Police lyon
© Tim Douet

Attentat de Marseille : pourquoi le terroriste a été relâché à Lyon ?

Le terroriste qui a fait deux morts à Marseille ce dimanche avait été arrêté à Lyon deux jours plus tôt pour un vol de veste dans un magasin. Il avait été relâché alors qu’une obligation de quitter le territoire français (OQTF) avait été demandée. Le rôle de la préfecture est depuis pointé du doigt. Gérard Collomb a saisi l’IGA pour “faire toute la lumière sur l’action des services de l’État” dans cette affaire.

Classement sans suite

L’attentat de Marseille, perpétré par un individu sans papiers d’origine tunisienne, a révélé que ce dernier avait été arrêté vendredi à Lyon puis laissé libre faute de place dans un centre de rétention administrative (CRA). Du côté des policiers, la question de la responsabilité de la chaîne pénale et administrative à Lyon divise. Vu la sensibilité du sujet, peu ont accepté de répondre nommément. Parmi les policiers contactés, certains critiquent le manque de réponse des autorités judiciaires et administratives. “Dans le cas de l’affaire du terroriste de Marseille, le magistrat en charge du dossier a dit que l’infraction n’était pas suffisamment constituée et pris une mesure de classement sans suite alors que nous avions tous les éléments légaux, matériels et moraux pour une mise en examen”, confie l’un d’eux. L’action judiciaire éteinte, les forces de l’ordre auraient alors contacté la préfecture pour demander une obligation de quitter le territoire français (OQTF). Sans réponse. “Ces fonctionnaires ne répondent que rarement et c’est récurrent à Lyon. Parfois, l’enquêteur de la Police nationale n’appelle même plus, par habitude, parce que l’on sait que ça n’aboutit jamais”, regrette ce même policier, qui pointe du doigt un problème spécifique à Lyon. À Paris, d’après lui, “ça ne se serait pas passé comme ça”. “J’y ai travaillé, confie-t-il, et pour ce type d’infraction, il y avait systématiquement des comparutions immédiates.”

“Rien d’inhabituel” avec “un tel flux de procédures”

Un autre, qui a quitté Lyon pour Paris justement, est plus nuancé : “Malheureusement, dans ce cas, il n’y a rien d’inhabituel. La personne n’était pas fichée S et il y a un tel flux de procédures qu’un étranger en situation irrégulière n’est pas immédiatement placé en CRA, parce que la première condition pour qu’une personne reparte, c’est qu’il faut que le pays d’accueil soit d’accord et c’est très compliqué de demander à un pays de payer pour le trajet.” Pour lui, il n’y a pas plus de problèmes à Lyon qu’ailleurs. Il préfère plutôt critiquer le manque d’effectif dans les différents services : “Les procédures d’OQTF sont des usines à gaz et, avec les moyens alloués, c’est très compliqué de faire les choses bien.”

“Le travail augmente avec moins de personnel et ce qui se passe là en est la conséquence”

Un manque de moyens partagé par Philippe Bouchu, délégué régional du syndicat UNSA-intérieur-ATS. “Cela fait 10 ans que les effectifs administratifs de la préfecture du Rhône subissent des coupes sombres. Il y a eu la RGPP, la MAP. Nous sommes la variable d'ajustement des déficits publics”, a-t-il critiqué. Pour lui “en aucun cas, les agents de la préfecture du Rhône ne peuvent être mis en cause dans cette affaire”. “Les fonctionnaires de préfecture font ce qu'ils peuvent. Le travail augmente avec moins de personnel et ce qui se passe là en est la conséquence et ce n’est pas un problème lyonnais parce que toutes les préfectures sont en souffrance”, a-t-il conclu.

Selon nos informations, le CRA de Lyon était réellement complet au moment des faits. La question qu’il reste à trancher est de savoir si un fonctionnaire de police administrative était présent ou non ce vendredi ? En cas de présence d’un fonctionnaire, ce dernier a-t-il transmis ou non la demande d’OQTF à sa hiérarchie ? Gérard Collomb, le ministre de l’Intérieur, a saisi l’Inspection générale de l’administration (IGA) pour “faire toute la lumière sur l’action des services de l’État”, notamment sur ces deux questions. De son côté, la préfecture a déclaré qu’en “complément de la permanence assurée par un membre du corps préfectoral 24h/24, la préfecture du Rhône tient les samedis, dimanches et jours fériés une “permanence éloignement” de 9h à 17h, destinée à prendre les mesures nécessaires lorsque des étrangers en situation irrégulière (ESI) sont interpellés” et s’est dite “bien évidemment à l’entière disposition des inspecteurs”. Le rapport de l’IGA doit être remis au ministre sous une semaine.

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