Avocats palais de justice
© Tim Douet

Accident tunnel Fourvière : le chauffeur condamné à 3 mois avec sursis

Au volant d’un convoi exceptionnel, Cyril Siaf s’engageait le 28 septembre 2017 sous le tunnel de Fourvière, entraînant l’effondrement d’une partie du plafond et le long blocage de la voie. Il comparaissait aujourd’hui au tribunal correctionnel. Une audience qui devait permettre de répondre à deux questions : à qui la faute ? Qui paiera la facture ?

Ça passe ou ça casse. C’est ce qu’a dû se dire Cyril Siaf le 28 septembre 2017, en s’engageant sous Fourvière au volant d’un convoi exceptionnel transportant une pelleteuse. Mais ça n’est pas passé. Au bout de quelques mètres, le bras mal replié de l’engin de chantier a accroché le plafond du tunnel. Des dalles de béton soutenant le système de ventilation se sont alors effondrées sur la route. Résultat des courses, un tunnel fortement endommagé, impraticable pendant de longues semaines. Fort heureusement, aucun usager de la route ne fut blessé.

Chef d’une petite entreprise florissante de démolition, Cyril Siaf comparaissait aujourd’hui au tribunal correctionnel. Il est accusé de trois délits : avoir conduit un camion de convoi exceptionnel sans posséder le permis requis ; l’utilisation dudit véhicule malgré son immobilisation faute de l’avoir passé au contrôle technique ; et le non-respect de l’interdiction pour les convois exceptionnels d’emprunter le tunnel de Fourvière sans autorisation préalable.

"Une peine équilibrée", selon le juge

"Ce juge, c’est un gentil", nous a confié un policier à l’issue de l’audience. Après délibération, le jugement est tombé. Cyril Siaf est condamné à 750 euros d’amende pour chacun des 3 délits, à 3 mois de prison avec sursis assortis d’une mise à l’épreuve de 5 ans, et à un an d’interdiction de conduire tout véhicule nécessitant un permis supérieur au B (voiture). Une peine "équilibrée" selon le juge. "Vous avez fait une grave erreur", a-t-il ajouté. Cette décision semble en effet constituer un point de compromis entre les verdicts requis par le procureur de la République et par l’avocat de la défense, chacun à son extrême.

Le procureur a requis la peine maximale

Dans son allocution, le procureur a souhaité revenir sur "des faits graves", mais où "tout le monde a eu beaucoup de chance". Les dégâts matériels mis à part, des "désagréments secondaires" selon le procureur, il n’y a eu aucun blessé lors de l’accident. Mais là où le bât blesse, c’est sur la décision du prévenu, Cyril Siaf, d’emprunter le tunnel de Fourvière.

Le jeune chef d’entreprise est qualifié d’"irresponsable et inconscient" par le procureur. "Au-delà des textes, le bon sens élémentaire demande la prise de précautions lorsque l’on s’engage dans un tunnel. Pour sa propre sécurité et pour celle d’autrui", ajoute-t-il. Pour le procureur enfin, cette erreur n’est pas "accidentelle", car Cyril Siaf "ignore sans chercher à les connaître, les prescriptions" propres à la conduite d’un convoi exceptionnel.

Le procureur a donc demandé "une peine particulière". Trois amendes, chacune de 1 500 euros, requise pour les 3 infractions de classe 5 commises par le prévenu. Une peine de prison de 12 mois de prison, avec sursis. Et enfin, 5 ans d’interdiction de conduite pour tous les véhicules, mais limitable au-dessus du permis B. Il s’agit des condamnations maximales pouvant être demandées pour délits routiers.

La défense dénonce une peine "médiatique"

Face au procureur, la défense de Cyril Siaf est scandalisée. "Il y a un sérieux problème dans la condamnation demandée par Monsieur le Procureur de la République", s’insurge Me Weckerlin, avocat de la défense. Pour lui, cette affaire a suscité une "effervescence" disproportionnée, notamment à cause de l’engouement médiatique généré. Il dénonce un "débat faux et mauvais", cristallisé autour de cette question : qui va payer pour les dégâts ?

Selon Me Weckerlin, la réponse est simple et la question déjà réglée. C’est l’assureur de son client, la société AXA, qui prendra en charge la facture, dont le montant n’est toujours pas fixé. "La Métropole n’a pas à s’inquiéter, a-t-il assuré. Le processus d’indemnisation est prévu par le Code des assurances". Me Weckerlin a notamment souligné que la condamnation à une réparation financière relevait d’une décision civile, et non pénale.

La faute à "l’erreur humaine" ?

"Il faut savoir raison garder", a imploré l’avocat de la défense. Il a demandé au juge, une "clémence particulière", et la dispense pure et simple de peine. Selon Me Weckerlin, la situation illégale de Cyril Siaf est régularisée depuis l’accident. Celui-ci possède désormais l’autorisation de conduire un convoi exceptionnel, le véhicule en question est passé au contrôle technique et est de nouveau apte à rouler. Et surtout, le prévenu connaît désormais les règles de conduite d’un tel engin. Tout serait donc pardonné.

Pour Me Weckerlin, la situation est claire. Sans erreur dans le montage de la pelleteuse, il n’y aurait jamais eu d’accident. Fi de l’absence de permis nécessaire, fi de l’immobilisation du véhicule inapte à la route et fi de l’interdiction d’emprunter le tunnel de Fourvière. L’avocat pointe également du doigt la complexité de la réglementation relative au transport et aux convois exceptionnels. La seule faute qui serait imputable à Mr Siaf serait d’avoir mal replié son lourd chargement. A ce détail prêt, il serait passé. Pas vu, pas pris.

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