 du passé pédophile de ce prêtre, par l’administrateur diocésain Christian Ponson, qui avait assumé l’intérim suite au décès du cardinal Billé, qui fut aussi vicaire général, c’est-à-dire de facto DRH du diocèse. L’échevin se demande ainsi “pourquoi Mgr Ponson est aujourd’hui tenu au silence dans sa cure d’Écully”. A-t-il briefé le cardinal Barbarin sur les affaires du diocèse lors de la passation, comme c’est l’usage ? En juillet 2003, Mgr Ponson est affecté à la paroisse de Sainte-Foy, celle-là même où est passé le père Preynat. La réunion se déroulant à Écully, les prêtres pourront poser leurs questions directement au père Ponson et au cardinal.

Interrogé par Lyon Capitale, Mgr Ponson nous a renvoyés vers le diocèse. Pour l’instant, l’omerta règne, mais un prêtre résume ainsi la situation : “À trop vouloir incarner personnellement l’Église de Lyon, Mgr Barbarin arrive à ses limites.” Beaucoup rappellent la phrase qu’il avait lancée à Gérard Collomb, lors d’une visite de l’Hôtel-Dieu : “Tu n’as pas été élu pour gouverner seul.” Une formule qui trouve écho aujourd’hui. À Écully, il devra prouver qu’il n’incarne pas l’exercice solitaire du pouvoir mais qu’il est bien à l’écoute de ses prêtres.

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